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Qui aurait cru que nous verrions un jour la Ve République dans l’état où elle se trouve aujourd’hui ? La France avait la chance de disposer d’un socle constitutionnel solide, monolithique, lisible, qui servait le crédit du pays. Elle connaissait parfois des volte-face brutaux, comme en 1981 ou en 1995, mais pas la confusion. Aujourd’hui règne un profond brouillard. Un récent sondage réalisé dans le cadre du baromètre politique d’Odoxa révèle que 56% des Français ne veulent plus de cet avantage comparatif qu’étaient nos institutions dans un monde devenu plus dangereux et incertain que jamais. Les Français, nous dit Odoxa, veulent mettre fin à la Ve République pour instituer une VIe République. Voici qui en dit long sur l’image que le pays a de lui-même : les sondés ne se sont pas aperçus, semble-t-il, qu’il ne peut plus être question de mettre fin à la Ve République, tout simplement parce qu’elle est déjà finie. Il s’agit plutôt, si l’on cherche le bien commun pour nos enfants, de la retrouver. Comment faire ?
Des institutions savamment déconstruites
D’abord, il nous faut regarder la réalité comme elle est. Quand nous voyons les risettes des Premiers ministres successifs sur le perron de l’hôtel de Matignon (quatre Premier ministres en moins d’un an, des périodes interminables d’expéditions des affaires courantes), nous voyons d’évidence que nous ne sommes plus sous la Ve République. Nous pensons à ces photos en noir et blanc des présidents du Conseil du temps où la France différait les arbitrages urgents et s’enfonçait dans une impuissance honteuse face à la montée des totalitarismes (ce qui fut le destin de la IIIe République) ou aux défis de le décolonisation (ce fut celui de la IVe). En France, l’instabilité s’est toujours mal finie.
Depuis vingt ans, nos institutions ont été savamment déconstruites par trois présidents successifs : le séducteur, le démagogue et le liquidateur.
Depuis vingt ans, nos institutions ont été savamment déconstruites par trois présidents successifs : le séducteur, le démagogue et le liquidateur. Le premier a fait adopter les réformes constitutionnelles mortifères limitant la liberté des électeurs, la marge des élus et la capacité du gouvernement. Le deuxième a dévalué la fonction politique par une multitude de réformes cédant à l’air du temps. Le troisième a discrédité les institutions en cherchant systématiquement à les contourner. Nous avons connu la désuétude du référendum, puis celle des ordonnances. La dissolution de 2024 annonce la désuétude du droit de dissolution. Emmanuel Macron, jamais avare de paroles malencontreuses, vient de déclarer qu’il ne dissoudrait plus. Le gouvernement de François Bayrou s’apprête à annoncer le renoncement à l’article 49.3 de la Constitution, procédure de responsabilité si nécessaire par temps de brouillard.
Rendre la parole au peuple
La Ve République est bel et bien morte, et au pire moment, dans le temps on l’on avait le plus besoin d’elle. Emmanuel Macron aura réussi à faire de la fonction présidentielle quelque chose qui s’approche de ce qu’elle était sous la IIIe République. On nous avait annoncé un Clemenceau pour le XXIe siècle : Jupiter aura réussi la prouesse de nous fournir un Albert Lebrun. Il ne peut même plus nommer le Premier ministre qu’il veut, comme le dit l’article 8 de la Constitution : il se fait tordre le bras par un Béarnais à béret. Partout nous assistons à une capitulation de l’esprit.
Nous devons nous rappeler que ce n’est pas une réforme des textes, mais bien la capitulation politique de Mac Mahon face aux insoumis de son temps qui a entraîné la désuétude du droit de dissolution et la faiblesse mortelle de la IIIe République. La République meurt toujours par une capitulation de l’esprit. Il ne s’agit donc pas de finir la Ve République comme le dit le sondage, mais bien de la retrouver avant qu’il soit trop tard. Cela ne se fera qu’en rendant la parole au peuple. Nous avons un besoin urgent de voter, non pour créer la confusion, mais pour en sortir. Cela s’appelle l’alternance. En politique, qui commence par le pourrissement finit par l’explosion.