Au début de ses souvenirs d’enfance, Thérèse affirme avec force : « Le propre de l'amour [est] de s'abaisser » (Manuscrit - Ms A, 2). Plus tard dans le Manuscrit C, elle écrit en lettres de feu : « Oui, pour que l’Amour soit pleinement satisfait, il faut qu’il s’abaisse, qu’il s’abaisse jusqu’au néant et qu’il transforme en feu ce néant » (Ms C, 3v). Cet abaissement, Thérèse le contemple dans trois grands mystères : l’Incarnation, la Passion et l’Eucharistie. Cela apparaît clairement dans la Prière pour demander l’humilité, où elle pose son regard sur « Jésus doux et humble de cœur » et le contemple dans son triple abaissement :
« Ô Puissant Monarque des Cieux, oui mon âme trouve le repos en vous voyant, revêtu de la forme et de la nature d’esclave [mystère de l’Incarnation, Ph 2,7], vous abaisser jusqu’à laver les pieds de vos apôtres [Début du mystère de la Passion, Jn 13,15-17]. […] Maintenant c’est dans l’Hostie que je vous vois mettre le comble à vos anéantissements. […] Ô mon bien-Aimé, sous le voile de la blanche Hostie que vous m’apparaissez doux et humble de cœur ! Pour m’enseigner l’humilité, vous ne pouvez vous abaisser davantage [mystère de l’Eucharistie] » (Prières - Pri 20).
Rester petite
Le fruit de cette contemplation de l’abaissement du Verbe est immédiat et pointe dès le début de la prière : « Je veux m’abaisser humblement… » Thérèse chante à plusieurs reprises son désir de s’abaisser pour imiter le Christ Jésus. Cela est magnifiquement résumé dans la quatrième strophe de la poésie 31, Le Cantique de Sœur Marie de la Trinité et de la Sainte Face, qu’elle compose en mai 1896 :
« Mon Bien-Aimé, ton exemple m’invite
À m’abaisser, à mépriser l'honneur.
Pour te ravir, je veux rester petite
En m'oubliant, je charmerai ton cœur » (Poésies - Pn 31,4)
Nous voyons ici apparaître la volonté de « rester petite ». Souvenons-nous qu’en parlant de sainteté, elle avait écrit : « Il faut que je reste petite, que je le devienne de plus en plus » (Ms C, 3).
La petitesse de l’enfant Jésus
Cette petitesse, c’est celle de l’Enfant Jésus dans son Incarnation : « En cette nuit où Il se fit faible et souffrant pour mon amour, Il me rendit forte et courageuse, Il me revêtit de ses armes » (Ms A, 44v). Évoquant cette nuit de Noël, dans une lettre au Père Roulland, elle indique : « Jésus qui se faisait enfant par amour pour moi daigna me faire sortir des langes et des imperfections de l’enfance » (Lettres de Thérèse - Lt, 201). Cela nous fait comprendre que la « petitesse » n’est ni de l’infantilisme, ni de la régression, mais l’imitation de l’abaissement du Christ qui se fait petit. Dans Les Anges à la Crèche, elle met ses vers dans la bouche de l’Ange de l’Eucharistie :
« Caché dans l’Eucharistie
Je vois le Dieu Tout-Puissant
Je vois l’Auteur de la vie
Bien plus petit qu’un enfant ! » (Récréations pieuses - Rp 2,5).
C’est cette « petitesse » là qu’elle veut imiter.
« Petite Thérèse »
En août ou septembre 1897, d’une main tremblante, avec un pauvre crayon de bois, elle signe sa dernière poésie, Pourquoi je t’aime, ô Marie !, avec ses simples mots : « La petite Thérèse ». Et quand une religieuse lui demandera comment il faudra l’appeler au ciel, elle répondra simplement : « Vous m’appellerez Petite Thérèse » (Œuvres Complètes, p. 1191). À son école, devenons petits pour imiter le triple abaissement du Christ Jésus.
Pratique :