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Que faire pour le Liban, pays ami à nouveau en guerre ?

LIBAN-GUERRE-AFP

Banlieue sud de Beyrouth (Liban), 7 octobre 2024.

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Jean-Étienne Rime - publié le 07/10/24
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Jean-Etienne Rime, coordinateur de la Fraternité missionnaire des cités, voit dans le Liban un pays frère dont nous partageons la même culture et d’une certaine manière les mêmes déchirures. Aider le Liban, c’est aider un pays qui a fait du respect du sacré la pierre angulaire de son unité.

Que connaît-on du Liban ? La guerre, l’équilibre instable entre religions chrétienne, chiite, sunnite, druze. On plaint ce pays qui connaît une suite ininterrompue de conflits depuis 1975, sans guère d’accalmies, la terrible explosion du port de Beyrouth le 4 août 2020 provoquée par la négligence de certains, l’attentat du 23 octobre 1983 qui a causé la mort de 58 parachutistes français. On se désole depuis des décennies pour ce petit bout de terre amie des rives de notre Méditerranée. On pleure en lisant Amin Maalouf. Nous nous considérons comme frères et nous connaissons tous des Libanais avec qui l’on entretient de bonnes relations tant nous partageons une culture commune.

Nous pouvons agir

Que fait-on pour ce pays riche d’une culture plurimillénaire ? En témoignent les souvenirs phéniciens ou les ruines grecques, romaines, l’architecture médiévale, les immeubles du XIXe siècle mais aussi une culture vivante avec des universités, le sens de l’entreprise et une vie artistique créative, un sol généreux, une position géographique qui en fait un carrefour convoité du commerce méditerranéen. Qu’en reste-t-il aujourd’hui ? La corruption, les compromis et les invasions successives. Après les Syriens, les Israéliens puis les mollahs à travers la plus importante armée privée que constitue le Hezbollah. Aujourd’hui, ce sont les soldats de Tsahal qui reviennent : incursions terrestres et bombardements ont entraîné la migration d’un million de Libanais. Que faire sinon assister, impuissants à un massacre latent ? Baisser les bras, non. Agir, oui, mais comment ?

Nous pouvons agir, oui vraiment. La première action consiste à comprendre. Cette tribune est trop succincte pour expliquer, mais de vraies questions doivent se poser. Est-ce tolérable de massacrer des civils et prendre des otages, innocents par définition ? Est-ce acceptable d’un côté de prendre des civils comme bouclier et est-ce moral de l’autre d’aller au-delà de la loi du Talion, de s’en prendre pour une dent à la vie de tout un village, est-ce juste d’assimiler les associations d’entraide du Hezbollah, qui ont un rôle humanitaire, aux combattants, et entraîner des conséquences civiles disproportionnées, cependant assimilées aux pertes militaires dans les communiqués officiels ?

Aider des groupes identifiés

En se posant ces questions et bien d’autres dans ce Proche-Orient complexe, nous faisons acte d’humanisme et de fraternité envers ces populations qui souffrent et perdent l’espérance dans un conflit qui semble sans fin, avec la mort chaque jour, au bout de la rue. Nous pouvons aussi aller plus loin et agir de façon concrète, par petites gouttes d’eau : aider des groupes identifiés, par exemple, une école, une communauté en veillant à ce que les financements ou soutiens soient bien ciblés. Dans le contexte actuel, un rigoureux fléchage des dons s’impose et de grandes institutions savent le faire comme l’Œuvre d’Orient, l'AED, ou Life Lebanon dont le président en Suisse a inspiré ce propos. 

Donner un signe d’amitié nourrit le corps et l’âme.

D’autres plus modestes font un travail relationnel de grande valeur comme l’association Anjou-Liban qui œuvre depuis quarante ans au Proche-Orient, dont les bénévoles connaissent depuis des années tel prêtre, telle religieuse et sont certains de soutenir les bonnes causes. Ces soutiens financiers et matériels sont aujourd’hui indispensables parce que les attentes des Libanais sont urgentes : se loger, se nourrir, avoir accès à la santé. Ces aides sont aussi des soutiens au moral — surtout même — parce que le sentiment d’abandon est fort. Les Libanais se sentent oubliés par la communauté mondiale. L’appui d’amis de France ou d’ailleurs est un vrai réconfort, une façon de redonner un sourire à un peuple énergique et si souvent désespéré. Là aussi, la question est morale : donner un signe d’amitié nourrit le corps et l’âme.

Le respect du sacré

Au-delà, nous devons agir en regardant le Liban dans une perspective de long terme parce qu’il y a beaucoup plus de similitudes avec notre veille Europe que l’on ne se l’imagine. Ce pays a su se gouverner avec un équilibre entre les religions, une entente entre les peuples avec un respect du sacré qui est la pierre angulaire de l’unité nationale. La considération pour celui qui croit et qui prie crée des relations fraternelles mais exigeantes, l’un ne va pas sans l’autre. Si le déclin s’est enclenché, c’est pour différentes raisons dont un manque de rigueur, des compromissions vers un État faible, qui a contribué à faire écrouler l’édifice. 

Le Liban se reconstruira. Nous ne savons quand et comment, mais avec la certitude que la clé de cette renaissance résidera dans le respect des particularismes et des religions, dans le partage du sacré. N’y a-t-il pas là aussi une orientation pour la France qui souffre aussi d’un État devenu faible comme nous le constatons en ce moment et où se pose tant de questions d’assimilation, de migration, de laïcité et de racisme mélangés ? Le respect du sacré n’est-il pas en particulier une piste pour le respect des communautés en France et donc leur amitié avec des règles exigeantes ? Cela peut choquer les tenants d’une laïcité militante, mais pas ceux qui honorent les droits de l’homme tout en pratiquant leur religion dans le respect de l’autre.

Comprenons, aidons le Liban, c’est urgent, c’est essentiel pour sa population qui vit dans la peur et l’incertitude du lendemain. Regardons le Liban de demain, sa reconstruction donnera des pistes pour la France.

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