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Même si les étymologistes ne semblent pas tous d'accord sur l'origine du mot « flirt », on aime à penser que ce terme n'est pas sans rapport avec la vieille expression : « Je t'aime un peu, beaucoup, à la folie, pas du tout ! » Quand on a cinq ou six ans, on effeuille la marguerite pour jouer, comme on récite une comptine, avec de grands éclats de rire et des clins d'œil malicieux. Dix ans plus tard, il en va tout autrement et, marguerite ou pas, la litanie des « je t'aime » n'a plus rien d'anodin. Le flirt est-il un mal ou un passage obligé ?
Les mots sont piégés parce qu'ils recouvrent tout et n'importe quoi. Et au-delà des mots, la notion de flirt recouvre tout un éventail de relations pseudo-amoureuses : on joue à s'aimer, on fait comme si on s'aimait ou on croit s'aimer pour de bon, mais sans prendre le temps d'affermir cet amour, de le faire mûrir ; on va trop vite, trop loin, trop tôt. Certains draguent pour tester leur pouvoir de séduction ou pour exercer une domination. D'autres se laissent draguer par soif d'être aimé(e) ou par peur de passer pour une gourde, un « boudin » incapable de plaire. Certains flirts restent platoniques, d'autres aboutissent tôt ou tard à une relation sexuelle. Mais tous ont en commun de singer l'amour, parfois inconsciemment, ou de le vivre comme un jeu, pas comme un don qui engage.
A-t-on le droit de jouer avec le cœur de l'autre ?
Comment distinguer le flirt de l'amour vrai ? Dans certains cas, c'est clair : le flirt est pour les deux partenaires une sorte de passe-temps, un amusement, rien de plus. Mais bien souvent, naissent des sentiments plus ou moins amoureux. Jérôme s'amuse à collectionner les conquêtes. Il est très fier de s'afficher avec une jolie fille. Il sait les faire fondre en usant de son charme et de sa gentillesse. « Je ne fais rien de mal », dit-il. Est-il certain que l'une ou l'autre de ses conquêtes ne s'est pas crue aimée pour de bon et n'a pas été blessée jusqu'au fond du cœur en découvrant que ce n'était qu'un jeu ? A-t-on le droit de jouer avec le cœur de l'autre ? Les dégâts sont toujours graves et on ne peut pas se dédouaner en accusant sa victime de naïveté.
A-t-on le droit de singer l'amour, pour s'amuser ? Certains jeunes, sincèrement désireux de ne pas vivre d'union charnelle avant le mariage, pensent que, du moment qu'on ne couche pas ensemble, avoir un petit copain, draguer par ci par là, cela n'a rien de répréhensible. Mais, à y bien réfléchir, est-ce que ce type de relations ne rend pas incapable de goûter les richesses de l'amitié entre garçons et filles (ce qui est tout autre chose que le flirt) ? Est-ce que le seul fait de « jouer à s'aimer », même si on ne va pas jusqu'à l'union sexuelle, n'abîme pas le cœur ? Enfin, est-ce qu'une certaine familiarité physique ne met pas sérieusement en péril la décision de ne pas avoir de relation sexuelle ?
Le flirt est un mensonge. Cela n'a rien d'étonnant, car l'ennemi de l'Amour, c'est le Menteur. Comme il sait que les jeunes ont soif d'amour, il les détourne de l'amour vrai en les piégeant avec des apparences d'amour, un amour-mensonge. Et c'est très habile de sa part, parce qu'à force de faire semblant, les jeunes finissent par ne plus croire à l'amour vrai et pensent qu'ils ne sont pas capables de vivre le grand amour. C'est un cercle vicieux : on devient désabusé, découragé ou cynique parce qu'on a fait semblant d'aimer et on continue à se contenter d'amours factices parce qu'on ne s'estime plus capable d'amour vrai. Encourager les jeunes à flirter, c'est les mépriser. C'est faire comme s'ils n'étaient pas capables d'aimer en vérité. Les jeunes ont soif d'aimer « en grand » : aidons-les à découvrir qu'ils en sont tous capables. Aujourd'hui, comme hier, ne badinons pas avec l'amour.
Christine Ponsard