Une filiation peut surtout être établie entre l’exhortation apostolique du pape François Gaudete et exsultate, mettant en valeur la sainteté ordinaire, et L’Introduction à la vie dévote, ouvrage phare de saint François de Sales, et demeuré très moderne malgré son titre désuet en apparence. "Un saint triste est un triste saint", écrivait ainsi cet évêque de Genève exilé à Annecy, dont la spiritualité a inspiré saint Jean Bosco – dont le nom des "Salésiens de Don Bosco" – mais avait aussi tissé les prémices de la "petite voie" portée par sainte Thérèse de Lisieux à la fin du XIXe siècle.
Un saint très apprécié
Béatifié dès 1661 par le pape Innocent X et canonisé en 1665 par le pape Alexandre VII - des délais exceptionnellement rapides pour l’époque –, saint François de Sales a été proclamé docteur de l’Église par Pie IX en 1877 et saint patron des journalistes par Pie XI en 1923. Il fut en effet le premier à utiliser l’imprimerie pour diffuser un journal catholique, alors que cet outil était beaucoup plus massivement utilisé par les protestants.
Paul VI appréciait particulièrement ce "maître de spiritualité" qu’il voyait comme un précurseur du Concile Vatican II, et même comme un saint "œcuménique". Empêché durant 20 ans de prendre possession de sa cathédrale de Genève, il ne coupa jamais les ponts avec ses contradicteurs protestants, en poursuivant avec eux un dialogue ferme mais loyal. Lors de l’audience générale du 2 mars 2011 dédiée à saint François de Sales, Benoît XVI avait souligné salué la patience de ce docteur de l’Église, qui avait assumé "l’expérience, au-delà de la confrontation théologique nécessaire, de l’importance de la relation personnelle et de la charité".
Cet évêque des montagnes avait su montrer le visage d’un réel humanisme chrétien, avec des valeurs fortes : "culture et courtoisie, liberté et tendresse, noblesse et solidarité. Il avait dans son aspect quelque chose de la majesté du paysage dans lequel il a vécu, conservant également sa simplicité et son naturel", relevait le pontife allemand. "Avec son style familier, avec des paraboles qui volent parfois sur les ailes de la poésie, il rappelle que l'homme porte inscrite en lui la nostalgie de Dieu et que ce n'est qu'en Lui que se trouve la vraie joie et sa réalisation la plus totale", insistait Benoît XVI.
Former des "pasteurs miséricordieux"
Le 23 novembre 2002, Jean Paul II avait publié une Lettre à l’occasion du 400e anniversaire de l’installation de saint François de Sales comme évêque de Genève, en 1602, à seulement 35 ans. Dans son message adressé aux membres de la famille spirituelle salésienne, mais aussi aux journalistes et aux écrivains, le pontife polonais remarquait alors que les écrits de saint François de Sales faisaient partie de "la littérature classique", au service de toute l’humanité.
Jean Paul II avait aussi relevé la préoccupation de saint François de former "des pasteurs miséricordieux, capables d'enseigner le mystère chrétien et de célébrer toujours plus dignement les sacrements de l’Eucharistie et de la réconciliation". Il souhaitait ainsi faire comprendre à tous les chrétiens que "la pénitence est un moment de rencontre avec l’amour du Seigneur, qui accueille tous ceux qui viennent humblement demander pardon". Des paroles à la tonalité proche de celle du pape François, qui a fait de la miséricorde une notion centrale de son pontificat, notamment lors de l’Année sainte 2015-2016.