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Deuil périnatal : savoir enterrer les morts et réparer les vivants

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Blanche Streb - publié le 14/10/20
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À l’occasion de la Journée mondiale du deuil périnatal, Blanche Streb se félicite que l’existence de ces tout-petits perdus dans le sein de leur mère soit enfin prise en compte aux yeux de la société. Une reconnaissance qui aide à traverser l’épreuve, en pleurant avec ceux qui pleurent.

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Aux prémices de l’automne, ce 15 octobre revêt chaque année une tonalité particulière. Bleue, rose, grise, avec un peu de noir et blanc délavé par les larmes… C’est la journée mondiale de sensibilisation au deuil périnatal. Il est bon d’en parler, de faire sortir du silence ce deuil si particulier car il touche chaque année des milliers de femmes et de couples. Toutes causes confondues, une femme sur deux a perdu, au cours de sa vie, un ou plusieurs enfants à naître, que ce soit lors d’une fausse couche, d’une interruption volontaire ou médicale de grossesse, d’une mort fœtale tardive… Ces situations, extrêmement diverses, ne peuvent être comparées ni amalgamées. Les causes et les circonstances qui auront conduit à cette perte conditionnent beaucoup la manière dont ce deuil sera accueilli, traversé, reconnu ou étouffé, facilement ou difficilement surmonté.

Se sentir reconnu dans le deuil

Même si le sujet est toujours difficile, ce deuil est de moins en moins tabou et on peut se réjouir des immenses progrès réalisés ces dernières années pour accompagner ceux qui y sont confrontés. Par exemple, depuis 2008, la délivrance d’un acte d’enfant sans vie est devenue possible dès lors qu’il y a possibilité de produire un certificat médical d’accouchement, dès 15 semaines d’aménorrhée. L’enfant peut alors être inscrit sur le livret de famille, les parents peuvent donner un prénom et choisir d’organiser des obsèques. La prise en compte et la considération de l’existence de ces tout-petits aux yeux de la société est une avancée majeure. Plus qu’un symbole, la reconnaissance de leur existence est aussi une reconnaissance des parents, comme tels.



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Cette considération envers le corps et cette possibilité de vivre des rites de deuil, constituent un grand pas en avant. “Enterrer les morts et réparer les vivants”, nous souffle Tchekhov. Une tentation de notre époque est de ne plus s’autoriser à vivre pleinement les étapes du deuil et à occulter la mort, surtout périnatale. Se sentir reconnu dans ce deuil ouvre la possibilité de le vivre pleinement, autorise à être dans le réel de la souffrance. Vivre ce qui doit se vivre a quelque chose d’apaisant, qui conduit à la consolation et à la reconstruction. Dans le livre collectif Rester vivants, qu’est-ce qu’une civilisation après le coronavirus (Fayard/Le Figaro), Alain Finkielkraut cite Giambattista Vico : “Le mot d’humanité vient de humare, inhumer, ensevelir”. Le philosophe, qui s’amuse de cette étymologie sans doute fantaisiste, nous rappelle qu’elle dit la vérité : sans rites funéraires, il n’y a pas d’humanité digne de ce nom.

Des mots sur les maux

Une autre pierre précieuse pour prendre appui dans cette vallée de larmes est « l’écoute ». Jean Monbourquette, prêtre et psychologue, spécialiste de l’accompagnement, en résume ainsi l’effet thérapeutique : “Ce qui ne s’exprime pas, s’imprime”. Pour ceux qui en ressentent le besoin, des associations offrent leur soutien en accompagnant l’épreuve de fausse couche, de la mort in utero, de l’IVG ou de l’IMG. Agapa, Spama, Naître et vivre, Sos Bébé, par exemple, proposent ainsi des cafés-rencontres, groupes de paroles, une écoute personnalisée, confidentielle et anonyme, des retraites de guérison. Cela ouvre des espaces de parole aux femmes, mais aussi aux hommes, pour mettre les maux en mots et leur permettre de rencontrer des personnes qui traversent la même douloureuse expérience.

Ce deuil laisse souvent l’entourage un peu démuni. Que faire, que dire, comment soutenir ceux qui doivent apprendre à dompter le vide de cet avenir qu’ils n’avaient pas vu venir ? Entre silence qu’il faut respecter et indélicate injonction à “tourner vite la page”, il n’y a pas “rien”, il y a un peu de place, qu’il est possible de combler avec patience et douceur.

Le temps tient toujours sa promesse

La perte d’un bébé a toujours quelque chose d’absurde. Affronter la mort alors qu’on était sur le chemin de donner la vie n’est pas dans l’ordre des choses, cette réalité crie sourdement dans les cœurs, les corps, les âmes des femmes et probablement dans toute notre humanité. Entendons cette souffrance, celle qui se tait, celle qui s’ignore, celle qui dévore, celle qui se surmonte, parfois jusqu’à embrasser l’oubli, force de la vie. Tout deuil prend du temps. Un pas en avant, un pas en arrière. Il y a le temps des larmes, n’ayons pas peur de pleurer avec ceux qui pleurent, c’est si consolateur, et puis regardons vers le haut. Le temps tient toujours sa promesse, il sait de la douleur desserrer la tenaille. Alors, vaille que vaille, choisissons la vie. Restons vivants.


FEMME ENCEINTE QUI PLEURE
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