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La vérité a-t-elle besoin de la foi ?

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Félix-Henri Bouquet des Chaux - publié le 07/10/24
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Si "chacun sa vérité", doit-on renoncer à des réponses vraies aux questions de la science ou au sens de la vie ? Pas sûr, explique don Félix-Henri Bouquet des Chaux, auteur de "La vérité a-t-elle besoin de la foi ?" publié aux éditions du Cerf. Entre les incertitudes de la science et de l’opinion, la foi peut aider l’intelligence à reprendre confiance dans sa capacité à connaître la vérité.

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En plus d’avoir été une crise sanitaire, le Covid 19 a provoqué une crise de la vérité scientifique. Pendant des mois, nous avons entendu des scientifiques bardés de diplômes se contredire sur les plateaux de télévision au sujet de la cause du virus ou de son remède. La science a alors perdu de son prestige. La vérité scientifique s’est retirée de l’espace public au profit de l’opinion personnelle. La vérité s’effaçait devant sa vérité personnelle. Avant, l’expression "à chacun sa vérité" était réservée aux questions du sens de la vie, de la morale et de la religion. Aujourd’hui, on l’emploie aussi pour ce qui concerne les vérités historiques et scientifiques. L’homme a-t-il marché sur la lune ? À chacun sa vérité. Le vaccin est-il efficace contre le Covid ? À chacun sa vérité. Tout le monde peut avoir une opinion sur le sujet au point qu’on puisse trouver prétentieuse la personne qui affirmerait détenir la réponse à ces questions.

La vérité se croit

Doit-on se résigner à cette situation ? Doit-on renoncer à donner des réponses vraies sur l’efficacité d’un vaccin ou le sens de la vie ? Pas sûr. Et si la foi chrétienne pouvait voler au secours de la vérité tant décriée ? Peut-être. Si nous y réfléchissons bien, au quotidien, nous sommes mus en permanence par nos croyances. Que s’est-il passé la semaine dernière au Liban ? Combien de bières reste-t-il dans le frigo ? C’est la croyance qui me permet de répondre à ces questions. Mon intelligence adhère aux réponses qui me sont données pour deux raisons : la crédibilité du témoin et la vraisemblance du contenu de la réponse. Je fais confiance au journaliste parce que je connais la déontologie de la chaîne à laquelle il appartient et parce que je sais que le Liban est à la frontière d’un pays en guerre. Il n’est donc pas absurde que ce pays soit à nouveau touché par des bombardements. 

La croyance est donc la meilleure méthode que l’homme possède pour accéder à la vérité. 

De même, cela fait deux ans que je vis avec mon coloc. Je sais que je peux lui faire confiance. Par ailleurs, il aime bien la bière et j’ai fini la dernière avant-hier. Il est vraisemblable qu’il soit passé en racheter en rentrant de son travail. Je peux donc lui faire confiance lorsqu’il me dit que le frigo en est plein. Non seulement la croyance dans la parole de l’autre me permet d’accéder à la vérité mais aussi elle me fait gagner un temps considérable. Je n’ai pas eu besoin de me rendre au Liban pour savoir ce qui s’y est passé et je n’ai pas eu à ouvrir le frigo pour savoir ce qu’il y avait à l’intérieur. Merci la croyance. Lequel d’entre nous pourrait vivre en passant quotidiennement tout ce que les autres lui disent au crible de ses constatations personnelles ? La croyance est donc la meilleure méthode que l’homme possède pour accéder à la vérité. L’homme croit naturellement pour connaître.

La foi pousse au raisonnement

Que se passe-t-il dès lors que cet autre que nous croyons s’appelle Jésus-Christ ? C’est là que nous passons de la croyance naturelle à la croyance surnaturelle. La foi n’est pas d’abord un programme idéologique auquel j’adhère intellectuellement mais une promesse de relation qui bouleverse une vie. L’appel des premiers apôtres qui quittent tout pour suivre Jésus en témoigne. La foi n’est pas une adhésion à une doctrine mais une offre de relation avec le Fils de Dieu qui est à renouveler chaque jour. Ce n’est pas tant un "savoir" qu’un "être avec le Christ". 

Néanmoins, si la foi n’est pas le fruit d’un raisonnement, elle pousse au raisonnement et nous ouvre à une vérité qui nous dépasse. Elle pousse au raisonnement parce que nous avons besoin d’avoir des raisons de croire. C’est là que les livres d’apologétique trouvent toute leur place. Elle pousse au raisonnement aussi parce que la foi fixe le cap que notre intelligence doit suivre. Même si notre société en doute, la foi nous dit que la relation entre l’homme et la femme est très bonne. C’est à notre intelligence de trouver les arguments intelligibles pour comprendre en quoi cette altérité est très bonne. En cela, la foi est un produit dopant l’intelligence parce qu’elle la met en face du mystère.

Entre la science et l’opinion

En résumé, par rapport à la science, la grande force de la foi est qu’elle répond à des questions que la science ne se pose même pas. Elle voit plus loin et plus grand que la science. Elle ouvre l’intelligence de l’homme au mystère infini de Dieu, du monde et de la vie. Par rapport à l’opinion personnelle, la grande force de la foi est qu’elle apporte à l’homme une certitude intérieure que l’opinion lui dénie. La foi sauve l’homme de l’arbitraire de sa subjectivité en le faisant entrer dans un corps qui le dépasse : l’Église. Entre la science et l’opinion, il existe une ligne de crête que la foi peut emprunter. Sûre d’elle-même parce que sûre du Christ sur lequel elle s’appuie, elle peut aider notre intelligence à reprendre confiance dans sa capacité à connaître la vérité.

C’est pour cette raison que l’Église et les chrétiens ont pour mission de maintenir le souffle de la foi dans la société afin que la vérité et son évidence puissent continuer à illuminer les intelligences. C’est en maintenant la foi bien vivante au cœur du monde que l’homme pourra à nouveau revaloriser ces autres modes d’accès à la connaissance que sont la croyance naturelle et la science. Le meilleur rempart au diktat de l’opinion personnelle, c’est la foi. Les chrétiens ont bien une mission de salut-brité public. 

Pratique

La vérité a-t-elle besoin de la foi ? Don Félix-Henri Bouquet des Chaux, Cerf, septembre 2024, 160 pages, 18 euros.
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