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Les catholiques et la famille, du XIXe à nos jours

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Olivier Landron - publié le 05/01/25
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Dans "La Famille catholique du XIXe à aujourd’hui" (Cerf), l’historien Olivier Landron s’appuie sur des sources d’archives variées, non exploitées jusque-là, pour montrer comment les grandes évolutions qui ont marqué la famille ont rompu avec l’enseignement de l’Église sur la vie et le mariage, mais aussi divisé les catholiques.

Dès l’origine, l’Église a marqué un grand intérêt pour la famille, héritière en cela du judaïsme. La question familiale a toujours revêtu une dimension politique. C’est la raison pour laquelle les catholiques ont réfléchi au thème de la famille en relations étroites avec la Cité.

Le mariage, longtemps parent pauvre de l’action pastorale

Dans le monde catholique, le mariage, défini comme un sacrement, a servi de cadre au développement de la famille. Dès la fin du XIXe siècle, le catholicisme français s’est montré très dynamique pour promouvoir la famille. Dans son esprit, cette défense de l’univers familial était très liée à l’effondrement démographique de la France qui avait connu une accélération dès les années 1830. Pendant très longtemps, la préparation au mariage a été négligée dans l’Église catholique en France et au fond, elle n’a fait l’objet d’une attention sérieuse qu’au XXe siècle. En 1902, l’abbé Viollet, à travers les Œuvres du Moulin vert, est venu en aide matériellement aux familles. En 1918, en donnant naissance à l’Association du mariage chrétien (AMC), il a promu le mariage, estimant qu’il était trop souvent le parent pauvre de l’action pastorale.

Dans l’Entre-deux-guerres, en fondant les Équipes Notre-Dame, l’abbé Henri Caffarel a mis l’accent sur la dimension spirituelle du couple, alors que jusque-là, il était limité à la procréation et à l’éducation des enfants, selon la définition que la théologie thomiste lui avait donnée. Dans les années 1960 et à la suite du concile Vatican II, le mariage a pris une autre dimension puisque l’alliance entre l’homme et la femme a davantage été comprise comme un don mutuel.

Contraception, avortement : les catholiques divisés

Désormais, pour nombre de théologiens moralistes, la relation au sein du couple devenait un élément central, même si la procréation et l’éducation restaient l’une de ses raisons d’être. Dans la seconde partie des années soixante, la loi Neuwirth (1967), autorisant la pilule contraceptive, et la publication de l’encyclique Humanæ Vitæ (1968) ont créé une fracture entre l’Église catholique et une partie de la société française, le texte de Paul VI étant mal reçu en Occident. Cette encyclique a parfois été considérée comme liberticide en raison de son refus de la pilule contraceptive. Humanæ Vitæ a aussi divisé les catholiques. Tout comme la liturgie a profondément divisé le catholicisme français à partir des années 1970, il en a été de même pour la famille.

Concernant l’avortement et son autorisation par la loi Veil en 1975, voulue par Valéry Giscard d’Estaing pour que disait-il la France soit en adéquation avec la modernité, les catholiques se sont aussi divisés. L’IVG (Interruption volontaire de grossesse) a fait l’objet de tensions entre Rome et une partie de l’épiscopat français qui a été assez timorée lorsqu’il s’est agi de la condamner. Les années 1970 et 1980 ont été marquées par une explosion du nombre de divorces et donc par une fragilisation des couples. L’Église catholique a cherché des remèdes pour les consolider davantage en réformant la préparation au mariage. Mais sa mise en œuvre s’est révélée difficile.

L’Église catholique en décalage sur la société

Au début des années 2010, le projet de loi sur le Mariage pour tous a opéré des dissensions au sein des évêques français, ainsi que chez les fidèles. Les catholiques sensibles à la démarche de la Manif pour tous n’ont pas compris que peu de membres du clergé acceptent de participer aux manifestations qui dénonçaient le mariage homosexuel. Le clivage entre les partisans et les opposants au Mariage pour tous était tout aussi religieux que politique. Les adversaires des unions homosexuelles étaient des catholiques conservateurs qui votaient clairement à droite et qui appartenaient à la Génération Jean Paul II. Ils étaient aussi très opposés à la théorie du genre. En 2022, la loi ouvrant la Procréation médicalement assistée (PMA) à toutes les femmes, y compris célibataires ou lesbiennes, a également été vécue comme un camouflet par les catholiques classiques et conservateurs. Elle concluait, selon eux, une longue série de défaites qui avait commencé en 1967 avec la loi Neuwirth autorisant la contraception.

Soutenues par la gauche et une partie du centre, ces lois qui se voulaient en accord avec l’évolution des mœurs sont apparues aux yeux des catholiques identitaires comme un ensemble d’échecs avec une forte connotation politique, marquant un net recul de l’Église catholique sur la société française. Ces nouvelles législations, portant sur des thématiques allant de la contraception à la PMA en passant sur l’avortement, ont profondément divisé les catholiques français. Elles ont également instauré des tensions palpables sous les pontificats de Paul VI, Jean-Paul II et Benoît XVI, entre Rome et l’épiscopat français, dont une grande partie est restée silencieuse, peu encline à intervenir dans le champ politique, par crainte d’être assimilée aux partis de la droite nationale.

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