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Les vigoureuses recommandations de la Ciase

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Jean-Marc Sauvé, président de la Ciase, et les membres de la commission, 8 février 2019.

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Agnès Pinard Legry - publié le 05/10/21
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Le rapport de la Commission indépendante chargée de faire la lumière sur les abus sexuels commis dans l’Église (Ciase) depuis 1950, publié mardi 5 octobre, contient une série de 45 recommandations exigeantes. Éclairage.

"Il est nécessaire de reconnaître la responsabilité de l’Église dans les abus sexuels commis par les clercs et les religieux". Les propos de Jean-Marc Sauvé, président de la Ciase, ont résonné de tout leur poids, mardi 5 octobre, lors de la présentation du rapport de la commission qu'il préside sur les abus commis au sein de l’Église depuis les années 1950. Au-delà des chiffres glaçants et de l’analyse de la politique ecclésiale à ce sujet, la commission a formulé par moins de 45 recommandations pour l'avenir.

La commission propose ainsi de reconnaître la responsabilité civile et sociale de l' Église "indépendamment de toute faute personnelle de ses responsables". "Il y a eu des fautes civiles et pénales des auteurs de ces violences, il y a eu des fautes de responsabilité de l’Eglise qui n’a pas dénoncé et ainsi exposé des enfants à des risques en étant en contact avec des prédateurs", a insisté Jean-Marc Sauvé. "Mais, surtout, il y a eu un ensemble de négligences, de défaillances et une couverture institutionnelle avec un caractère systémique". La Ciase souhaite donc pousser l'institution à "reconnaître" sa "responsabilité systémique" et, à ce titre, "examiner les facteurs qui ont contribué à sa défaillance". La Ciase suggère entre autres de mettre en place des dispositifs concrets de reconnaissance : cérémonies publiques, célébrations liturgiques faisant mémoire des souffrances infligées, mémorial des victimes et de leur souffrance...

D’après la commission il faut aussi réparer, dans toute la mesure du possible, le mal fait. "A minima pour les infractions prescrites par une institution indépendante de l’Eglise qui reconnaîtra le statut de victimes." Cette dernière doit permettre d'indemniser les préjudices subis par les victimes. "La question de l'indemnisation ne doit pas être un don mais un dû", a estimé Jean-Marc Sauvé. "Nous considérons que les victimes ont une créance" à l'égard de l'Église. La commission préconise d'individualiser le calcul de l'indemnisation due à chacune des victimes sans pour autant prévoir une réparation intégrale au sens juridique du terme. Le mode de calcul consisterait à prendre en compte "les préjudices subis plutôt qu'à se référer à des catégories d'infractions perpétrées". La commission écarte dans ses recommandations les pistes d'un appel aux dons des fidèles préférant que les indemnités versées aux victimes soient financées "à partir du patrimoine des agresseurs et de l'Eglise de France".

La nécessité de réformer le droit de l’Église qui "n’a pas contribué comme il aurait dû au traitement approprié des agressions sexuelles dans l’ Église" est vigoureusement pointé dans les recommandations du rapport Sauvé. La a commission estime que le droit canon est lacunaire et "largement inadapté à la répression des violences sexuelles". Elle plaide pour "une vaste remise à niveau" et notamment une définition claire des infractions, une plus grande place accordée aux victimes dans la procédure et une meilleure articulation avec la justice pénale. La réforme du droit canonique qui va entrer en vigueur le 8 décembre prochain est un début dans la mesure où, désormais, il reconnaît que les abus sexuels sont une atteinte à la vie et à la dignité des personnes. Mais la commission a également jugé important d’introduire dans la procédure pénale les règles d’un procès équitable. Elle estime important par exemple que la procédure pénale canonique soit ouverte aux victimes "Il est peu concevable d’imaginer que les victimes apprennent quelques années que la procédure a abouti !" a justifié Jean-Marc Sauvé. Pour les membres de la Ciase, il est aussi essentiel de mettre en place un tribunal pénal interdiocésain afin de mettre de la distance entre le diocèse et la répression canonique des abus sexuels. "Il existe une trop grande confusion des responsabilités entre la fonction de direction des ressources humaines – qui n’est autre que l’évêque – et l’évêque qui est également l’autorité même indirectement chargée de l’application des peines", a souligné Jean-Marc Sauvé.

Sur la question du secret de la confession, la Ciase estime qu’il "ne peut pas être opposé à l’obligation de dénoncer les atteintes graves sur mineurs et personnes vulnérables". "J’y suis personnellement favorable", a insisté Jean-Marc Sauvé. Attention, elle ne propose pas d'abolir le secret de la confession mais considère que la personne qui reçoit en confession des informations sur des mauvais traitements sur enfants ou personnes vulnérables doit, en application du Code pénal, les signaler aux autorités judiciaires et administratives. Elle considère que la loi de la République doit primer et que le secret de la confession ne peut pas, dans ce seul cas, lui être opposé.

Une autre réforme colossale va concerner celle de la gouvernance de l’Église. "Elle a fait obstacle à un traitement pertinent des agressions", a détaillé le président de la Ciase. La commission propose notamment que des laïcs puissent accéder plus largement aux instances décisionnelles. À noter qu'elle ne recommande pas l’abolition du célibat des prêtres, qui n’est pas identifié comme étant la cause des abus, ni l’ordination des femmes.

La Ciase exhorte enfin l’Église à revoir "cette vision de la sexualité qu’elle transmet au quotidien". Elle invite à ne "pas préférer se taire sur ce que l’on devine comme failles, troubles, ombres, que ce soit dans le célibat, la chasteté, le rapport homme-femme ou l’homosexualité". Elle propose ainsi de passer au crible "ce que l’excès paradoxal de fixation de la morale catholique sur les questions sexuelles peut avoir de contreproductif en matière de lutte contre les abus sexuels".

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