Prévoir l’avenir est impossible et nul ne peut connaître quelles surprises et événements inattendus livrera l’année 2025. Néanmoins, plusieurs défis se présentent d’ores et déjà à la diplomatie vaticane, pour une année 2025 qui sera chargée.
Un jubilé pour l’espérance
Le jubilé ordinaire est d’abord un moment de foi, de conversion personnelle et d’approfondissement intérieur. Mais il est aussi un moment politique et diplomatique fort. Quand Léon XIII ouvre la porte sainte pour le jubilé de 1900, il le fait dans une basilique Saint-Pierre qui n’est pas encore dans l’État reconnu du Vatican, les rapports politiques avec la monarchie italienne étant très tendus depuis l’invasion des États pontificaux (1870). En 1925, Pie XI célèbre le jubilé un an après les accords du Latran, qui ont permis de résoudre la crise issue de l’unification italienne, même si les relations avec le gouvernement de Mussolini sont toujours tendues. En 1950, Pie XII veut regarder vers l’avenir, parler de la paix après les désastres du conflit mondial, tout en évitant les pièges de la guerre froide qui débute.
En 2000, c’est un jubilé ouvert vers le nouveau millénaire que Jean Paul II pilote, avec pour mission pour l’Église de se préparer au nouveau monde. Vingt-cinq ans plus tard, beaucoup de choses ont changé dans l’Église et dans le monde. Face aux guerres qui perdurent, à la situation de "guerre mondiale par morceaux" que François a souvent évoquée, le jubilé se veut une réponse spirituelle aux maux temporels qui frappent un grand nombre de pays.
Proche-Orient : nuages et espoirs
Le Proche-Orient n’en finit pas de susciter les peurs et les craintes d’un embrasement du monde. Le conflit ouvert en octobre 2023 est très loin d’être résorbé. Outre la fragilité du cessez-le-feu, les causes du conflit ne sont nullement traitées. Certes Hezbollah et Hamas ont été durement atteints par Israël, mais rien n’est réglé pour autant par des adversaires qui demeurent séparés par des murs de haine et d’incompréhension. Depuis des décennies, la diplomatie pontificale tente d’apporter du baume sur les plaies, sans qu’une paix durable ne puisse être trouvée, et en constatant, impuissante, la baisse dramatique du nombre de chrétiens.
Les doutes, nombreux, demeurent sur la Syrie. Le nouveau pouvoir est-il prêt à la conciliation avec l’ensemble des communautés ou bien comme nous devant un changement de dictature par une autre ? Forgés dans l’esprit islamiste, les nouveaux maîtres de Damas vont-ils transformer la Syrie en nouvel Afghanistan ? Que va devenir la communauté bimillénaire des chrétiens syriens, qui est chez elle à Damas et à Alep, dans ces villes qui ont vu la conversion de Paul et le travail de nombreux pères et théologiens durant les premiers siècles du christianisme ? Là aussi, les défis sont immenses pour une diplomatie pontificale qui n’a pour armes que les mots et que la parole comme action. Le dialogue, certes est nécessaire, mais ne risque-t-il pas l’impuissance face aux armes et aux canons ?
Côte d’Ivoire : vers l’embrasement ?
La Côte d’Ivoire peut-elle éviter la guerre civile ? La question est posée dans cet État qui aura à affronter une élection présidentielle de tous les dangers en octobre 2025. En 2010, la présidentielle s’était soldée par une guerre civile qui avait opposé les partisans de Laurent Gbagbo et d’Alassane Ouattara. Ce dernier avait finalement pris le pouvoir, avec le soutien de la communauté internationale. Bien que réélu sans heurt en 2015 et 2020, il est aujourd'hui âgé de 83 ans et sans dauphin désigné. S’il n’a pas encore fait part de ses intentions de candidature, son rival Laurent Gbagbo est déterminé à prendre sa revanche.
Mais depuis 2010, beaucoup de choses ont changé. L’islamisme est plus virulent, avec des pays frontaliers de la Côte d’Ivoire qui ont connu des renversements politiques et des attaques régulières. Dans le golfe de Guinée, les narcotrafiquants font désormais la loi, accroissent la corruption et contrôlent des réseaux de plus en plus violents. Prise en tenaille entre l’islamisme et la drogue, fracturée entre de multiples ethnies, sans réelle unité nationale, la Côte d’Ivoire peut-elle tenir une présidentielle apaisée ou va-t-elle basculer dans un nouveau cycle de violence ? Autre changement majeur depuis 2010 : la présence de l’armée française a considérablement fondu. Par manque d’hommes, il ne sera plus possible d’organiser le rapatriement des expatriés français, ni de séparer les belligérants. Tous ces éléments font craindre le pire. Le clergé et les évêques ivoiriens seront en première ligne d’un pays qui inquiète.
Autant de points chauds que la diplomatie vaticane devra surveiller et où elle est déjà engagée. Sous la bannière de l’espérance, qui est celle de ce grand jubilé.