Il est parti, le jeune homme, loin de la maison de son père et loin du temple de son Dieu. Loin de lui, il s’en est allé dans les terres hostiles. Il avait, pour cela, rassemblé tout ce qu’il avait. Arrivé dans ce pays lointain, hélas, “il dilapida sa fortune en menant une vie de désordre” (Lc 15, 13). La famine arriva et avec elle, la désolation qui voit ses enfants mourir et se perdre. Le jeune homme alors a fui pour se réfugier parmi les porcs, mais même là, dans le fumier, il n’a pas trouvé à manger. Ce n’est qu’auprès de son père, accueilli dans les larmes et la joie de celui qui voit revivre son enfant, qu’il a trouvé, après ce long carême, la consolation.
Il y a en chaque homme une part de ce fils prodigue dont parle saint Luc dans son évangile. Cette rébellion est la conséquence du péché originel qui a inscrit dans l’homme le désir désordonné de vivre sans Dieu. C’est là toute la sagesse des Pensées de Pascal qui constate que “les stoïques disent : ‘Rentrez au-dedans de vous-même, c’est là où vous trouverez votre repos.’ Et cela n’est pas vrai. Les autres disent : ‘Sortez dehors et cherchez le bonheur en un divertissement.’ Et cela n’est pas vrai […]. Le bonheur n’est ni hors de nous ni dans nous. Il est en Dieu et hors et dans nous”. Arrêter de vouloir se passer de Dieu, c’est aussi constater que seul, l’homme ne peut rien si ce n’est s’épuiser comme un Sisyphe hissant à bout de bras la pierre qui sitôt dévale la pente. Arrêter de se passer de Dieu, c’est se jeter enfin avec confiance, comme le fils prodigue et tous les saints, dans les bras de ce Père qui aime tendrement chacun de ses enfants.