Sous les contraintes du confinement sanitaire, les paroisses réinventent de nouvelles manières de vivre leur communion fraternelle et spirituelle. Contre toute attente, les réseaux sociaux virtuels peuvent aider à retourner au réel de la vie de l’Église, explique le père Nicolas Guillou, délégué épiscopal à l’information du diocèse de Rennes et curé de paroisse.
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Le confinement dû au covid-19 nous a laissé dans la sidération. Chacun a dû s’adapter et apprivoiser cette nouvelle situation, unique dans notre histoire contemporaine. Rester chez soi pour se protéger d’un ennemi invisible fera dire à notre Président : « Nous sommes en guerre. »
Les conséquences sont désastreuses. Les malades souffrent et meurent par milliers, laissant les soignants épuisés physiquement et psychiquement. L’économie est à l’arrêt et l’avenir très sombre. Le confinement s’apprivoise, la vie ne devient pas si simple sans liberté d’aller et venir. Les familles ne peuvent plus accompagner leurs proches dans leur fin de vie ou dans les Ehpad sanctuarisés. Les obsèques se tiennent dans le cimetière ou à la porte du crématorium. Nos églises accueillent de moins en moins de célébrations, alors qu’il est toujours possible de vivre ce maillon essentiel pour le deuil.
Dans ce bouleversement de notre humanité, alors que l’on souhaite se tourner vers Dieu et sa miséricorde, les lieux de culte sont fermés et les offices interdits. Pourtant, en quelques jours les catholiques, prêtres et laïcs, s’organisent et diffusent des centaines de messes sur les réseaux sociaux sans parler des messes de KTO et du « Jour du Seigneur » qui battent des records d’audience (« Le Jour du Seigneur », avec plus de 2 millions de téléspectateurs, devant Téléfoot sur TF1 et Turbo sur M6, qui aurait cru cela ?). Le plébiscite est considérable dans la communauté catholique en général. Cette démultiplication des initiatives de la présence de l’Église catholique sur Internet étonne et enthousiasme la presse et nos contemporains : les catholiques existent bel et bien.
Pour sortir du tunnel
Cet engagement fort de l’Église catholique dans la transformation pastorale missionnaire, au travers de réseaux sociaux, permet de réconforter et de solidifier les communautés locales. Certains s’en attristent : quel est ce nouveau cléricalisme ? cette « débauche » de messes et autres prières sur les réseaux sociaux ? Pourtant, les catholiques dans leur ensemble plébiscitent cette nouvelle présence virtuelle. Ils savent qu’elle est nécessaire mais passagère, comme le pape François l’a précisé dans son homélie du 17 avril :
« L’Église, les Sacrements, le peuple de Dieu sont concrets. Il est vrai qu’en ce moment nous devons vivre cette familiarité avec le Seigneur de cette façon, mais pour sortir du tunnel, pas pour y rester. »
Vivre autrement la communion fraternelle
L’expérience que nous vivons en ce sens dans notre communauté locale de Notre-Dame-de-Bonne-Nouvelle à Rennes œuvre à la communion fraternelle. Elle permet la continuité de notre vie de communauté qui, bien que stoppée dans la réalité par le virus, est encouragée par l’antivirus virtuel des réseaux sociaux. Les témoignages de joie et de merci sont nombreux et encourageants.
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Ce lien au travers de la messe, l’adoration, la lectio divina et des enseignements par écrans interposés, contribue à poursuivre le compagnonnage qui se vivait naturellement dans nos paroisses et qui, après ce temps de pause virtuelle, rependra de plus belle sur le terrain de nos vies ecclésiales réelles. Nous apprenons ensemble à apprivoiser cet écran qui ne veut pas filtrer notre relation à Dieu mais, bien au contraire, nous proposer un chemin d’éducation à la relation du cœur à cœur avec notre Créateur. Grâce à cela, nous entendons bien volontiers cette parole de Jésus : « Quand deux ou trois sont réunis en mon nom je suis au milieu d’eux » (Mt 18, 20).
Notre communauté n’a jamais été aussi prégnante et priante, avec des liens qui se créent de façon mystérieuse et très évangélique.
C’est une bénédiction d’en faire l’expérience bien modeste, alors que la quarantaine pourrait confiner notre vie spirituelle, avec le risque du gnosticisme et de l’individualisme spirituels, comme le rappelle le Pape. Bien au contraire, notre communauté n’a jamais été aussi prégnante et priante, avec des liens qui se créent de façon mystérieuse et très évangélique. Nombreux en témoignent : la paroisse vit actuellement une continuité dans sa mission au cœur du monde.
Entrer dans le réel, poussés par l’Esprit
L’expérience est naturellement imparfaite car nous sommes faits pour le monde réel et nous sommes bien incarnés dans ce monde. J’en veux pour preuve les souffrances que nous devons subir face à l’ennemi invisible, car nos vies ne sont pas stéréotypées au son des chaînes d’information, véritables virus d’angoisse et d’anxiété. De fait, nous sommes invités à un chemin pascal via cette nouvelle forme de communication, passant de la Croix à la Résurrection, de l’angoisse médiatique à l’espérance charismatique.
Après le virtuel imposé par un virus immatériel mais virulent, nous entrerons dans le réel, poussés par le souffle de l’Esprit…
Comme baptisés et amis du Christ, sachons accueillir le souffle de l’Esprit durant ces cinquante jours qui nous poussent vers la Pentecôte : comme Nicodème, Il nous permettra de « renaître de l’Esprit » (Jn 3, 5). Après le virtuel imposé par un virus immatériel mais virulent, nous entrerons dans le réel, poussés par le souffle de l’Esprit, notre paraclet et notre bouclier, pour affronter un nouveau monde qui attend une Espérance que le Christ Ressuscité est venu offrir à tous sans exception. Ainsi, ceux qui œuvrent ainsi à diffuser l’espérance et la foi, au travers des nouveaux moyens de communication font véritablement œuvre de charité.
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