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"Des pauvres, vous en aurez toujours avec vous, et, quand vous le voulez, vous pouvez leur faire du bien". Dans la grande basilique Sainte-Marie-des-Anges, la lecture lente et calme du texte de l’Évangile de saint Marc par une jeune bénévole française de “La maison des plus petits” serre le cœur de bon nombre. Juste derrière elle, une petite enfant lourdement handicapée dont on voit la main chercher celle de la lectrice, son accompagnatrice. Une caméra filme en gros plan ces deux mains qui se caressent et qu’on voit apparaître sur les écrans installés dans la basilique. À côté se trouve un pape François recueilli.
Des larmes de joie. Il y en a beaucoup ce matin à Assise, à l’occasion de la venue du pape François, en amont de la Journée mondiale des pauvres qui sera célébrée le 14 novembre. De toute l’Europe ils sont arrivés dans la ville du Poverello. Certains ont passé 24 heures dans leur bus… Mais tout le monde garde le sourire. Pas question de se plaindre lorsqu’on a rendez-vous avec le pape.
Ambiance dans la cité franciscaine
À 7h, ce matin, ils sont déjà là, sur le parvis de la grande basilique, formant une haie d’honneur. En attendant le Pape – qui n’arrivera que vers 9h30 -, l’ambiance est à la fête. Des Espagnols chantent. Des enfants en fauteuil roulant s’amusent. Des “Fratelli” – nom donné par l’association Fratello aux personnes vulnérables – patientent dans la fraîcheur matinale de la ville d’Ombrie.
On se remémore ici et là les précédents événements vécus avec le Pape. "Je viens pour réveiller ma dernière rencontre avec le Pape en 2016", souffle Louis, 54 ans, qui après le précédent pèlerinage de Fratello à Rome a retrouvé du travail.
"Venir ici est une lumière après une année difficile", confie pour sa part Aloïs, 65 ans, atteint d’une maladie grave dans sa jeunesse dont il continue de subir les conséquences quarante ans après. Ce Suisse résidant à Leysin a perdu son père en février. "Cela fait longtemps que j’attends ce moment à Assise", ajoute-t-il.
"On dit bien que lorsqu’on est deux ou trois à prier Dieu, il est au milieu de nous… Avec Fratello, c’est la communion, on en a les larmes aux yeux", abonde Véronique, venue avec le groupe parisien de l’Association pour l’amitié (APA).
Une rencontre intimiste
Le Pape arrive enfin et l’atmosphère se réchauffe encore. Lentement, il remonte la longue allée faite de “Fratelli”, les saluant abondamment, les écoutant, bénissant le doudou de Tristan, un enfant handicapé. "C’est une ambiance très étonnante, presqu’intimiste", murmure Alix Montagne, co-fondatrice de l’association Fratello, émue de voir le pape des pauvres retrouver les pauvres à Assise.
Puis le pontife argentin se dirige vers le cœur de la basilique qui abrite la Portioncule, cette petite chapelle que saint François d’Assise avait restaurée et où il accueillait les pauvres. Là, des personnes vulnérables ou en mission auprès des pauvres viennent témoigner de leurs expériences, faisant encore couler des larmes.
Des témoignages poignants
C’est le cas pour Gabriel, membre de Fratello, qui a connu "le désespoir et l’abandon de ce monde". "Ma traversée du désert a été pour moi l’occasion de m’apercevoir de l’amour de Dieu", explique ce Parisien qui a récemment demandé, à l’âge de soixante ans, le baptême.
Toutes vos souffrances ne vous ont pas empêché de regarder avec des yeux pleins de gratitude les petites choses qui vous ont permis de tenir.
C’est aussi le cas lorsqu’une Italienne d’origine roumaine raconte son calvaire après la mort de son mari et la venue d’une maladie qui l’a condamnée à vivre dans un fauteuil. C’est encore le cas en entendant le témoignage d’une jeune afghane qui raconte que si son corps est en Italie, son esprit est resté dans un pays aujourd’hui aux mains des Talibans.
Dans son allocution, le pape François remercie le courage et la sincérité de ces témoins. "Toutes vos souffrances ne vous ont pas empêché de regarder avec des yeux pleins de gratitude les petites choses qui vous ont permis de tenir", relève-t-il.
"Je n’ai pas compris ce que le Pape nous a raconté car tout était en italien !", concède André, quinquagénaire qui a vécu huit années dans la rue. "Mais ce n’est pas grave… Ce n’est pas l’essentiel. Moi j’ai senti une vive émotion. Nous étions avec lui et il était là pour nous. Je le sais. Je le sens. J’ai été visité par le Seigneur. Cela ne s’explique pas vraiment", confie l’homme au parcours “cabossé”. La main d’André serre très fort une petite croix qui vaudrait "tout l’or du monde". "C’est la croix que j’ai reçue le 17 octobre dernier, le jour où j’ai fait officiellement mon entrée dans l’Église, mon chemin vers le baptême".