Les réactions se multiplient en Asie au lendemain de l’attentat islamiste contre le journal français à Paris. Les condamnations sont presque unanimes, mais elles reflètent parfois des préoccupations locales.
En Inde, tous les quotidiens sans exception font ce 8 janvier leur une sur le massacre de la rédaction de Charlie Hebdo. La télévision indienne passe en boucle les images de l’attaque, ainsi que des hommages rendus dans toute la France à des caricaturistes et journalistes jusque-là totalement inconnus du public indien. « Il est temps d’affirmer tous ensemble que la liberté d’expression est un droit de l’homme fondamental, écrit l’éditorialiste du Times of India de ce 8 janvier.Et cela inclut le droit de critiquer toute religion quelle qu’elle soit. »
« Des taches de sang difficiles à nettoyer »
Dans un billet publié ce matin, Mohd Asim, musulman, éditorialiste de la chaîne de télévision nationale NDTV, réagit avec force. « Les caricaturistes sont morts mais c’est le Prophète de l’islam qui a été caricaturé, humilié et diminué (…). Ma peine est démultipliée par le fait que les auteurs de cette barbarie prétendent avoir agi au nom de la foi qui est la mienne (…). Les assaillants ont hurlé : "Nous avons vengé le Prophète", en criblant de balles la rédaction du magazine. Chacune de ces balles a en réalité tué le Prophète cent fois. Ces caricaturistes et journalistes qui resteront toujours en vie dans nos mémoires sont des martyrs de la liberté d’expression, alors que les taches de sang qui ont sali l’image du Prophète, seront difficiles à nettoyer. »
Dans l’Hindustan Times de ce jour, les dessinateurs de presse rendent hommage à leurs « collègues » français par des caricatures publiées sous les mots : « Now, all we can do is say #JeSuisCharlie ». Les caricatures des dessinateurs de presse, comme celles de Neelabh Banerjee du Times of India ou encore de Satish Acharya, publiées sur son compte Twitter quelques heures après l’attentat (voir photo ci-dessus), ont été rediffusées des milliers de fois sur les réseaux sociaux indiens.
« L’Inde est aux côtés de la France »
Le gouvernement indien a quant à lui réagi immédiatement, faisant part de « sa condamnation d’un acte terroriste injustifiable ». Le ministre des Affaires étrangères Sushma Swaraj a écrit à son homologue Laurent Fabius pour l’assurer que « l’Inde était aux côtés de la France dans sa lutte contre le terrorisme ».
Le Premier ministre indien Narendra Modi a twitté un message de soutien moins d’une heure après les faits : « Attaque condamnable et inqualifiable à Paris. Notre solidarité au peuple de France. Mes pensées vont aux familles de ceux qui ont perdu la vie ».
Des voix en faveur de l’attentat
Mais sans doute plus révélateurs sont les commentaires qui, depuis 24 heures agitent la toile et par milliers, affluent sur les sites des journaux comme celui du Times of India. En pleine controverse au sujet des « reconversions de masse » de musulmans et de chrétiens à l’hindouisme, accusées d’être des conversions forcées, certains internautes désignent l’attentat terroriste en France comme une preuve supplémentaire de « la barbarie des musulmans », tandis que d’autres n’hésitent pas à se prononcer ouvertement en faveur de l’attentat. S’opposant en effet aux nombreux internautes musulmans qui condamnent « un acte qui n’a rien à voir avec l’islam », ces derniers revendiquent « le devoir de tout musulman de convertir ou tuer les infidèles (kafir) ». L’un d’entre eux, un certain Haji Mohd Haneef, se réjouit de ce que « désormais, plus personne ne se moquera ni du Prophète ni des sentiments des musulmans ».
« Alors que ces porcs sèment la terreur dans le monde entier, rétorque un hindou qui se surnomme Proudbrahmin, nous avons en Inde un Premier ministre qui les expulsera définitivement du pays.