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[HOMÉLIE] Les cinq étapes de vie intérieure révélée par Jésus sur le Mont Thabor

TRANSFIGURATION

La Transfiguration, détail d'une aquarelle de James Tissot.

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Simon d’Artigue - publié le 15/03/25
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Curé de la cathédrale Saint-Étienne de Toulouse, le père Simon d’Artigue commente l’évangile de la Transfiguration, pour le 2e dimanche de carême. Pour découvrir le sens de notre vie, il nous faut suivre le chemin du Thabor, une école de vie intérieure en cinq étapes indiquées par Jésus, que les apôtres ont suivie.

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Nous cherchons tous le sens de notre vie… J’ai essayé la bière, mais ça n'étanche pas. J’ai essayé Instagram, mais ça ne fait pas rêver. J’ai essayé le rugby, mais ça ne ravit pas. J’ai essayé le travail, mais ça ne contente pas. J’ai essayé l’argent, mais ça ne suffit pas. J’ai essayé la télévision, mais ça ne satisfait pas. J’ai essayé les voyages, mais ça ne réjouit qu’un moment. J’ai essayé la montagne, mais ça ne rassasie pas. J’ai essayé la musique, mais ça n’enchante pas. J’ai essayé la poésie, mais ça ne comble pas… Parce qu’il y a une immense soif dans le cœur de l’homme, parce que le cœur de l’homme est à la taille de Dieu.

Jésus est venu pour combler le cœur de l’homme

Le cœur de l’homme est fait par Dieu. Le cœur de l’homme est fait pour Dieu. On essaie de le combler de mille manières et aucune ne fonctionne, toutes déçoivent. C’est pour cela que Jésus est venu : pour combler le cœur de l’homme. C’est pour cela que Jésus emmène Pierre, Jacques et Jean sur la haute montagne. C’est pour cela qu’il leur apparaît transfiguré. Pour combler leurs cœurs de la seule nourriture qui vaille, Lui, pour l’adorer, le contempler, l’écouter. Pour leur révéler le sens de leur vie : une vie unie à Dieu. Pour nous montrer le sens de notre vie, une vie unie à lui.

C’est cette union, cette intimité qui a transformé leur vie, c’est cette union qui va transformer notre vie. Pour cela, il faut suivre le même chemin que les apôtres, le chemin du Thabor, qui est une école de vie intérieure, une école de prière. Et sur ce chemin, Jésus nous indique cinq étapes.

1"Jésus prit avec lui Pierre, Jean et Jacques" (Lc 9, 28)

La prière commence toujours par une mise à l’écart, il faut savoir arrêter notre rythme de vie débile, notre rythme de vie à cent à l’heure, épuisant, pour nous arrêter. Nous mettre à l’écart, ce n’est pas abandonner le monde, ni le fuir, c’est juste sentir que j’ai besoin de silence, sentir que je ne suis pas juste fait que pour manger, scroller et consommer, que j’ai une vie intérieure, une vie spirituelle qui réclame sa nourriture faute de quoi elle risque de s’atrophier, de dépérir, puis de mourir. 

La mise à l’écart, c’est ce conseil que nous entendions au début du carême : "Quand tu pries va dans ta chambre, ferme la porte et prie ton Père qui est là dans le secret" (Mt 6, 6). La prière demande toujours cette première décision : suis-je prêt à m’offrir cet espace de respiration, ce temps quotidien où je me mets à l’écart du bruit, à l’écart de l’agitation, à l’écart des préoccupations, pour me tenir devant toi Seigneur ?

2"Il gravit la montagne" (Lc 9, 28b)

Cette montée sur le Thabor nous révèle deux choses sur la prière : la première, que la prière demande un effort. La prière est un combat qui demande une certaine résolution. À la seconde où je vais manifester mon désir de m’avancer vers le Seigneur, un tas d’obstacles va m’empêcher d’avancer. Pour le démon, il n’y a rien de plus insupportable que de voir un cœur qui choisit de s’approcher de Dieu, alors il va tout mettre en œuvre pour empêcher cette montée. La plupart du temps, il n’a pas besoin de grands stratagèmes, il se sert de nos fragilités naturelles (celles qui nous empêchent de grandir, de monter) : la paresse, la procrastination la suractivité, les distractions, le stress… Dans ce cas-là, que faire ? Garder les yeux fixés vers le but, vers le sommet du Thabor et avancer pas à pas, sans agitation, sans découragement, un pas après l’autre.

La seconde chose révélée sur la prière, c’est que cette montée, le progrès spirituel, se fait par étapes. Quand on commence une ascension, on ne rêve que du sommet, mais on sait qu’il va falloir du temps, des étapes pour y parvenir. Il en va de même de la vie spirituelle, qui demande de respecter les étapes ; c’est ce que nous enseignent les maîtres spirituels du Carmel, de sainte Thérèse d’Avila à saint Jean de la Croix. Le maître-mot de ces étapes, c’est l’humilité, car ce n’est pas nous qui choisissons le rythme de cette progression : c’est Dieu qui est le maître de l’ascension, le guide de haute montagne. Nous, nous ne pouvons que nous mettre humblement à la suite du Christ, à son école.

3"Celui-ci est mon fils, écoutez-le" (Lc 9, 35)

Il y a aujourd’hui une recrudescence de podcasts et de livres sur la méditation, la méditation transcendantale, la méditation de pleine conscience, où le but est de faire le vide en soi, ou bien de se reconnecter à son moi profond. Cette recrudescence est le signe de la soif immense de vie spirituelle, de vie intérieure de nos contemporains et du manque qu’ils éprouvent (et nous devons faire notre mea culpa, car s’ils vont chercher partout et un peu n’importe où cette nourriture, c’est que nous n’avons pas offert le trésor de l’Église). La prière, ce n’est pas faire le vide en soi, ce n’est pas non plus de se connecter à notre moi, avec un risque d’égocentrisme ou d’individualisme ô combien moderne, c’est de s’ouvrir à Dieu, de se connecter à Lui en écoutant sa Parole. Nous ne sommes pas le centre de cette prière, bien au contraire ! La prière nous invite à nous décentrer "pour remettre l’église au centre du village" ou plutôt pour remettre Dieu au centre de nos vies, pour le mettre au centre de nos cœurs. Et le premier moyen de ce décentrement, c’est la Parole de Dieu : écouter le Seigneur qui parle, qui parle dans l’Écriture, qui parle au secret de mon cœur.

Écoutez-le ! Après l’ascension qui demande un effort, une activité, il y a l’écoute qui est une ouverture, une passivité, car la prière n’est pas d’abord une technique, ce ne sont pas des choses à faire, c’est d’abord l’œuvre de Dieu en moi, dans la prière, c’est Dieu qui agit : "Écoutez-le."

4"Il n’y avait plus que Jésus, seul" (Lc 9, 36)

Être avec Jésus, comme Pierre, Jacques et Jean, vouloir faire une tente pour demeurer avec lui, c’est bien là le but de la prière, être avec Jésus seul. Il ne s’agit pas de faire des choses, mais seulement d’être, de demeurer avec lui, parce qu’on est bien avec celui que notre cœur aime, on aime rester avec lui en silence, c’est cette expérience-là que nous donne de goûter la prière, nous tenir en présence de Jésus, c’est ce qui comble notre cœur, ce qui nous procure la paix profonde, non pas de faire le vide, mais de le laisser nous remplir.

Mais finalement être avec Jésus, ce n’est pas seulement le but de la prière, c’est le but de la vie tout entière, c’est la caractéristique du disciple. C’est cette rencontre qui transforme la vie, c’est celle qui a transformé le cœur de Pierre, Jacques et Jean, c’est ce même compagnonnage qui transformera notre vie et c’est cette vie transformée qui transformera le monde.

5"En ces jour-là" (Lc 9, 36b)

Car il reste une dernière étape de la prière, c’est le retour au quotidien. Les disciples ne sont pas restés en haut de la montagne, ils sont redescendus, ils sont retournés dans la plaine auprès du peuple à qui Jésus les envoie, ils ont repris leur vie, leur mission. Car cet épisode de la transfiguration, cette pause dans l’évangile, se situe entre deux missions de Jésus et des disciples. Parce que la prière ne nous isole pas, la prière n’est pas un refuge, elle est une source quotidienne, source de paix, source de force, source de lumière et de joie elle est faite pour que nous retournions là où Jésus nous attend, là où il nous envoie.

Pendant ce carême, je vous propose chaque jour de lire l’évangile et de le méditer quelques minutes en silence, pour monter sur le Thabor avec Jésus. Cette prière quotidienne, ce n’est pas pour s’offrir un effort de carême sur un plateau, c’est parce que la prière est le lieu où Dieu transforme les vies. Comme il a transformé celle de Pierre, de Jacques et de Jean, il va transformer votre vie.

Lectures du 2e dimanche de carême :

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