Nouveau coup de force du gouvernement Ortega au Nicaragua où six prêtres jésuites ont fait l'objet d'une procédure d'expulsion, samedi 19 août, à Managua (capitale du pays). "Poursuivant ses mesures arbitraires contre l'Université centraméricaine (UCA), le gouvernement nicaraguayen a également décidé de confisquer la résidence Villa del Carmen, où vivent les jésuites qui travaillent à l'UCA", a déclaré la Conférence des Provinciaux Jésuites d'Amérique latine et des Caraïbes.
D'après celle-ci, plusieurs policiers accompagnés de juges se sont rendus à la résidence des jésuites en début d'après-midi, et ont exigé que la communauté quitte la propriété sans délai, arguant de son appartenance à l'État. Malgré la présentation de documents attestant que la propriété en question est bien privée, les jésuites ont été contraints d'évacuer les lieux. Ils ont pu rejoindre la communauté de Saint-Ignace, elle aussi située à Managua.
Des mesures de plus en plus restrictives
La saisie de la résidence intervient quelques jours après l'officialisation de la confiscation des fonds et biens de l'UCA par le gouvernement Ortega. Dirigée par la communauté jésuite depuis 1960, ses activités d'enseignement ont été suspendues après avoir reçu l'ordre de saisie du tribunal de Managua. Encore avant, les autorités nicaraguayennes avaient annoncé le gel des comptes bancaires de l'université, accusée d'être un "centre du terrorisme organisant des groupes criminels", qui aurait "trahi la confiance du peuple nicaraguayen". Elle accueillait environ 5.000 étudiants en son sein.
L'UCA n'est pas la seule faculté visée par des mesures de restrictions gouvernementales. En mars 2023, l'université Jean Paul II et l'Université chrétienne autonome du Nicaragua (Ucan) se sont vues fermer avant de subir la nationalisation de leurs biens. En mai, c'était au tour de l'université catholique de l'Immaculée Conception. Les universités sont accusées, selon des motifs flous, de ne pas respecter "leurs obligations légales" et de ne pas suivre les programmes d'enseignement.
L'Église catholique dans le viseur du gouvernement
Au pouvoir depuis 2007, Daniel Ortega a été réélu en 2021 après un scrutin extrêmement controversé. Dès 2018, l’Église catholique fut considérée par le gouvernement comme un soutien majeur à l'opposition après avoir appelé à la cessation des violences et abrité des manifestants des les églises. Depuis, de nombreux actes d’intimidation et de vexation contre les catholiques au Nicaragua ont été recensés : expulsions de communautés religieuses et de prêtres ou d'évêques, à l'image de Mgr Alvarez, fermeture d'universités catholiques, interdiction des processions... à tel point que le Nicaragua est entré pour la première fois dans l’Index mondial de persécution 2023 de l’ONG protestante "Portes Ouvertes". L’Amérique latine devient ainsi la région du monde où la persécution des chrétiens augmente le plus en 2023.