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Le jour où saint Augustin a rompu avec le manichéisme

SAINT AUGUSTINE
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Aliénor Goudet - publié le 28/08/20
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Le chemin de conversion de saint Augustin fut un périple long qui dura plus de quatorze ans. Sa quête de sagesse le fera passer par le manichéisme dont il condamnera plus tard les principes creux et blasphématoires. Imaginons sa rupture avec le manichéisme et l’aurore de son éveil à la chrétienté.Rome, 382. En sortant d’un énième cours de la journée, un soupir las s’échappe des lèvres d’Augustin. D’un pas lourd, il se rend chez l’évêque Fauste, le chef des manichéens, qui l’a invité à partager un repas avec quelques amis. À son arrivé à Rome, Augustin pensait que le métier de rhéteur lui permettrait de se confronter à d’autres grands penseurs et aiguiser encore plus son esprit assoiffé de sagesse. Quelle déception de voir que la plupart de ses confrères manichéens ne sont que des marchands qui ne remettent rien en cause et se proclament sages rien qu’en suivant les rites ordonnés par les élus. 



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Même Fauste de Milève, l’évêque dont on lui a vanté les qualités de grand sage, s’avère être plus doué pour éviter les questions que pour y répondre. Il prêche les enseignements de Mani sans expliquer le comment du pourquoi et se défile lorsqu’on l’interroge. Et savoir que lui-même enseigne ainsi agace profondément le jeune rhéteur. Mais à présent, c’est comme vendre du vent, et le sentiment d’être un imposteur ne le quitte plus. Voilà donc Augustin condamné depuis plusieurs mois à se poser lui-même les questions dont il espérait débattre avec d’autre chercheurs de vérité.

Une question en particulier le travail : celle du dualisme ontologique, qui voit le mal comme une part indéniable de l’homme, et responsable de tous ses mauvais actes. Ce principe même qui l’a séduit et mené au manichéisme il y a presque neuf ans de cela. L’homme est-il réellement impuissant face aux ténèbres ? 

Une fois chez Fauste, on le mène à la salle des fêtes, mais Augustin se fige devant l’entrée. Une corbeille de fruits attire son regard et un vieux souvenir lui vient à l’esprit; le souvenir de son crime. Il avait 16 ans à l’époque. Une bande d’amis l’avait suivie dans le verger voisin et ils y avaient volé des poires. Et sans même avoir croqué dedans, les avaient jeté aux cochons. Il se souvient très clairement de la fierté de son coup, des ricanements de ses amis aussi mauvais que lui à l’égard du fermier qui n’avait pu les rattraper… Et de la honte qu’il avait éprouvé devant sa mère. 

– Ah, Augustin, te voilà ! s’exclame Fauste s’approchant pour l’accueillir. Joins-toi donc à nous. 

– J’ai une question pour toi, Fauste. Tout homme à en lui la substance du mal et celle du bien. C’est bien là ce que l’on enseigne ?

La surprise ne manque pas de se manifester sur le visage de l’évêque. Il ne s’attendait certainement pas à être interrogé ainsi chez lui. Mais Fauste se reprend vite. 

– C’est exact. L’homme est fait de lumière et de ténèbres.

– Ce n’est donc pas moi mais le mal en moi qui est responsable de mes mauvais actes ?

– En effet. 

– Alors pourquoi punir les criminels s’ils ne sont pas responsables ? 

– Pour empêcher leurs actes d’affecter autrui, bien entendu. 

– Dans ce cas, à quoi bon jeûner et prier pour se purifier si je ne peux résister ou chasser le mal en moi ? 

Cette soudaine clarté d’esprit surprend Augustin autant que son hôte. Comme s’il avait enfin réussi à dégager ce qui bloquait son raisonnement depuis des mois. 

– L’homme est-il libre, Fauste ? demande-t-il alors. Et Dieu est-il tout puissant ? 

– Bien entendu ! Essaierais-tu de me faire blasphémer ? Je n’aime guère ce que tu insinue.

– Si l’homme est libre, c’est donc qu’il a le choix. Le choix de choisir le bien ou le mal. 

Sans ajouter un mot, Augustin quitte la maison où jamais il ne reviendra. 

C’est la rencontre avec saint Ambroise et la Parole qui achève de ramener Augustin au christianisme. Après sa conversion, ce dernier devient évêque sans jamais interrompre sa recherche de vérité. Il meurt le 28 août 430, et est canonisé et nommé docteur de l’Eglise en 1298 par le pape Boniface VIII. Les écrits intemporels de saint Augustin sont encore aujourd’hui des œuvres incontournables pour toute personne en quête de sagesse.



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