Carême 2025
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Le 19 novembre 2024, la députée travailliste Kim Leadbeater déposait une proposition de loi, le Terminal Ill Adults (end of life) Bill, auprès de la Chambre des Communes. Dans sa première mouture, le texte autorise le recours au suicide assisté (« assistance to end their own life ») à des patients majeurs atteints d’une maladie en phase terminale et qui sont capables d’exprimer une volonté claire, informée et réitérée de mettre fin à leurs jours. Le texte précise que leur décision ne doit pas avoir été influencée ou contrainte par un tiers. Cette possibilité serait réservée aux personnes dont la capacité à prendre une décision est avérée ; il est statué que l’accès au suicide assisté ne serait pas accordé aux personnes atteintes de troubles mentaux ou d’un handicap et qui ne présentent aucune comorbidité qui justifierait une demande.
Le cynisme des intentions
Si cette proposition de loi est adoptée, les médecins ne seront pas soumis à l’obligation de proposer le suicide assisté à un patient, en revanche, ils devront aborder de façon exhaustive l’ensemble des options disponibles pour un patient en fin de vie, en particulier les soins palliatifs. Comme c’est le cas actuellement en France, les partisans de la légalisation de l’euthanasie ou du suicide assisté mettent en avant les garanties d’une prise de décision autonome, manifestation de la liberté donc chaque individu doit pouvoir se prévaloir. Pourtant, comme on l’observe dans les pays où l’« aide à mourir » se pratique déjà, les garde-fous tombent très vite.
Au Royaume-Uni, le cynisme des intentions derrière le texte apparaît dans les débats qui ont suivi le vote favorable en première lecture à la Chambre des Communes, le 29 novembre. Le texte est actuellement soumis aux propositions d’amendements d’une commission. Parmi les opposants au texte, le député conservateur Danny Kruger dénonce la suppression de l’obligation pour les médecins d’orienter leurs patients qui en ont besoin vers un parcours de soins palliatifs, tandis qu’ils deviennent autorisés à proposer le suicide assisté. Le Dr Llora Finlay, médecin en soins palliatifs, rappelle qu’un médecin représente une figure d’autorité, l’asymétrie dans la connaissance, réelle et perçue, entre lui et son patient, est considérable. Si le médecin cite la possibilité du suicide assisté, indique-t-elle à The Independent, le patient le percevra comme une réponse qui convient à sa situation, et donc interprètera cette proposition comme un conseil, parmi les options possibles. Pour autant, relève la BBC, le secrétaire à la Santé Wes Streeting, défavorable à la proposition de loi, avertit que les patients peuvent être contraints à demander que l’on abrège leur vie en raison d’un manque d’alternatives.
Pas de délai adapté pour les personnes handicapées
Selon la première mouture du texte, la possibilité du suicide assisté ne devrait pas être accessible aux patients incapables d’exprimer une volonté informée et libre de toute influence extérieure. Cela impliquerait de prendre en compte le cas particulier des personnes atteintes d’un handicap cognitif ou de trisomie 21, qui peuvent avoir une compréhension insuffisante de leur situation. Elles peuvent aussi être influencées par un entourage qui — à l’instar de la société en général — les considère comme un poids. Or un amendement qui accordait à ces personnes un accès à l’information adapté et un délai de réflexion plus long — a été rejeté. Rejeté également, le verrou de la majorité. Les patients pourront se voir proposer le suicide assisté dès l’âge de 16 ans, indique le site Parallel Parliament.
Les cas de violence conjugale
Comment être certain qu’une personne en fin de vie, forcément fragilisée, n’a pas été influencée par des proches qui verraient un intérêt matériel à son décès ? La vulnérabilité face aux pressions ne concerne pas que les personnes handicapées. La chroniqueuse et auteur Sarah Bitum cite dans le magazine The New Statesman des cas de féminicides conjugaux pour lesquels, alors que le suicide assisté n’était pas légal, la Cour a retenu le mobile de l’altruisme alors que tout indiquait qu’il s’agissait d’un meurtre commis dans un contexte de violence conjugale. La justice, dit-elle, n’est pas regardante face au cas de figure d’une femme euthanasiée. L’auteur s’inquiète aussi du fait que de nombreuses victimes d’un conjoint violent en viennent à les croire quand ils leur répètent qu’elles n’ont aucune valeur. En cas de maladie qui les rend dépendantes, elles demanderont très certainement un suicide assisté.
L’inquiétude d’une trentaine de députés
Voyant le texte ainsi modifié, une trentaine de députés qui avaient confiance en la première version du texte veulent retirer leur soutien à la proposition de loi. À présent, la majorité ne dépend plus que d’une quinzaine de voix et le texte pourrait être rejeté en troisième lecture. Il reste aussi à connaître la décision de la Chambre des Lords, plus conservatrice que la chambre basse.
Les catholiques invités à prier le chapelet
Dans l’attente de l’examen final du projet de loi, les catholiques du Royaume-Uni et du monde entier sont invités à prier le chapelet. Une initiative intitulée “Rosary Crusade” (“Croisade du Rosaire”) menée par Voice of the Family, une organisation de « laïcs catholiques, formée pour défendre l'enseignement catholique sur la famille », selon son site Internet. La Croisade du Rosaire se terminera le 25 avril, le premier jour de l’examen du projet, par une récitation publique du chapelet dans l'Old Palace Yard, à Westminster.