Il y a vingt-cinq ans, le 13 juin 1999, Jean Paul II a rendu un vibrant hommage à 108 Polonais tués en haine de la foi catholique pendant la Seconde Guerre mondiale en les béatifiant. Un moment de foi, de recueillement et d’émotion aussi. Parmi ces 108 témoins qui ont fait le sacrifice suprême de leur vie, on compte trois évêques, 52 prêtres diocésains, 33 religieux, trois séminaristes, huit religieuses et neuf laïcs. La proportion de consacrés est très forte car les nazis s’acharnent particulièrement sur les religieux polonais pendant la guerre. En effet, leur projet est de détruire totalement la nation polonaise, et pour tenter de mener à bien cette extermination ils s’attaquent en premier lieu à la foi catholique, qui est l’âme et l’identité même de la Pologne.
Victimes de la barbarie nazie
Les derniers instants du père Kubista, l’un des martyrs, sont particulièrement terrifiants et témoignent de la bestialité qui se cache parfois dans l’être humain. Arrêté en février 1940, ce prêtre est interné dans un camp de concentration. L’épuisement, dû à la faim, au travail forcé et à l’insalubrité du camp, a très vite raison de sa santé. Atteint d’une pneumonie, il ne peut bientôt même plus marcher seul, ses camarades sont obligés de le soutenir. Un des kapos (surveillant) du camp s’acharne sur lui et l’oblige à dormir plusieurs nuits de suite par terre dans les toilettes. Bravant tous les interdits, un camarade prêtre lui apporte une couverture et reçoit sa dernière confession. Le 26 avril 1940, alors que le père Kubista, incapable de se lever, est couché sur le sol du baraquement, le kapo survient et saute à pieds joints sur la gorge et le buste du prêtre, broyant sa cage thoracique.
En 1943, les SS allemands montent une opération de ratissage et enferment un millier d’otages dans l’église d’un village. Deux prêtres, le père Leszczewski et le père Kaszyra sont également arrêtés. Ils réussissent à négocier la libération de plusieurs pères de famille mais refusent la proposition de l’officier allemand de sortir eux aussi. Ils restent ainsi avec leurs ouailles, les confessant et les réconfortant. Au bout de quelques jours, les otages sont tous fusillés ou brûlés dans des granges. Un autre exemple, celui du père Joseph Kowalski, illustre parfaitement l’arbitraire et l’iniquité des mises à mort dans les camps de concentration ainsi que l’acharnement contre la foi catholique. Prisonnier à Auschwitz en 1941, ce prêtre salésien est torturé puis assassiné un an après son arrestation pour avoir refusé de piétiner son chapelet.
Le courage des femmes
Marianna Biernacka, agricultrice, fait partie de ces nombreuses personnes qui acceptent de sacrifier leur vie pour protéger les plus fragiles. En 1943, son fils et sa belle-fille sont arrêtés par des soldats allemands de la Wehrmacht, en représailles pour la mort d’autres soldats tués dans le village voisin. Le couple a déjà une petite fille de deux ans et Anna, la jeune femme, est enceinte. Marianna propose aux Allemands de prendre la place de sa belle-fille, ce qu’ils acceptent. Elle est abattue après deux semaines d’emprisonnement.
Natalia Tulasiewicz, jeune femme de 39 ans, est internée en 1944 au camp de Ravensbrück pour avoir organisé des sessions de prière clandestines. Le jour du Vendredi saint 1945, elle monte sur un tabouret dans son baraquement et parle aux autres prisonniers de la Passion et de la Résurrection de Jésus. Immédiatement arrêtée, elle est gazée le jour de Pâques, rejoignant ainsi son Seigneur et s’associant de façon exceptionnelle à la rédemption du monde. Le musée de l’insurrection de Varsovie, consacré à la résistance polonaise de 1944, met à l’honneur ces 108 bienheureux. Le parcours muséal s’achève par une chapelle décorée d’une grande fresque qui représente chacun des martyrs. Leur culte est ainsi pleinement intégré à la mémoire nationale. Émouvant hommage du pays à ses héros catholiques.