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Mozambique : “Quoi de plus tragique que d’être obligé de fuir comme du gibier ?”

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Mozambique.

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Maria Lozano - AED - publié le 07/04/21
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Quelques jours après l’attaque djihadiste lancée à Palma (Mozambique), le père António Chamboco, qui exerce son ministère dans cette ville, fait part de sa détresse et de son inquiétude quant au sort des fidèles de sa communauté.

De nombreuses zones d’ombres entourent l’attaque lancée par des djihadistes à Palma, ville portuaire située au nord-est du Mozambique, le 24 mars dernier. Si près de 180 personnes piégées dans un hôtel ont pu être évacuées, certaines auraient été par la suite tuées dans une embuscade. L’attaque de la ville à proprement parler a quant à elle fait des dizaines - voire des centaines ? - de victimes. Une situation qui inquiète particulièrement le père António Chamboco, un des prêtres qui exerce son ministère à Palma. Bien qu’il n’ait pas été à Palma, lorsque l’attaque a commencé le mercredi 24 mars, il a suivi de loin les nouvelles. Il est resté impuissant lorsqu’on l’a informé de la violence de l’attaque, des cadavres dans les rues, et du fait que des personnes ont dû fuir. L’attaque a été revendiquée lundi 29 mars par le groupe djihadiste autoproclamé État islamique.

"Quand j’ai entendu parler de l’attaque, j’ai ressenti de la douleur et de la tristesse. De la douleur, parce que ça fait déjà une année que je suis à Palma et que j’aime déjà les gens, la communauté", raconte le prêtre. Au début, il était encore possible de rester en contact avec Palma, mais les lignes téléphoniques sont devenues rapidement inutilisables. "J’étais en contact avec deux coordinateurs de la communauté catholique pendant la première phase [de l’attaque], quand le réseau téléphonique fonctionnait encore. On m’a informé qu’il y avait des coups de feu [dans le village], mais cinq minutes plus tard, il n’y avait plus de communication...". 

Le curé explique qu’il ne sait pas si l’église et la maison paroissiale de Palma ont été détruites ou saccagées par les terroristes. Le sort de la population est également incertain et inquiétant. La ville de Palma comptait environ 50.000 habitants. Selon les informations reçues, il y aurait eu des dizaines de morts et Palma serait maintenant une ville fantôme. Les images d’une vidéo envoyée à l’AED, qui aurait été filmée à Palma après l’attaque, montrent les restes d’un massacre sans précédent, avec des corps décapités et mutilés. 

"Les images que nous avons vues sont effrayantes. Nous ne pouvons même pas les partager, car leur brutalité offense la dignité humaine", explique de son côté Ulrich Kny, chef de projet pour le Mozambique à la Fondation internationale AED. Pour mémoire, dès le début, la Fondation a cherché à soutenir les efforts de l’Église locale auprès des populations déplacées, après avoir fourni les premiers secours d’urgence pour un montant de 160.000 euros. La Fondation a également fourni une aide à la subsistance aux prêtres et aux religieuses de la région, et financé la formation des séminaristes ainsi que d’autres projets liés aux besoins les plus urgents de la vie de l’Église au Mozambique.

"Par leur frénésie destructrice, les terroristes semblent vouloir faire le maximum de dégâts et semer une terreur immense", assure encore Ulrich Kny. "Nous nous demandons combien d’autres morts il faudra pour que le monde réagisse et mette fin à cette violence. On dirait que ces vies ne comptent pas. Cela me déchire le cœur". "Il faut mettre fin à cette violence sans limites", assène-t-il. "Le monde ne peut ignorer ce drame".

Des milliers de personnes sont toujours portées disparues. Le père Chamboco craint pour la vie de ses paroissiens. Les nombreux fidèles de sa communauté à Palma affirment qu’ils ne "savent quasiment rien...". En ce qui concerne son équipe, il n’a réussi à établir le contact qu’avec les deux coordinateurs pastoraux. "J’ai pu localiser l’un d’eux près de la frontière tanzanienne. Pour fuir les attaques, il est allé en Tanzanie et s’y trouve maintenant". L’autre coordinateur paroissial semble avoir trouvé refuge à Nangade, selon les informations rapportées par une dame rescapée de Palma. 

Nous avons prié lors de la Semaine sainte pour que le Christ, par sa passion, sa mort et sa résurrection, apporte soulagement à ces personnes qui souffrent.

Pour le père António Chamboco, malgré toute cette violence, un message d’espérance est nécessaire. "Nous avons prié lors de la Semaine sainte pour que le Christ, par sa passion, sa mort et sa résurrection, apporte soulagement à ces personnes qui souffrent en ce moment. Nous devons prier et faire confiance à Dieu pour qu’il apporte son aide et apaise la situation de la province de Cabo Delgado". 

La région de Cabo Delgado est, depuis octobre 2017, le théâtre d’attaques de groupes armés ayant revendiqué leur lien avec les djihadistes du groupe État islamique et plongé la région dans une situation de profonde crise humanitaire. Selon les Nations Unies, à la fin de l’année dernière, il y avait plus de 670.000 personnes déplacées, et plus de 2.500 personnes avaient été tuées. La situation s’est aggravée à la suite des dernières attaques. 

"L’attaque de Palma constitue une nette escalade du conflit. Palma était un endroit important", reprend Ulrich Kny. "On estime qu’il y avait plus de 100.000 personnes dans le district, parce qu’en plus des habitants locaux, plus de 40.000 personnes y avaient trouvé refuge pour fuir les attaques ayant eu lieu antérieurement dans d’autres districts. Ces gens ont dû fuir à nouveau. Quoi de plus tragique que d’être obligé de fuir d’un endroit à l’autre, comme du gibier ?".

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