En Jordanie, l’événement est attendu depuis quinze ans. Le 10 mai 2009, à l’occasion de son pèlerinage en Terre sainte, le pape Benoît XVI et le roi Abdallah II posaient la première de l’église du Baptême du Seigneur à Al-Maghtas, en Jordanie. Ce vendredi 10 janvier, cette église va enfin être consacrée et inaugurée, à 11h (heure locale). Un événement unique pour les catholiques du Patriarcat latin de Jérusalem, dont le territoire s’étend sur la Terre sainte au sens large, avec la Jordanie et Chypre.
Seul l’évangéliste Jean mentionne un lieu précis pour le ministère de Jean-Baptiste : Béthanie "de l’autre côté du Jourdain" (Jn 1, 28) pour la différencier de l’autre Béthanie, à côté de Jérusalem, où Jésus ressuscite Lazare (cf. Jn 11). Matthieu, Marc et Luc parlent du "désert", du "désert de Judée" et de la "région du Jourdain". La tradition a donc situé le lieu de prédication du Précurseur, et du baptême du Seigneur, côté est du fleuve qui est aujourd’hui la frontière entre Israël et Palestine d’un côté et Jordanie de l’autre. Et, plus exactement, à quelques encablures de Jéricho, une localisation appelée Al-Maghtas, "immersion" en arabe, mais infondée au point de vue historique puisqu’il semblerait que le cousin du Christ baptisait plus au nord.
Un lieu de pèlerinages pontificaux
C’est là que le patriarcat latin a voulu faire construire une église, un immense édifice de plus de mille places, l’un des plus grands du Proche-Orient, pour en faire un sanctuaire important comme le sont les basiliques de l’Annonciation à Nazareth, de la Nativité à Bethléem et du Saint-Sépulcre à Jérusalem. Aujourd’hui, les pèlerins sont nettement moins nombreux de ce côté-ci du Jourdain que du côté ouest, sous occupation israélienne. Aménagé en 2011, le site de Qasr-el-Yahoud a l’avantage de permettre aux groupes de ne pas traverser une frontière entre les différents lieux saints.
Cependant, depuis vingt-cinq ans, tous les deuxièmes vendredis de janvier, un grand pèlerinage est organisé jusqu’à Al-Maghtas. À proximité de la fête liturgique du Baptême du Seigneur, qui clôture le temps de Noël, les fidèles viennent prier et renouveler les promesses de leur propre baptême. Les papes eux-mêmes sont venus comme pèlerins, Jean Paul II en 2000, Benoît XVI en 2009, donc et François en 2014. Si le Saint-Père ne vient pas pour la consécration de l’église, il a envoyé un légat pour "rehausser cette solennité" en la personne du cardinal Secrétaire d’État Pietro Parolin, numéro deux du Saint-Siège.
L’investissement des autorités jordaniennes
Le 30 décembre, le Pape lui demandait dans sa lettre de légation d’encourager "tous les fidèles présents à imiter le Christ avec encore plus de diligence : il est en effet nécessaire qu'avec une force et un zèle nouveaux, ils manifestent un amour particulier pour l'Église du Christ et pour l'Évangile et qu'ils brûlent des vertus d’une foi solide, d’une espérance vivante et d’amour pour leur prochain." Le successeur de Pierre a également un mot pour les autorités civiles. Effectivement, la monarchie jordanienne a fait don du terrain sur lequel a été construit le nouveau sanctuaire. Quant à l’État, il promeut et facilite le tourisme et les pèlerinages de ce côté-ci du fleuve, aidé par l’Unesco qui a inscrit le site sur la liste du Patrimoine mondial en 2015.
Le nouvel édifice a d’ailleurs été construit avec soin et souci du beau. L’église est en pierre de Tafouhi, une pierre blonde de la région d’Hébron, en Palestine. Les murs sont ornés de grands vitraux fabriqués au Liban voisin. Les artistes qui les ont dessinés se sont inspirés de ceux, parmi les plus beaux du style gothique, de la cathédrale de Chartres. Le sanctuaire a été confié aux frères et aux moniales du Verbe incarne, qui ont la charge d’entretenir les lieux mais surtout de l’animer spirituellement et d’accueillir les pèlerins. En cette année 2025, l’église du Baptême du Seigneur est l’une des destinations possibles du Jubilé de l’Espérance et ceux qui y passeront la porte sainte recevront l’indulgence plénière prévue.
