Face au président du pays, le pape François a, pour la deuxième fois, dénoncé le “génocide” arménien, terme toujours inacceptable pour la Turquie.“[Le Brexit] est la volonté exprimée par le peuple. Cela exige de nous tous une grande responsabilité afin de garantir le bien du peuple du Royaume-Uni, ainsi que le bien et le vivre ensemble de tout le continent européen”, a déclaré le Pape aux journalistes qui l’accompagnaient à bord de l’avion le conduisant en Arménie. Une réponse brève, prudente, sur l’issue du référendum au Royaume-Uni, qu’il a dit avoir apprise juste avant de monter dans l’avion et dont il a eu confirmation durant le vol.
Les citoyens du Royaume-Uni ont répondu au référendum du 23 juin en votant “non” à 51, 9% contre le maintien de leur pays au sein de l’Union européenne.
Colombie
En revanche, réaction beaucoup plus expansive du Pape à l’annonce de l’accord historique de cessez-le-feu conclu jeudi, à la Havane, entre le gouvernement colombien et la guérilla qui ont décidé, après cinquante ans de conflit, d’enterrer leurs haches de guerre. “Je suis heureux de cette information, qui m’est parvenue hier”, a-t-il déclaré. “Après plus de cinquante ans de guerre, de guérilla, tant de sang versé, c’est une bonne nouvelle, j’espère que les pays qui ont travaillé pour obtenir la paix, ont eu la garantie que tout ira pour le mieux.”
Les pays impliqués dans le processus de paix sont : Cuba, le Chili, le Venezuela, la Norvège, avec la participation de l’Onu. Un envoyé du président américain, Barack Obama, était également présent à la signature de l’accord. Le Saint-Père a ajouté : “J’espère que l’accord “est blindé” au point de ne jamais pouvoir revenir en arrière, c’est à dire à une situation de guerre”.
Il est très rare que le pape François réponde aux journalistes à l’aller de l’un de ses voyages, se limitant à quelque commentaire sur le pays qu’il s’apprête à visiter. Mais cette fois-ci les événements de ces dernières 24 heures étaient tels qu’il a accepté de répondre aux deux questions formulées par le porte-parole du Saint-Siège, le père Federico Lombardi.
Au peuple arménien
Le Saint-Père est arrivé à Erevan, la capitale arménienne, vers 13 h, accueilli par le Nonce apostolique, le président arménien Serge Sarkissian et le Catholicos Karekin II, patriarche de l’Église apostolique arménienne, et autres grands prélats des Églises apostolique et catholique. Première visite : Etchmiadzine, le “Saint-Siège” de l’Église apostolique arménienne, à une vingtaine de kilomètres de la capitale où – fait exceptionnel – il logera pendant ces trois jours.
Après une visite de prière à la cathédrale avec le catholicos, le Saint-Père a rencontré les autorités civiles et diplomatiques au palais résidentiel de Erevan où il a invité “les responsables du sort des nations” à mettre en œuvre “avec courage et sur-le-champ” des initiatives visant à mettre fin aux souffrances de ceux qui subissent la guerre et la persécution, à travers le monde.
Tirer les leçons du passé
Le Pape a rendu hommage à tout le peuple arménien, et à sa fidélité à “la Croix”, voire dans les moments “les plus tragiques de son Histoire”, prononçant le mot de “génocide” que beaucoup pensaient qu’il n’aurait pas répété. Le mot “génocide” n’était en effet pas prévu dans son discours, il l’a ajouté spontanément, de manière imprévisible, au risque de froisser la Turquie pour la deuxième fois. Il avait commencé sa phrase en utilisant d’abord l’appellation Metz Yeghérn, le “Grand Mal”, pour évoquer cette tragédie, “ce génocide”, a-t-il poursuivi explicitement, “qui a inauguré malheureusement la triste liste des effroyables catastrophes du siècle dernier, rendues possibles par d’aberrantes motivations raciales, idéologiques ou religieuses, qui ont enténébré l’esprit des bourreaux au point qu’ils se sont fixé le dessein d’anéantir des peuples entiers”.
Le Pape a exhorté les nations à tirer les leçons d’un passé marqué par “la haine, les préjugés et le désir effréné de domination”, dénonçant “les projets de guerre, d’abus et de persécution violente” de ceux qui instrumentalisent le nom de Dieu, et insistant sur le sort des chrétiens qui subissent encore aujourd’hui tant de discrimination et persécution, “voire plus qu’au temps des premiers martyrs”, a-t-il souligné, “pour le seul fait de professeur leur foi”.
“L’Église catholique désire collaborer activement avec tous ceux qui ont à cœur les destinées de la civilisation et le respect des droits de la personne humaine, pour faire prévaloir dans le monde les valeurs spirituelles, en démasquant ceux qui en souillent le sens et la beauté”, a-t-il assuré devant les autorités arméniennes. Mais pour cela, a-t-il ajouté, “il est d’importance vitale que tous ceux qui déclarent leur foi en Dieu unissent leurs forces pour isoler quiconque se sert de la religion pour mener des projets de guerre, d’abus et de persécution violente, en instrumentalisant et manipulant le Saint Nom de Dieu”.