« Je voudrais parcourir la Terre, prêcher ton nom, mais ô mon Bien-Aimé, une seule mission ne me suffirait pas, je voudrais en même temps annoncer l’Évangile dans les cinq parties du monde et jusque dans les îles les plus reculées… non seulement pendant quelques années. Je voudrais être missionnaire mais je voudrais l’avoir été depuis la création du monde et l’être jusqu’à la consommation des siècles. » Ces paroles sont celles que sainte Thérèse a adressé à Jésus dans ses prières. Si elle n’a pas voyagé de son vivant, sa lumière a rayonné par-delà les océans. « Les reliques de sainte Thérèse ont commencé à voyager en 1944 lorsqu’elle a été nommée patronne secondaire de la France, explique sœur Monique-Marie, responsable des voyages des reliques de sainte Thérèse de Lisieux. Après la victoire de 1945, un tour du reliquaire a été organisé à travers les diocèses de France afin de la remercier pour la paix ».
En 1997, année du centenaire de la mort de Thérèse de Lisieux, le recteur de l’époque décide d’organiser un voyage des reliques dans trois grandes villes de France : Paris, Lyon et Marseille. « À l’époque, beaucoup de gens craignaient que cet événement soit un flop. Des reliques au XXe siècle vous imaginez, s’amuse sœur Monique-Marie. Et pourtant le succès fut immédiat ! » Aujourd’hui, les reliques de sainte Thérèse de Lisieux et de ses parents, les époux Martin, ont traversé une soixantaine de pays sur les cinq continents.
En janvier 2017, elles ont sillonné le diocèse de Lille. « L’enjeu de la venue de ces reliques est triple : honorer les familles – les reliques de sainte Thérèse sont accompagnées de celles de ses parents, parler aux jeunes – elle est entrée au carmel à l’âge de 15 ans, et faire de nos paroisses des paroisses missionnaires, sainte Thérèse étant la patronne des missions », détaillait alors le père Xavier Behaegel responsable de la pastorale des jeunes à Lille et l’un des organisateurs de l’événement.
Et la venue de ces reliques dans le diocèse se préparait depuis longtemps. « Cela fait à peu près un an et demi que nous l’organisons », explique-t-il. Concrètement, le diocèse s’est inscrit sur une "liste d’attente" et ce sont ensuite les équipes du sanctuaire de Lisieux, en fonction des nombreuses demandes, qui ont attribué un créneau au diocèse de Lille. Jusqu’au 7 janvier, les reliques ont ainsi traversé les quatorze doyennés que compte le diocèse.
Plus prosaïquement, à la question de savoir comment les reliques sont transportées, le père Xavier Behaegel raconte avec amusement qu’elles voyagent « en Renault Trafic, avec deux conducteurs ». D’un point de vue logistique, il existe trois reliquaires de sainte Thérèse : le premier, qui conserve l’essentiel des restes de la sainte, demeure toujours au carmel. Offert par les diocèses du Brésil, ce reliquaire "du Centenaire" est en vermeil. Le second reliquaire est en bois et pèse à peu près 250 kilos. Il a été conçu pour voyager par avion. Le dernier, appelé reliquaire gothique, contient une vertèbre de la sainte. Trop grand et trop fragile pour prendre l’avion, il voyage uniquement en France à la demande des diocèses.
Mais quelle approche adopter face aux reliques ? « Pour comprendre le sens profond d’une relique, il faut remonter aux origines du christianisme. Dès le IIIe siècle le culte des saints a d’abord été celui des martyrs, c’est-à-dire de ceux qui ont exprimé leur foi au Christ jusqu’à en mourir, a expliqué Mgr Podvin lors de la venue des reliques dans son diocèse. Elles représentent des éléments corporels ou des objets ayant appartenus à un témoin du Christ dont l’Église a reconnu publiquement la sainteté. La relique est le signe que ces hommes et ces femmes sont vivants en Jésus aujourd’hui. Prier auprès du reliquaire permet de vivre une communion entre la terre et le ciel. Toucher une relique n’est pas un geste morbide ou nostalgique ni un acte de superstition. » Les églises étant grandes ouvertes lorsque les reliques y sont exposées, « certains entrent dans l’édifice par curiosité », souligne le père Xavier Behaegel. « Cette prière spontanée peut aussi, parfois, déclencher des chemins de foi », assure-t-il. « La foi populaire est belle mais il faut l’accompagner, insiste sœur Monique-Marie. Il faut une bonne préparation pour évangéliser ».
« Thérèse est une sainte universelle par excellence, reprend encore sœur Monique-Marie. Ce ne sont pas des reliques que l’on vient vénérer mais une personne que l’on rencontre. C’est un peu un pèlerinage à l’envers : elle se rend auprès de populations qui ne peuvent pas forcément faire de déplacement. Sainte Thérèse de Lisieux est une médiatrice qui nous conduit au Christ ».