Il fait partie de ces ouvrages capables de suspendre le temps et de transporter ceux qui le contemplent dans le temps et l’espace. Le Livre de Kells, manuscrit enluminé né en Irlande aux environ de 800 est exceptionnel à de nombreux titres. Dépeignant les quatre évangiles du Nouveau Testament, il fait sans aucun doute partie des œuvres majeures de l’enluminure insulaire et demeure l’un des plus remarquables vestiges de l’art religieux médiéval. Enluminures, enchevêtrements, mises en abyme, profusion des détails, foisonnement des symboles… Le contempler est une invitation à la spiritualité.
Si le privilège était jusqu’à présent réservé à celles et ceux qui se rendaient physiquement au Trinity College de Dublin, où il est conservé, il est désormais accessible à tous en quelques clics. La prestigieuse université vient en effet de numériser les quelque 680 pages du célèbre ouvrage afin de le mettre gratuitement sur son site à disposition des curieux, croyants et esthètes.
Le Livre de Kells tient son nom de l’abbaye de Kells, située à Kells dans le comté de Meath (à côté de Dublin). C’est dans cette abbaye que le manuscrit a été conservé durant une bonne partie du Moyen Âge. Ce sont des moines originaires du monastère d’Iona, une île des Hébrides située au large de la côte ouest de l’Écosse qui ont fondé cette abbaye au début du IXe siècle à l’époque des invasions vikings. Iona abritait en effet l’une des communautés monastiques les plus importantes de la région depuis que saint Colomba, grand évangélisateur de l’Écosse, en avait fait son principal centre de rayonnement au vie siècle. Les nombreux raids perpétrés par les vikings ayant rendu l’île d’Iona peu sûre, de nombreux moines finirent par partir pour Kells où ils ont fondé une nouvelle abbaye.