Actuellement au repos après son hospitalisation de 38 jours pour une grave affection respiratoire, le pape François n’a pas participé à la messe de Pâques. Mais au terme de la liturgie présidée par son délégué le cardinal Angelo Comastri, il a rejoint le balcon de la basilique vaticane, où il est apparu en fauteuil roulant un peu après midi, accompagné de son infirmier personnel Massimiliano Strappetti. "Chers frères et sœurs, bonnes Pâques !", a lancé le pontife de 88 ans d'une voix fatiguée, déclenchant les applaudissements de la foule qui remplissait la place Saint-Pierre. Faisant un effort manifeste d'élocution, le pontife a indiqué que le maître des célébrations liturgiques pontificales, Mgr Diego Giovanni Ravelli, lirait son message.
Dans son texte lu par son collaborateur, le pape François a souhaité à nouveau la fin des conflits dans le monde, affirmant qu’ « aucune paix n’est possible sans véritable désarmement ». « Le besoin de chaque peuple de pourvoir à sa propre défense ne peut se transformer en une course générale au réarmement », a-t-il mis en garde, s’élevant contre des situations « lourdes de conséquences politiques et économiques ». Ces paroles interviennent alors que le Saint-Siège a multiplié les appels en faveur du désarmement ces derniers temps, face au plan de réarmement présenté par la Commission européenne.
Le chef de l’Église catholique a appelé les dirigeants politiques du monde « à ne pas céder à la logique de la peur qui enferme, mais à utiliser les ressources disponibles pour aider les personnes dans le besoin, lutter contre la faim et favoriser des initiatives qui promeuvent le développement ». Ces « armes de la paix […] construisent l’avenir, au lieu de semer la mort », a-t-il insisté.
« Chaque vie est précieuse »
Invoquant « le principe d’humanité », le pape a condamné « la cruauté des conflits qui impliquent des civils sans défense, qui s’en prennent aux écoles et aux hôpitaux ainsi qu’aux agents humanitaires ». « Ce ne sont pas des cibles qui sont touchées, mais des personnes avec une âme et une dignité », a-t-il poursuivi. Regrettant « l’orgueil diabolique qui empoisonne le cœur de l’homme », le pape s’est attristé de la « volonté de mort » qui se révèle dans les conflits, de la violence dans les familles, notamment à l’égard des femmes et des enfants, et du « mépris » envers les migrants.
Le 266 pape a aussi assuré dans son message que « chaque vie est précieuse » aux yeux de Dieu. Il a cité en particulier « celle de l’enfant dans le ventre de sa mère, comme celle de la personne âgée ou malade, considérées dans un nombre croissant de pays comme des personnes à rejeter ».
Gaza, Moyen-Orient, Ukraine, Caucase, Afrique
Au fil de son message, le pape a énuméré les foyers de conflit dans le monde, en commençant par la Terre Sainte. Exprimant sa proximité à « tout le peuple israélien et tout le peuple palestinien », il a confié sa préoccupation pour « le climat d’antisémitisme croissant qui se répand dans le monde entier ». Il a adressé une pensée particulière à « la communauté chrétienne de Gaza, où le terrible conflit continue de semer la mort et la destruction et de provoquer une situation humanitaire dramatique et ignoble ». « Cessez le feu, que les otages soient libérés et que l’aide précieuse soit apportée à la population affamée », a-t-il lancé aux belligérants, alors que le Premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a déclaré hier vouloir poursuivre les opérations militaires dans l’enclave.
François a appelé à prier pour les chrétiens du Moyen-Orient, nommant ceux du Liban et de Syrie « qui aspirent à la stabilité ». Il a aussi évoqué le Yémen « qui connaît l’une des pires crises humanitaires prolongées au monde, en raison de la guerre », exhortant à « trouver des solutions par le biais d’un dialogue constructif ». En Ukraine, où Kiev et Moscou s'accusent mutuellement de rompre la trêve pascale, il a encouragé « tous les acteurs à poursuivre les efforts pour parvenir à une paix juste et durable ». Déplaçant son regard vers le Caucase du Sud, il a souhaité un Accord de paix « définitif » entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan. Il a aussi invité les dirigeants des Balkans occidentaux « à œuvrer pour éviter la montée des tensions et des crises » et « à rejeter les comportements dangereux et déstabilisants ».
Au fil de son message, le pape a souhaité « la paix et le réconfort aux populations africaines victimes de violences et de conflits, en particulier en République Démocratique du Congo, au Soudan et au Soudan du Sud, […] au Sahel, dans la Corne de l’Afrique et dans la région des Grands Lacs ».
Myanmar, liberté religieuse
Se tournant vers le peuple birman, le pape François a appelé à la solidarité après le tremblement de terre dévastateur du 28 mars à Sagaing, qui a fait au moins 3.600 morts et 5.000 blessés d’après les derniers chiffres. Il a salué l’annonce d’un cessez-le-feu – temporaire – par la junte birmane dans le pays. Le pontife argentin a plaidé pour la liberté religieuse, la liberté de pensée et d’expression, et le respect des opinions d’autrui, exprimant son soutien aux chrétiens « qui, en de nombreux endroits, ne peuvent pas professer librement leur foi ». Il a également appelé de ses vœux la libération des prisonniers de guerre et des prisonniers politiques. La résurrection de Jésus « renferme tout le sens de notre existence, qui n’est pas faite pour la mort mais pour la vie », a affirmé François dans ce message. Avec cet événement, « espérer n’est plus une illusion », car le mal « n’a plus de pouvoir sur ceux qui accueillent la grâce de ce jour ».
Les épaules couvertes d'une étole blanche et or, le pape François a ensuite béni la foule d'un geste limité de la main, prononçant en latin les simples paroles "Que Dieu tout puissant, Père, Fils et Saint-Esprit, vous bénisse". Le Pape est ensuite allé saluer les fidèles sur la place Saint-Pierre. Il s’agit de son premier tour en papamobile depuis son retour de l’hôpital le 23 mars.