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Avec moins de 2% de chrétiens au Mali, la foi chrétienne est résiduelle dans ce pays imprégné d’islam et d’animisme. Le christianisme est arrivé au Sahel avec la colonisation, le cardinal Lavigerie envoyant les premiers missionnaires dans les années 1870. Une mission qui s’achève dans le sang avec l’exécution des prêtres envoyés. C’est en 1888 qu’est érigée la première paroisse, date retenue comme celle du début du christianisme dans le pays, ce qui donna lieu à une commémoration solennelle en 1988, pour le centenaire de ce baptême malien. Jean Paul II reste à ce jour le seul pape à avoir visité le pays, c’était en 1990, un autre temps compte-tenu des évolutions politiques et sociales récentes du Mali.
Une Église en marge et au centre
Compte tenu de sa faiblesse démographique, l’Église du Mali est en marge de la chrétienté. En créant cardinal en 2017 Mgr Jean Zerbo, archevêque de Bamako, François l’a placée au centre de Rome en faisant entrer l’un de ses fils dans le collège cardinalice. Âgé de 79 ans (il est né en 1943), il demeure toujours cardinal électeur et pourrait donc participer à son premier conclave si celui-ci advient avant l’atteinte de la limite d’âge (80 ans).
Sur place, la présence française n’a pas réglé les problèmes de violences et d’insécurité. La situation politique est des plus floue, avec une junte militaire qui a multiplié les coups d’État et qui refuse d’organiser de nouvelles élections. Les mouvements djihadistes sont toujours aussi présents, organisant attentats, vols et razzias. On recense ainsi 27 morts le 4 mars dernier lors d’une attaque contre une base militaire à la frontière avec le Burkina Faso. Le 24 avril, ce sont trois attaques menées dans le centre du pays et revendiquées par Al-Qaïda qui ont provoqué la mort de six soldats.
Si l’instabilité au Mali n’a que des conséquences limitées au Sahel, (...) elle risque fort en revanche de nuire fortement à une Afrique de l’Ouest déjà minée et qui n’aurait pas les moyens de résister à un nouvel embrasement.
Enfin il y a eu les massacres perpétrés fin mars à Boutcha, dont le bilan s’élève à plus de 300 morts. Des violences qui sont certes faites au nom de l’islam, mais qui recoupent les fractures ethniques d’un pays partagé entre nomades et sédentaires, avec des ethnies en conflit depuis de nombreuses décennies, où les Peuls, les Touaregs et les Bambaras sont en rivalité tant pour le contrôle de l’espace que pour le pouvoir politique. La situation des chrétiens au Mali évoluera en fonction de l’évolution de la sécurité générale du pays. Que l’ordre se maintienne et ils seront relativement épargnés, que la situation sécuritaire se dégrade et ils en subiront les drames, avec les risques de persécutions conduites par les islamistes.
Glissement de la tache djihadiste
Mais la situation va bien au-delà du Mali. C’est toute l’Afrique de l’Ouest qui est concernée par l’extension de la zone djihadiste. D’abord cantonnée à la zone "des trois frontières"(Mali, Niger, Burkina) dans laquelle se concentre un grand nombre d’attaques et d’attentats, cette zone géographique du djihadisme s’étire et s’étend aux pays limitrophes : le Ghana, la Côte d’Ivoire et la Guinée. Pays où la proportion de la population catholique est la plus nombreuse, la Côte d’Ivoire n’a toujours pas pansé les plaies de la guerre civile des années 2010. La violence reste sourde et est pour l’instant contenue par le gouvernement d’Alassane Ouattara (80 ans). L’infiltration islamiste est de plus en plus prégnante dans le pays, avec des attentats commis dans le nord du pays, là où la population musulmane est majoritaire.
Compte-tenu de l’évolution de la situation, il est tout à fait possible que les combats et les affrontements djihadistes qui se déroulent aujourd'hui au Mali et dans la zone des trois frontières se déplacent de plus en plus vers le sud et finissent par concerner l’ensemble de la Côte d’Ivoire. Or ce pays est la porte d’entrée de la France en Afrique. C’est là que réside le principal contingent et c’est par là que transitent les hommes et le matériel. Avec le départ du Mali, le contingent français en Côte d’Ivoire sera la dernière grande présence française dans la région, une présence toutefois nettement moins importante que ce qu’elle fut au début des années 2000. L’armée française ne dispose plus désormais des hommes et du matériel pour protéger les civils français qui seraient attaqués ou pour stabiliser un pays qui menace de s’effondrer. Si l’instabilité au Mali n’a que des conséquences limitées au Sahel, compte-tenu de l’état déjà très prégnant d’instabilité, elle risque fort en revanche de nuire fortement à une Afrique de l’Ouest déjà minée et qui n’aurait pas les moyens de résister à un nouvel embrasement. Pour les chrétiens comme pour les autres populations civiles, il est donc essentiel que le Mali tienne afin de ne pas être emporté dans ce funèbre jeu de domino.