Qui dit Annonciation dit Vierge Marie. Sous ce terme, créé pour cela, l’Église désigne l’événement biblique (cf. Lc 1, 26-38) durant lequel l’ange Gabriel dit à Marie qu’elle deviendra la mère du Sauveur, ce à quoi la jeune fille de Nazareth répond par le fameux fiat : "qu’il en soit ainsi". Mais le récit, présent seulement dans le troisième évangile, celui de Luc, trouve un parallèle chez Matthieu, que certains appellent l’annonciation à Joseph", aux versets 18 à 26 de son premier chapitre. Une péricope qui est lue à la messe du 18 décembre chaque année, en préparation de la solennité de la Nativité du Seigneur.
Le pape Jean Paul II, dans son exhortation apostolique Redemptoris custos sur l’époux de Marie parue en 1989, parle d’une "analogie étroite" (§3) entre les deux récits évangéliques : "Le messager divin introduit Joseph dans le mystère de la maternité de Marie." Comme pour la mère de Jésus, un ange vient trouver l’homme juste alors qu’il a décidé de répudier sa fiancée en secret puisqu’elle est enceinte. Un moyen de respecter la loi, mais aussi la réputation de Marie. "Voici que l’ange du Seigneur lui apparut en songe et lui dit : ‘Joseph, fils de David, ne crains pas de prendre chez toi Marie, ton épouse, puisque l’enfant qui est engendré en elle vient de l’Esprit saint ; elle enfantera un fils, et tu lui donneras le nom de Jésus (c’est-à-dire : Le-Seigneur-sauve), car c’est lui qui sauvera son peuple de ses péchés.’ " (vv. 20-21)
L’irruption de la grâce
De la même manière que la Vierge Marie, Joseph voit donc l’irruption dans sa vie de la grâce. Alors que son plan est abouti, l’homme de Nazareth laisse Dieu le modifier. Par sa résolution de suivre la volonté du Père, il accorde sa foi à l’accomplissement des promesses qu’il a reçues de ses ancêtres énumérés un peu plus tôt dans une généalogie rébarbative : "Quand Joseph se réveilla, il fit ce que l’ange du Seigneur lui avait prescrit." (v. 24) Jean Paul II peut alors dire que Joseph "manifest[e] ainsi une disponibilité de volonté semblable à celle de Marie à l'égard de ce que Dieu lui demandait par son messager."
Plus largement, explique la bibliste Agnès de Lamarzelle dans un article de la Nouvelle Revue théologique, il y a dans les deux textes, de Luc et de Matthieu, les différentes caractéristiques du "genre littéraire des annonciations" relativement courant dans l’univers biblique : situation bloquée à vue humaine, intervention divine troublante le plus souvent, dévoilement du dessein divin, objection humaine et signe, réalisation par obéissance du serviteur de Dieu qui a reçu l’annonce.
Par cette mise en avant de Joseph, l’évangéliste Matthieu permet au lecteur de voir à travers un autre regard la venue du Sauveur, de s’identifier à l’homme juste, de mieux voir comment Dieu agit dans ce monde. Non par toute-puissance, si ce n’est celle de l’amour, mais par coopération de la grâce, première, et de la volonté humaine. Alors que Jésus lui-même va naître, signe éminent de la présence du Père dans nos vies, comment participer, chacun à sa place, à l’avènement du projet de Dieu pour l’humanité ?
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