Trois "C" pour définir la fille spirituelle de Padre Pio pendant plus de 50 ans : cœur, croix et charité ! Trois mots qui font aujourd’hui de Maria Gargani — en religion sœur Marie Crucifiée de l’Amour Divin — une bienheureuse. "Que son exemple et son intercession soutiennent ses filles spirituelles et tous les éducateurs", a souhaité le pape François, à l’angélus du 3 juin 2018, au lendemain de la cérémonie de béatification, à la cathédrale de Naples. En guise de réponse, une salve d'applaudissements.
Fondatrice de la Congrégation des Apôtres du Sacré-Cœur, en Italie, une congrégation destinée à l’évangélisation, à l’éducation et à la prise en charge de la jeunesse, Maria Gargani (1892-1973) est le modèle même d’une vie où l’exemple, la parole et la prière, ne peuvent fonctionner l’un sans l’autre. "Courageuse, volitive, et déterminée", comme elle est décrite dans la presse italienne, la bienheureuse, a eu très tôt la révélation de sa vocation : devenir enseignante.
Et elle l’est devenue, d’abord comme laïque dans une école, puis dans le Tiers-ordre franciscain comme catéchiste et enfin comme religieuse, en 1945, après s’être lancée dans la fondation d'un institut religieux qui s'occupe des jeunes. Le 12 mars 1963, son institut est définitivement approuvé par le pape Jean XXIII et s’épanouit en dehors de la ville de Naples, la maison-mère, apportant de nouvelles méthodes d’enseignement, comme expliquer la foi aux jeunes à travers des images projetées sur le mur, une première à l’époque.
À l’ombre du couvent des capucins
Toute cette énergie, et cette détermination, Maria Gargani l’a entretenue à force d’encouragements de Padre Pio, présent dans sa vie pendant plus de cinquante ans. Et ce n’est pas un hasard si sa béatification a eu lieu 100 ans après leur première rencontre à San Marco la Catola, près de Foggia, dans la seconde moitié du mois d’avril 1918. Le saint de Pietrelcina y venait rencontrer son directeur spirituel, le père Augustin. Et elle, à l’ombre du couvent des capucins, poursuivait sa vie chrétienne, entre le père Augustin et le père Benoit — autre père spirituel de Padre Pio — en qui elle avait trouvé des personnes "sûres" pour guider son âme "assoiffée de Dieu".
Cela fait deux ans que la jeune femme entretient avec Padre Pio une correspondance assidue sans jamais le voir. Une correspondance favorisée par le père Augustin qui a vu en la jeune femme "une autre âme dotée de grâces spéciales", et a voulu provoquer un contact spirituel entre les deux en lui demandant d’écrire à Padre Pio pour lui confier la direction de son âme pendant qu’il était au front comme aumônier militaire. À la première lettre de Maria, Padre Pio répond en tout logique : "Je suis heureux de connaitre tes caractères, mais Jésus m’a déjà fait connaître ton âme".
"Enfin, nous y sommes !"
A leur première rencontre, en 1918, Maria est à la recherche de sa vocation. Elle sent fortement que Dieu l’appelle à une vie de consécration totale, mais ne sait pas comment et où la réaliser. Durant leurs échanges, la jeune femme dit dans son journal intime qu'elle sent "l’Esprit Saint souffler si fort", qu’il lui semble de "toucher le sommet du mont Thabor", et son âme sentir alors "le désir, comme les apôtres, de rester à jamais avec ces douces conversations" (Settimanale Padre Pio). 67 lettres envoyées depuis. Quand Maria annonce dans une de celles-ci son inspiration de fonder un nouvel institut, la réaction de padre Pio est immédiate : "Enfin, nous y sommes ! C’est la volonté de Dieu, dépêche-toi d’aller chez l’évêque, dépêche-toi, c’est très beau !". Il ne cessera de la soutenir dans son projet, par la prière et en lui donnant des conseils.
Un modèle pour ceux qui ont soif d’amour
Mère Maria est décédée à Naples le 23 mai 1973, à l’âge de 81 ans. Sa vie est devenue, selon l’archevêque de Naples, le cardinal Crescenzio Sepe, "un exemple pour tous ceux qui souhaitent entreprendre des chemins spirituels capables de donner des réponses à leur soif d’Amour". Le miracle qui a ouvert la voie à la béatification de Maria Gargani est la guérison de Michelina Formichella de Torrecuso (Bénévent), atteinte d’un cancer généralisé, qui priait son intercession et une nuit, en 1975, l’a vu apparaître et lui dire : "Tu vas bien Michelina, tu vas bien", en la tapotant sur l’épaule avant de s’éloigner.