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C’est reparti, les agriculteurs vont nous empêcher de circuler, une "manif" de plus ! Leurs revendications sont connues : pas d’importation et un certain protectionnisme, la possibilité de cultiver selon les impératifs de production et non en fonction des normes drastiques imposées par l’Europe et surimposées par la France, l’allègement administratif et la limite des contrôles, car bientôt il y aura plus de fonctionnaires en chambre pour imposer des normes et contrôler que d’agriculteurs portant des bottes.
Les arguments de la révolte agricole sont clairs mais la vraie question doit se poser du côté du distributeur, tout en se penchant sur nos souhaits de consommateurs. Le distributeur nous assène sans cesse le slogan "moins cher", ce qui veut dire qu’il doit lui aussi acheter au moins cher. Il impose un rapport prix-qualité à l’industriel transformateur ou au producteur lui-même. Dans le contexte français, cela rend difficile de produire bien tout en étant performant et la concurrence étrangère est vive et pas aussi loyale qu’on pourrait l’imaginer.
Les tomates espagnoles
Prenons deux exemples. Les tomates de Bretagne sont cultivées dans des serres chauffées et sont distribuées partout en France. Les écologistes bien-pensants accusent les maraîchers de produire "industriel" en utilisant des ressources énergétiques carbonées. Ils oublient de dénoncer les mêmes tomates espagnoles qui sont produites de façon aussi industrielle, arrosées grâce à des puits artésiens dans la plaine d’Almeria et cultivées par des travailleurs souvent sans papiers et toujours mal payés dans un système qui pratique le dumping social. Elles traversent ensuite toute l’Espagne en camion pour approvisionner l’Europe du nord. Quel est le processus agricole le plus vertueux ? Le modèle breton évidemment, mais l’on achète espagnol en fermant les yeux : c’est moins cher.
Le même raisonnement peut se faire avec de nombreux produits tel le porc. En France il est "sans" : pas d’hormones, pas de traitements et un suivi vétérinaire drastique, limitation de la taille des élevages, investissements pour le bien-être animal, etc. Il suffit de passer une frontière, en Allemagne, Pays-Bas ou Espagne pour trouver un tout autre modèle plus laxiste dans des élevages géants… et moins chers.
Le choix des distributeurs
S’il y a un marché et des perspectives de gains, les distributeurs se fourniront au meilleur prix et les poulets brésiliens, le bœuf argentin envahiront les étals des grandes et moyennes surfaces, sans la moindre mauvaise conscience. Les consommateurs ne verront rien et les agriculteurs ont raison : admettre la malbouffe cause la disparition des fermes de France. L’information du consommateur devient alors la clé, la solution.
Nous sommes tous responsables de notre consommation et le lien avec la terre productive est à retrouver comme les paraboles nous invitent à le faire.
Quand on nous pose la question du choix, le consommateur que nous sommes tous répond, la main sur le cœur qu’il préfère les produits issus de nos élevages ou de nos terres. Quand il pousse son caddy à la vitesse d’un mètre par seconde, il choisit souvent le prix le plus bas. Paradoxe ou mauvaise communication ? Agriculteurs, paysans de France, votre action serait plus efficace si vous étiez des pédagogues plutôt que des bloqueurs de routes, votre action serait plus utile si vous sensibilisiez les enseignants, les restaurateurs, les responsables de restauration hors domicile, les nutritionnistes, les diététiciens, bref, tous les métiers qui touchent la nourriture et aussi nous-mêmes, les consommateurs lambda.
Le lien avec la terre productive
Plus concrètement, que devons-nous faire, nous chrétiens et consommateurs comme tous ? Une idée : rencontrer les agriculteurs, essayer de comprendre leurs différents métiers et pourquoi ils sont attachés à cette vieille terre nourricière qui a suffi à nos aïeux. Nous achèterons français et nous nous en porterons mieux. Il faut cesser d’acheter les yeux fermés et parfois préférer payer un peu plus cher avec la satisfaction d’acheter juste.
Nous sommes tous responsables de notre consommation et le lien avec la terre productive est à retrouver comme les paraboles nous invitent à le faire : l’Évangile est peuplée de semeurs, moissonneurs et autres vignerons… sans oublier de porter un regard vers ceux qui n’ont pas les moyens d’acheter une nourriture saine et variée. Pour eux, prions : "Donne-nous le pain de chaque jour…"