La gratuité totale de la contraception des toutes jeunes filles contribue à banaliser la consommation de la sexualité, au mépris de toutes les règles de précaution sanitaire, mais aussi de l’éducation à l’amour responsable.
Depuis un décret entré en vigueur en août, la gratuité de tous les frais liés à la contraception passe sous la barre des 15 ans. Cela concerne notamment l’accès anonyme et gratuit à des examens gynécologiques ou biologiques, l’obtention d’une pilule, d’un anneau vaginal, la pose et le retrait gratuits d’un stérilet (DIU-Dispositif intra-utérin) ou d’un implant dans un centre de planification familiale… Tout cela, dans le dos des parents.
L’offre crée la demande
Émancipation, autonomie, lutte contre les grossesses non désirées des mineures… Est-ce que tout va bien dans le meilleur des mondes ? En réalité, cette gratuité est une forme de promotion qui porte en elle une certaine vision de la sexualité, du corps, de la procréation mais aussi du couple, et qui soulève donc un certain nombre de problématiques qu’on ne peut pas balayer d’un revers de bonne conscience en feignant de croire que “tout est sous contrôle” puisque la sexualité des jeunes est prise en charge par la société.
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Cette contraception gratuite dès le plus jeune âge n’est pas neutre. En ce domaine comme en tous, “l’offre crée la demande”. Ce type de mesures et les campagnes d’information qui les accompagnent au cœur des collèges, lycées et sur les réseaux sociaux contribuent à une forme d’injonction qui pèse sur les adolescents et les enjoint à entrer le plus tôt possible dans la sexualité. Dans le contexte actuel d’invasion du porno, d’hypersexualisation, à un âge où ils sont très influençables, où le regard des autres compte beaucoup trop, il n’est pas facile pour les jeunes de se sentir vraiment libres ne pas aller dans le sens du vent.
Considérer comme normal d’avoir des relations sexuelles à 12, 13, 14 ans, n’est-ce pas d’emblée considérer ces jeunes adolescents comme plus matures qu’ils ne le sont vraiment ? La plupart des professionnels de la protection de l’enfance demandent que soit réellement adopté un âge légal du consentement. Autrement dit, que soit reconnue par la loi l’incapacité d’un enfant de moins de 15 ans à donner son consentement. Cette mesure de gratuité avant 15 ans va donc à contre-courant de ces demandes de mesures de protection.
Un produit de consommation
Cette gratuité qui s’adresse aux jeunes filles leur envoie le message qu’elles sont seules responsables de leur “fécondité”. La prise de conscience de cette extraordinaire capacité de leur féminité de pouvoir porter et donner la vie est naturellement essentielle. Mais elle est d’emblée considérée comme une histoire “perso”. La fécondité n’est pas promue, et donc vécue, d’abord et avant tout comme une histoire de couple. Le garçon sera-t-il alors enclin à grandir en responsabilité, alors qu’on l’invite à voir la fille comme “dispo” en permanence grâce à la contraception hormonale, et comme seule à devoir assumer les conséquences d’actes sexuels qui les engagent pourtant l’un comme l’autre ?
Ces jeunes ados se préparent-ils ainsi à une future vie de couple fondée sur la confiance, la fidélité, le don mutuel et le don de soi, ou, en brûlant ces étapes, ne crament-ils pas au contraire les fondations de leur croissance dans l’amour ? Au fond, cette promotion du sexe dès le plus jeune âge tend à considérer la sexualité comme un produit de consommation, coupé de sa dimension profondément relationnelle.
Ni écologique, ni gratuit
Pour une très jeune fille, ce n’est pas anodin de commencer à prendre la pilule ou de se faire poser un implant hormonal dans le bras. À peine pubère, elle n’a pas le temps d’intégrer sa fertilité et son cycle comme des composantes de sa vie, elle se coupe ainsi d’une grande partie de son être. D’emblée, elle est contrainte de considérer son corps comme un problème, comme “imparfait”, comme devant être mis sous contrôle médical. Est-elle réellement accompagnée vers son “autonomie” alors même qu’elle s’enchaîne dès le plus jeune âge à la technique ou aux hormones de synthèse ?
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À l’heure où l’écologie devient une préoccupation omniprésente, et suite au scandale des pilules de 3e et 4e génération, on observe un plus grand désir des femmes de reprendre possession de leur corps, d’apprendre à maîtriser leur fécondité de manière naturelle, plus saine mais aussi plus écologique. Comment ne pas s’étonner alors de cet encouragement à prendre des contraceptifs hormonaux dès le plus jeune âge, sachant que la pilule, les implants mais aussi les stérilets ne sont pas dénués d’effets secondaires, non seulement sur le corps des femmes, mais aussi sur l’environnement ?
La fécondité est un immense terrain d’investissement, la contraception un marché juteux. Ainsi, le corps féminin, soumis dès le plus jeune âge au marché et à la technique, paye cher cette prétendue “émancipation”…
Si la gratuité est de mise, les produits ne le sont évidemment pas. Considérer la sexualité comme un produit de consommation assure la prospérité du secteur de la contraception. La fécondité est un immense terrain d’investissement, la contraception un marché juteux. Ainsi, le corps féminin, soumis dès le plus jeune âge au marché et à la technique, paye cher cette prétendue “émancipation”…
Au mépris de toutes les règles de précaution
Enfin se pose la question de l’anonymat. Une très jeune fille peut donc avoir accès à un stérilet ou un implant sans que ses parents en soient informés. Comment un parent pourra-t-il déceler ou comprendre les éventuels effets secondaires ? Alors même que pour toutes sorties scolaires, camps, activités sportives, il est de rigueur pour les parents de signer papier sur papier, sur ce sujet si important, ils sont totalement tenus à l’écart. Certes, la démission de nombreux parents dans l’éducation affective et sexuelle de leurs enfants est une réalité. Dans beaucoup de famille, ces sujets sont tabous, occultés, et les jeunes livrés à eux-mêmes sont contraints de se débrouiller seuls. Mais considérer par avance que tous les parents peuvent être exclus, que l’État prend le pas sur leur rôle d’éducateurs, n’est-ce pas une forme de trahison, qu’on observe déjà pour la gestion de la contraception dite “d’urgence” ?
Prendre une “pilule du lendemain” revient à recevoir en un jour une quantité de principe actif 50 fois supérieure à celle d’une pilule contraceptive, qui elle reste pourtant sous prescription et suivi strict.
La “pilule du lendemain” est également autorisée aux mineures de manière anonyme, gratuite, sans limite et sans contrôle. Les filles n’ont pas besoin d’en référer à leurs parents et aucune limite inférieure d’âge n’est posée pour déroger au principe de l’autorité parentale. Pour l’obtenir, il suffit de la demander dans une pharmacie. Puisque la délivrance est anonyme, aucun professionnel de santé ne peut surveiller ni enregistrer les éventuels effets secondaires, ni surveiller qu’une jeune fille n’y ait pas recours plusieurs fois au cours du même mois, ni proposer en parallèle une surveillance des risques liés aux maladies sexuellement transmissibles. Cette exception stupéfiante fait fi de toutes les règles de précaution sanitaires et des modalités habituelles de délivrance et de prise en charge par la sécurité sociale. Pourtant, prendre une “pilule du lendemain” revient à recevoir en un jour une quantité de principe actif 50 fois supérieure à celle d’une pilule contraceptive, qui elle reste pourtant sous prescription et suivi strict.
Comment apprendre à grandir en responsabilité ?
Enfin, ces mesures ne doivent pas nous faire oublier que “la maîtrise totale de la fertilité est illusoire” comme le rappelle l’Inspection générale des Affaires sociales, qui démontre le paradoxe contraceptif français : 72% des avortements ont lieu chez des femmes qui utilisent une méthode de contraception. Le gouvernement a indiqué fin 2019 que “chaque année, près de 1000 jeunes filles de 12 à 14 ans sont enceintes en France” et que “parmi ces grossesses, 770 se concluent par une IVG”.
À l’heure des applis pour les “coups” d’un soir, du tout est permis, les jeunes ont droit, et beaucoup y aspirent légitimement, à recevoir une éducation affective, et pas seulement un apprentissage technique, froid, hygiéniste, mécanique et consumériste de la sexualité qui invite à donner son corps mais surtout pas le reste, ni le cœur ni l’âme. Comme si nous étions découpés en tranches. Les jeunes générations méritent d’être accompagnées à grandir en responsabilité, en maîtrise et en estime de de soi, pour apprendre à s’aimer et à aimer en vérité. Et à découvrir pleinement la beauté de la sexualité et la profondeur du don gratuit de l’amour.
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