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Blaise Pascal ou comment révéler Dieu en montrant l’homme

BLAISE PASCAL

Blaise Pascal.

Valdemar de Vaux - publié le 19/06/23
Les 400 ans de la naissance de Blaise Pascal sont l’occasion de relire ses textes les plus significatifs, en particulier dans les Pensées, parfois mal comprises. C’est l’objectif du livre de Jean de Saint-Cheron, "Voilà ce que c’est que la foi" publié ces jours-ci. L’occasion de comprendre comment Pascal amène à Dieu ceux qui l’ignorent.

Depuis la publication, en octobre 2021, du livre Dieu, la science, les preuves de Michel-Yves Bolloré et Olivier Bonnassies, la question des rapports entre la science et la foi semble avoir repris de la vigueur. Le best-seller a ainsi donné lieu à plusieurs tribunes et même à des ouvrages ayant pour but de lui répondre, en particulier La Science, l’épreuve de Dieu ? du jésuite François Euvé. L’apologétique, souci de rendre compte de la rationalité de la foi, n’a pourtant pas attendu le XXIe siècle pour prospérer. Blaise Pascal, né le 19 juin 1623, il y a tout juste quatre-cents ans, s’y est attelé aussi, dans le livre fameux mais inachevé publié sous le titre des Pensées.

Montrer plus que démontrer

Le scientifique, théologien, philosophe, chrétien surtout, n’est pas toujours facile à comprendre, et c’est pour nous aider à goûter sa plume affutée que Jean de Saint-Cheron propose ce mois-ci un commentaire de longs passages de l’œuvre de l’Auvergnat dans Voilà ce que c’est que la foi*. Le titre n’est d’ailleurs pas anodin. Tiré d’une pensée qui cherche à dire que le cœur, siège en l’homme de la charité et donc de Dieu, a des certitudes qui n’ont rien à envier à celles de la raison. La formulation, apparemment lourde, exprime bien le mode d’expression du mathématicien quand il parle de la foi : il s’agit, non pas de démontrer par des preuves, mais de montrer en décortiquant ce qui fait le lot de la condition humaine et qui appelle à aimer le "Dieu de Jésus-Christ". Parce qu’il est bien question de ce registre, celui de la charité, comme l’exprimer Saint-Cheron : "Le cœur sens, c’est-à-dire voit, connaît avec certitude, mais sans pouvoir le démontrer selon ce que fait l’intelligence dans l’ordre de l’esprit."

Un exemple de ce goût pour la monstration ? L’affirmation, fruit de toute l’histoire philosophique, sous forme de constat : "Tous les hommes recherchent d’être heureux, jusqu’à ceux qui vont se pendre." Un brin provocateur, Blaise Pascal cherche ici à rappeler ce qui sous-tend l’existence de chacun, avant de faire un deuxième constat : "l’homme sans Dieu est dans l’ignorance de tout et dans un malheur inévitable". Le but de telles assertions n’est pas de réveiller notre raison démonstrative, mais de reconnaître humblement qu’il a mis les mots sur ce que l’homme vit, pour provoquer notre foi. Sans que la raison soit abandonnée pour autant : "la pensée, explique Pascal, grand scientifique, fait la grandeur de l’homme". 

Ses passages sur le divertissement ou la disproportion de l’homme, si connus que leur sens s’est affadi, sont du même acabit. Sans émettre de jugement, Pascal constate que chacun se divertit, c’est-à-dire se détourne de la pensée de la mort, pour continuer à vivre. Révélation, en creux, de Dieu qui détourne éternellement l’homme de la mort en la vainquant. En homme de science, il médite sur la grandeur en même temps que la petitesse de l’homme, capable de s’extraire du monde pour le comprendre, incapable de s’en défaire totalement. À la fois grand et petit, l’homme est ainsi pris dans le dessein du Créateur. 

Lire, et relire, l’auteur des Pensées, aidé s’il le faut de la faconde experte et vive de Jean de Saint-Cheron, pour acquérir la certitude du cœur. Lire, et relire, l’Auvergnat, pour contempler l’infini mystère de l’homme, auquel répond le mystère du Dieu infini. Lire, et relire, Blaise Pascal, pour prier avec lui Jésus, pierre angulaire de la révélation : "que je n’en sois jamais séparé".

Pratique

Jean de Saint-Cheron, Voilà ce qu’est la foi, Salvator, 2023, 216 p.
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