Dieu nous a créés comme des êtres autonomes. Cette autonomie ne doit pas nous faire oublier que notre existence vient de Lui et que c’est en Lui que nous trouvons le bonheur. Le mirage d’un homme auto-construit, produit d’un mensonge, nous conduirait à la folie, et plus radicalement, avec le transhumanisme, à la disparition.
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Le projet poursuivi par l’athéisme — rendre l’homme dans son être parfaitement autonome — est voué à l’échec. Si cette autonomie revendiquée était poussée à son terme logique, nous serions obligés de récuser notre dette envers toute réalité extérieure, que ce soit Dieu, l’évolution historique, la nation, ou la culture de notre pays. Or une telle quête d’indépendance absolue mène infailliblement à l’angoisse, et plus encore à la folie. À l’angoisse : à chaque instant l’homme serait forcé de s’interroger sur les ressources dont il dispose en lui-même pour « s’inventer soi-même » à chaque instant, avec à l’arrière-plan l’incertitude quant à la réussite de ce projet. En effet, laissé à lui-même, rien ne l’assurerait qu’il serait en mesure de se créer à partir de ce qu’il possède en propre.
Angoisse et folie véhiculées par l’athéisme
Cette quête d’autonomie absolue mènerait ensuite à la folie, parce que l’homme serait contraint de se déifier, de s’ériger en dieu de sa propre personne ! Non content d’élever sa propre personne en fin ultime de ses actes, il serait de surcroît dans l’obligation de se faire le démiurge de lui-même ! Or, comment un dessein aussi grandiose et exigeant pourrait-il être à la portée d’une créature finie, limitée et fragile tel que lui ? Pareilles fatuité et illusion, si elles sont posées en postulats métaphysiques, n’ont d’autre destin que de s’abîmer en folie chez celui qui les nourrit. L’illusion de pouvoir tout maîtriser, du commencement à la fin de sa trajectoire d’existence, conduit fatalement à se prendre pour celui que l’on n’est pas. Et qu’est-ce que la folie, sinon se méprendre au sujet de son identité ? L’homme n’est pas sa propre origine. Au commencement de notre existence, il existe un don, et en-deçà de celui-ci, un Donateur. L’ignorer, c’est s’exposer à de graves déconvenues, tant existentielles que spirituelles.
Une autonomie dévoyée
Certes, l’homme n’aurait jamais pensé à devenir autosuffisant s’il n’y avait pas un fond de vérité dans les présupposés de ce projet fou. Ce fond de vérité tient à ce que Dieu a fait de nous des créatures autonomes. Les choses créées ont leurs lois et leurs valeurs propres. Elles sont établies dans une consistance et une bonté bien à elles. Dieu, afin de faire de nous des créatures libres et méritantes, nous a rendus capables de nous déterminer par nous-mêmes, ce qui suppose une cohérence naturelle et intrinsèque de notre être, et donc une certaine consistance naturelle en nous qui s’étend aux lois de l’histoire et de la société.
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Cependant, cette autonomie est susceptible de devenir problématique dès lors qu’elle n’est plus référée à la source dont elle procède. L’élan vital de l’homme s’incurve alors sur lui-même, si bien que ce dernier se prend pour sa seule fin, et finit par croire qu’il s’est fondé lui-même ! Au mal moral d’ignorer son bienfaiteur divin vient s’ajouter le vice de la méconnaissance qui le tient dans l’illusion qu’il est son propre créateur !
Une usurpation qui s’appuie sur le mensonge
Si cette première illusion de se poser en créateur de soi n’est pas arrêtée à temps, elle déroulera sa logique dans une inclinaison de plus en plus mortifère. Cette usurpation de la place de Dieu ne peut tenir en effet que si elle est étayée par le mensonge. Pourquoi ? Parce que la distance est trop grande entre ce qui est donné initialement à l’homme comme monde extérieur, et ce qu’il est en lui-même. D’un côté, l’homme n’a pas de mal à éprouver sa finitude, sa faiblesse, son mal moral et son inconstance. D’un autre côté, face à la fragilité de son être, il constate les merveilles de la création qui le dépassent, ainsi que les biens ravissants vers lesquels le porte son désir, et dont toute sa fatuité n’arrivera jamais à le convaincre qu’il est le créateur ! Or si la foi en la bonté du Créateur, et plus encore en son existence, lui font défaut, grande sera pour lui la tentation de faire main basse par ses propres moyens sur ces biens entrevus, et de s’en instituer le propriétaire de droit, comme si ces biens étaient à lui ! Telle est la suggestion du démon : « Vous serez comme des dieux ! » Seulement, c’est là une parfaite illusion. Car même les moyens que l’homme utilisera pour s’approprier ces biens extérieurs lui sont donnés par Dieu ! Moyens qu’il est d’ailleurs tenté de diviniser : notre dieu est toujours celui qui nous permet de satisfaire nos désirs !
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L’homme ne s’est pas créé lui-même, et il ne s’est pas donné non plus à lui-même la réalité extérieure qu’il est tenté d’utiliser pour s’autonomiser. Devant cette évidence, deux solutions se présentent : soit il continue de s’aveugler au sujet de sa supposée auto-fondation, soit il reconnaît sa dette envers le Créateur. Voilà pourquoi l’athéisme ne peut survivre à ses contradictions que par le mensonge, aidé en cela par celui qui en est le prince : l’ange ténébreux qui, à l’origine, refusa de recevoir la grâce surnaturelle de Dieu et se complut dans son excellence naturelle — excellence qu’il ne tient même pas de lui-même, puisqu’il est lui aussi une créature ! Signalons au passage que la grâce est le moyen que Dieu donne à ceux qu’Il a créés afin qu’ils puissent arriver jusqu’à Lui. Le fini, en effet, n’est pas capable de franchir la distance qui le sépare de l’infini sans l’aide de celui-ci.
Gare à l’idolâtrie de la technique
On aurait tort de sourire des problématiques soulevées par l’athéisme. Derrière elles se profilent des projets ténébreux et inquiétants comme celui du transhumanisme, projets de faire venir au jour, par la technique, un surhomme qui périmerait notre fragile humanité. L’athéisme est une question qui ne regarde pas seulement la spéculation philosophique. Ses répercutions pratiques ne laissent pas d’inquiéter.
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À rebours de ce que l’athéisme sous-entend, tenons que Dieu n’est pas le concurrent de l’homme. N’attendons pas de disparaître avec le cyborg (un mixte « posthumain » de cybernétique et de biologie) pour en prendre conscience ! Acceptons de bon gré nos limites, sous peine de devenir des êtres aliénés par les projets fous des apprentis-sorciers des nouvelles technologies. Ce n’est pas notre dépendance envers Dieu qui met en péril notre liberté, mais plutôt le désir d’ériger la Science et la Technique en nouvelles idoles ! Science et technique ne sont pas mauvaises en elles-mêmes, mais à condition de rester à leur place, et de ne pas être prises comme moyens de bâtir un homme nouveau, déconnecté de sa Source surnaturelle ! C’est un paradoxe de notre foi, et non des moindres : la transcendance de Dieu, en nous préservant de diviniser une créature ou une abstraction, est le meilleur gardien de notre liberté.
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