Pendant cette période estivale, Aleteia vous propose de découvrir cinq lettres qui vous feront voyager à travers les différents âges de la vie. Aujourd’hui, plongez-vous dans le courrier destiné à un bébé dans le sein de sa mère, maître de simplicité et de vie intérieure. Cher petit,
Tu as reçu une âme dès ta conception et tu comprends les mystères cachés aux sages et aux intelligents. Tu nous conduis à l’invisible essentiel, tu nous livres un secret : c’est que la grandeur d’une vie ne se mesure pas, ne se pèse pas et ne se compte pas. En entendant battre ton cœur dans le sein de ta mère, tu nous invites à cesser de passer nos jours au tamis des critères de réussite extérieurs. Les adultes ont l’obsession de réussir leur vie. Bien peu s’inquiètent de réussir leur mort… Et qu’est-ce qu’une vie réussie ? L’ascension sociale et professionnelle, faire une grande école, se marier, avoir des enfants, et « mourir malheureux pour ne rien regretter », comme le chantait Balavoine ? Ce sont toutes choses qui sont bonnes, mais si l’on érige en absolu la réalisation visible, tangible et palpable, alors tu n’as pas réussi ta vie…
Et alors nous avons raté ce qui fait la valeur de vivre, car tu nous confies le trésor des âmes simples et tu pries avec le psalmiste ce cantique de l’enfance (Ps 130) : « Seigneur, je n’ai pas le cœur fier ni le regard ambitieux ; je ne poursuis ni grands desseins, ni merveilles qui me dépassent. Non, mais je tiens mon âme égale et silencieuse ; mon âme est en moi comme un enfant, comme un petit enfant contre sa mère. Attends le Seigneur, Israël, maintenant et à jamais ».
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Tu nous apprends à tenir notre âme « en paix et silence », nous qui remplissons notre vie de bruit. Tu nous apprends aussi à dépendre d’un autre, toi qui es relié au sein de ta mère, à son souffle et à son sang. Nous oublions trop que l’espace de notre vie ne se déploie que dans le cœur d’un autre, et en définitive dans le cœur de Dieu. Tant que nous n’aurons pas compris cela, nous serons toujours à l’étroit dans notre propre cœur. Tu nous fais saisir ce qui n’est pas dans les livres, ce que le Seigneur Dieu veut dire quand Il révèle dans le buisson son nom mystérieux : « Tu diras à Pharaon – celui qui tue les enfants et réduit l’homme à sa force de travail – : Je suis celui qui suis ».
Dieu se révèle par ce qu’Il est et non d’abord par ce qu’Il fait. C’est-à-dire que le Seigneur ne se laisse pas mesurer par les possessions ou les réalisations. Dieu est, tout simplement. Nous avons tendance à dire non pas : « Je suis qui je suis », mais : « Je suis ce que je possède, je suis ce que je fais ».
Petit enfant, tu ressembles à Dieu. Tu nous invites à nous réjouir d’être des « serviteurs inutiles » (Lc 17, 10) dans un monde où l’homme devient, toujours davantage, une valeur marchande. Tu ne « sers » à rien, comme la beauté et comme l’essentiel. C’est là ta gloire inaliénable. Quelle grandeur que celle d’être inutile, de ne pas d’abord être aimé pour ce que l’on apporte, mais pour ce que l’on est. Dieu t’a voulu pour toi-même.
Petit enfant, maître de simplicité et de vie intérieure, j’ai sans doute trop perdu l’enfance. Aide-moi à la reconquérir par la sainteté.
Père Luc de Bellescize
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