Après le "réarmement démographique" promis par Emmanuel Macron en janvier 2024, Catherine Vautrin, actuelle ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et des Familles, a annoncé son intention de lancer un "plan démographique 2050", jouant sur deux leviers majeurs : relancer la natalité et accompagner le grand âge pour "vieillir en bonne santé". Son objectif ? Articuler tous les pans de son large ministère pour "préparer le pays à ce virage démographique". Dans une interview accordée au journal régional L’Union – L’Ardennais et publiée le 24 janvier, Catherine Vautrin affirme vouloir "lancer un chantier qui s’occupe à la fois de l’infécondité et de l’enfance, de l’organisation des soins et de la santé, du travail ou encore du grand âge".
Un plan sur 25 ans pour répondre aux enjeux mis en exergue par la dernière étude de l’Insee, marquée par la dégringolade du nombre de naissances en 2024 : avec 663.000 naissances, la natalité a chuté de 2,2% en un an et de 21,5% depuis 2010. Par ailleurs, en 2024, 646.000 personnes sont décédées en France, ce qui génère un solde naturel de +17.000, soit le niveau le plus faible depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. "Le delta (entre le nombre de naissances et le nombre de décès, NDLR) est extrêmement préoccupant", a commenté Catherine Vautrin. "En 2050, on aura deux fois plus de personnes âgées de 80 ans ou plus qu’aujourd’hui."
Lutter contre l'infécondité
Si la nouvelle ministre entend jouer sur différents tableaux pour accompagner le "virage démographique", quelles mesures compte-t-elle mettre en place pour relancer la natalité précisément ? Catherine Vautrin évoque de grandes thématiques dont les contours demeurent flous. Elle fait d’abord allusion à "l’infécondité" qui touche effectivement de nombreux couples aujourd’hui. Un sujet qu’Emmanuel Macron avait qualifié de "fléau" et de "tabou du siècle" l’année dernière. "La natalité baisse aussi parce que l’infertilité progresse", avait-il souligné, en annonçant le lancement d’un "grand plan" pour lutter contre l'infertilité. Un plan dont les mesures sont toujours en suspens. Catherine Vautrin semble donc investie de cette première mission consistant à lutter contre l'infertilité.
La nouvelle ministre confie également vouloir "étudier l’écart entre la fécondité et le désir d’enfant, l’équilibre vie professionnelle et vie privée, l’organisation du monde du travail, etc." Des mesures qui sont réclamées depuis longtemps par les associations familiales. Concernant l’écart entre la fécondité et le désir d’enfant, le calcul a été réactualisé en janvier 2024 par l’Union nationale des associations familiales (UNAF). Il en résulte que le nombre idéal d'enfants souhaité par les Français est de 2,27. Donc bien au-dessus de l’indice conjoncturel de fécondité (ICF) qui s’établit actuellement à 1,62 enfant par femme. "L’écart entre ces deux indices montre que les Français ne parviennent pas à accueillir le nombre d’enfants qu’ils souhaitent", concluent les Associations familiales catholiques (AFC), à contre-courant de la tendance, certes réelle mais visiblement minoritaire, des mouvements "no kids".
Pouvoir concilier vie professionnelle et vie privée
Quant à la conciliation vie professionnelle et vie privée, l’UNAF n’a de cesse d'alerter sur la détérioration de cet équilibre, maintes fois éprouvé par la destruction du congé parental à compter de 2014 et par un système de mode de garde insuffisant, coûteux et dont la qualité est devenue défaillante. En effet, un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) datant de 2023 a décrit une qualité d'accueil de la petite enfance "très disparate" et appelée à de profondes réformes. L'Igas pointait notamment trois problèmes structurels : la faiblesse du taux d'encadrement, la pénurie de professionnels et des contrôles insuffisants dans un secteur privé en pleine expansion. "On va clairement renforcer les contrôles, notamment dans les micro-crèches", a annoncé Catherine Vautrin. "D'ici septembre 2026, elles devront se conformer aux mêmes normes de qualifications que les petites crèches, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui (...). Je serai très ferme sur les contrôles". La ministre a également confié vouloir augmenter le nombre de places d'accueil pour les jeunes enfants, renforcer la formation et "aller plus loin sur l'attractivité de ces métiers".
Si le gouvernement semble vouloir prendre à bras-le-corps l’inquiétante baisse de la fécondité et réfléchir à des mesures pour relancer la natalité, la ministre n’a néanmoins évoqué aucune mesure fiscale. Or la destruction massive, ces dix dernières années, des aides socio-fiscales dédiées aux parents, est, pour l’UNAF, l’une des raisons de la chute des naissances. "L’enfant n’a pas de prix, mais il engendre des coûts et nécessite du temps pour les parents : un réinvestissement dans la politique familiale est urgent et attendu par les familles", affirmait l’association en janvier, en amont des résultats de l’Insee.