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2015 : si près et si loin. Il n’y avait ni la guerre en Ukraine, qui capte les attentions depuis deux ans, ni les agissements du Hamas en Israël, mais un monde déjà tourmenté et fragilisé. La guerre civile déchirait la Syrie, l’État islamique se développait en Irak et propageait ses métastases à travers les Afriques musulmanes, l’Égypte sortait d’une brève expérience de gouvernement conduite par les Frères musulmans, la Libye, depuis 2011, était soumise au chaos et aux combats incessants entre tribus et groupes armés. La tache djihadiste descendait vers le Mali et la Centrafrique, commençant la déstabilisation d’un Sahel déjà bien fragilisé.
La valise ou le cercueil
Neuf ans plus tard, rien n’a vraiment changé. Les conflits se sont stabilisés, mais ne sont pas réglés, les sociétés arabes sont toujours fragilisées, les mouvements extrémistes rêvent de reprendre les armes. C’était dans ce contexte de répression et de désolation que le pape François avait lancé l’expression "œcuménisme du sang". Face à l’État islamique et aux djihadistes, les chrétiens n’étaient pas catholiques ou orthodoxes, mais d’abord disciples du Christ et c’est pour cette raison qu’ils étaient tués. De l’Irak et de la Syrie, nombreux sont ceux qui ont dû choisir entre la valise et le cercueil. Beaucoup ont quitté leur terre, rompant avec une présence bimillénaire. La purification ethnique a conduit à une baisse dramatique du nombre de chrétiens ; ceux qui restaient devaient se cacher et faire preuve de grande prudence.
Le sang des martyrs
C’est dans ce contexte tendu que vingt Égyptiens, la plupart originaires de la ville d’Al-Nour, se rendent en Libye, dans la région de Syrte, afin d’y travailler pour subvenir aux besoins de leurs familles. Ils sont enlevés en décembre 2014 par des membres de l’État islamique. Avec eux, un Ghanéen, travaillant lui aussi en Libye, est également arrêté et adjoint au groupe. Après plusieurs semaines de détention, les 21 hommes sont conduits sur une plage de Syrte, vêtus d’une tunique orange, celle des condamnés à mort, par des hommes vêtus de noir, brandissant le drapeau de l’État islamique. Face à leur refus de renier leur foi, ils sont décapités le 15 février 2015. Leurs corps ne seront retrouvés qu’en octobre 2017, à l’issue de la bataille de Syrte, et après la fouille d’une fosse commune.
L’émotion suscitée par leur mort a dépassé le cadre du village d’Al-Nour et de l’Égypte, démontrant une fois de plus que le sang des martyrs est la semence des chrétiens. Le président égyptien Al-Sissi a annoncé en 2016 la création d’une église, aux frais de l’État, en hommage aux martyrs. Église inaugurée en 2018 par Al Sissi et le patriarche copte Tawadros II. En Jordanie et au Liban, le 15 février devient une date de commémoration des martyrs. Des icônes sont écrites, leur image se répand dans le monde chrétien.
L’œcuménisme de sang
Fait rarissime, en mai 2023, le pape François annonce que les martyrs coptes sont ajoutés au martyrologe romain, catalogue qui recense l’ensemble des martyrs reconnus par l’Église de Rome. Face à leurs bourreaux, ces hommes étaient d’abord chrétiens avant d’être coptes. Preuve que leur témoignage de foi porte bien au-delà de leur communauté d’origine. À Paris, le Petit Palais a fait l’acquisition d’une icône de Nikola Saric à la gloire de ces martyrs où apparaissent le Christ et le sang versé par les soldats de Daesh.
Le 15 février dernier, premier anniversaire de l’entrée des martyrs dans le martyrologe romain, une prière œcuménique eut lieu dans la basilique Saint-Pierre, en présence de reliques offertes au pape par Tawadros II. Preuve que neuf ans après leur mort, ces 21 martyrs continuent de vivre, témoin de la foi dans le Christ et du courage face à la barbarie.