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Bernadette, sa vie après les apparitions de Lourdes

BERNADETTE-SOUBIROUS-LOURDE

Fred de Noyelle / Godong

Statue de Sainte Bernadette Soubirous, à Nevers (Nièvre)

Anne Bernet - publié le 17/02/24

La vie de la petite Bernadette Soubirous après les apparitions de Lourdes ne fut pas un long fleuve tranquille. Devenue religieuse chez les Filles de la Charité, Sœur Marie-Bernard vécut treize ans à Nevers où elle attirait beaucoup de monde, non sans de grandes souffrances et d’humiliations qu’elle accepta avec patience et douceur. L’Église fête sa mémoire le 18 février.

Ce 30 octobre 1867, au couvent des Filles de la Charité de Nevers, c’est jour de fête car quarante-quatre novices prononcent leurs vœux solennels. Ces jeunes filles seront professes de la communauté, puis elles recevront leur obédience, leur poste, et seront dispersées entre les maisons de la congrégation. L’évêque les appelle une à une. Une seule impétrante reste assise à sa place : on l’a oubliée, ou pis encore… Mgr Forcade se penche vers la supérieure générale, interroge : “Et notre sœur Marie-Bernard ?””Monseigneur, elle n’est bonne à rien !” Un silence glacial plane ; sœur Marie-Bernard s’est levée, écarlate. Agenouillée devant le prélat, elle s’entend assigner cette obédience extravagante : nulle part. 

“Bonne à rien”

L’évêque se penche : “Est-ce vrai, ma pauvre enfant, que vous n’êtes bonne à rien ?” “Oui, Monseigneur” puis, d’une voix qui se brise : “Je vous l’avais dit à Lourdes, et vous m’avez répondu que cela ne faisait rien.” Contrariée car ni l’évêque ni la jeune fille ne jouent le rôle qu’elle leur avait assigné, Mère Joséphine dit : “Monseigneur, si vous le voulez, nous pourrons la garder par charité ici à la maison mère et l’employer à l’infirmerie, pour le nettoyage et les tisanes. Comme elle est toujours malade, ce sera justement son affaire !” Mgr Forcade adoucit le propos : “Moi, ma sœur, je vous donne l’emploi de la prière.” Sœur Marie-Bernard se retire, sans avoir rien compris, pas plus que les autres religieuses, à l’humiliation publique qui vient de lui être infligée. Hormis les supérieurs, personne ne sait qu’il s’agit en fait d’un honneur exceptionnel, un moyen de la garder à la maison mère, contrairement aux usages car c’est le couronnement d’une vie de service, et la preuve de l’intérêt que l’on porte à ce tout petit bout de femme, haute d’1,44 m. 

Bonne à rien, sœur Marie-Bernard ? Certes, asthmatique depuis l’enfance, maladie qui a caché jusqu’à ces derniers mois la tuberculose qui la ronge, elle passe son temps à l’infirmerie. Il y a juste un an, on a cru qu’une crise plus grave allait la tuer, l’on s’est empressé, affolé à l’idée de la perdre sans avoir entériné son appartenance à la congrégation, de l’admettre comme professe in articulo mortis même si, le lendemain, en constatant son rétablissement, on lui a repris le voile d’étamine noir et la croix de profession, comme la règle le prévoit. Personne, elle est la seule à l’ignorer, ne la renverra, même si on l’a reçue “sans dot”, par charité comme dirait Mère Joséphine, la seule à ignorer que le Ciel l’a dotée mieux que ne l’aurait été une fille de roi et que toutes les congrégations se sont disputé la gloire de la recevoir… 

Brimades et reproches

Car sœur Marie-Bernard est Bernadette Soubirous, qui, entre le 11 février et le 16 juillet 1858, a vu dix-huit fois la Sainte Vierge. Les apparitions de Lourdes ont connu un tel retentissement, le pèlerinage a pris un tel essor qu’avoir Bernadette dans sa communauté “ne serait pas sans bénéfice”, pour parler comme Mère Joséphine voilà peu, quand elle avait peur que des rivales “viennent lui voler” la privilégiée. Mais, une fois rassurées et Bernadette chez elles, les supérieures ne lui ont infligé que brimades et reproches. Afin de la mortifier, certes, l’aider à se sanctifier, en toute bonne conscience mais aussi un peu parce que cette fille au français hésitant, qui sait à peine lire et écrire, et garde un caractère affirmé, ne correspond pas à l’idée que ces grandes bourgeoises se font d’une confidente de Notre-Dame… Pourquoi Celle-ci s’est-elle abaissée jusqu’à cette “paysanne grossière et sans instruction alors qu’il y a des religieuses sages et vertueuses” ? C’est sûr, on se le demande… 

Non que Bernadette les déçoive, car les supérieures sont assez intelligentes pour mesurer la vertu, la piété, l’acceptation silencieuse des croix et de la souffrance qui la caractérisent, mais parce qu’elles ne la comprennent pas et auront, le temps passant, de moins en moins envie de la comprendre. Un jour, quand on commencera, après le décès de sœur Marie-Bernard, à parler d’instruire sa cause de béatification, son ancienne maîtresse des novices qui s’obstine à la décrire comme “une religieuse ordinaire” fera obstacle en marmonnant : “Attendez au moins que je sois morte.”

Le diable rôde et se brise

La vie de Bernadette à Nevers ? Au jour de l’an, on lui souhaite “humiliations et mortifications”, ce qui résume assez bien son quotidien… Mais, dès son entrée au couvent, qu’elle a préféré au monde, et même au mariage, elle a élu la croix et ses douleurs, qu’elle endure en disant : “C’est pour le gros pécheur.”

Cela ne lui interdit pas de se sanctifier ; affectée à l’infirmerie, sa compassion, sa douceur font merveille auprès des grandes malades qu’elle panse sans répugnance, des agonisantes qu’elle assiste, des défuntes dont elle fait la toilette. Tant qu’elle en a la force. En 1875, sa tuberculose devenue osseuse, lui occasionne des souffrances atroces et la condamne, car ses genoux rongés ne la portent plus, à rester alitée, inutile, son cauchemar. Les escarres ajoutent à son calvaire, et les piques calculées pour briser “son petit amour propre” des supérieures. Début 1879, elle demande que l’on retire les images pieuses qui ornent son alcôve et nourrissent ses méditations ; elle explique, montrant son crucifix : “Celui-là me suffit.”

Je ne pensais pas qu’il fallait tant souffrir pour mourir.

Aux douleurs physiques s’ajoutent des angoisses spirituelles. On a tant dit à Bernadette qu’elle correspondait mal aux grâces reçues qu’elle s’est persuadée de son indignité, et presque de sa damnation… “J’ai peur, j’ai si peur ! J’ai reçu tant de grâces et j’en ai si peu profité  !” gémit-elle ; le diable rôde, qui se brise sur l’incroyable résistance de cette toute petite femme. L’Immaculée ne le laissera pas triompher de sa confidente. “Je suis moulue comme un grain de blé” soupire la fille du meunier du Moulin Boly. Mais si le grain ne meurt, il ne peut porter de fruit et Bernadette le sait.

Ses dernières paroles

Vers midi, le 16 avril 1879, elle entre en agonie. À la sœur qui lui suggère de demander des “consolations à Notre-Dame”, elle répond : “Non, pas de consolations. Mais la force et la patience.” Elle s’éteint à 3h de l’après-midi ce mercredi de Pâques. Ses dernières paroles font écho à celles du Christ crucifié qu’elle a tant aimé : “J’ai soif … ” “Je ne vous promets pas de vous rendre heureuse en ce monde mais dans l’Autre,” lui avait dit la Vierge autrefois. Désormais et pour l’éternité, Bernadette la revoit face à face.

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Bernadette SoubirousLourdesSaintsVierge Marie
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