Pendant son noviciat, Faustine endure ce qu’on appelle la nuit de l’âme, cette expérience que les mystiques connaissent bien. C’est un temps au cours duquel l’âme choisie par Dieu est purifiée de ses impulsions, instincts et attaches terrestres. Préparée de cette façon, l’âme peut ensuite vivre un amour plus grand et plus parfait. Mais cette période d’obscurité est synonyme d’épreuve et de souffrance. À ces difficultés spirituelles s’ajoutent d’autres ennuis d’ordre matériel qui tourmentent beaucoup Faustine. Elle fait alors plusieurs neuvaines à divers saints, sans succès. Soudain, elle se souvient de Thérèse de l’Enfant Jésus, pour qui elle avait une grande dévotion dans son enfance. La voilà qui entame une neuvaine pour demander l’aide de la carmélite française. Au bout du cinquième jour de neuvaine, Thérèse apparaît en songe à Faustine.
La sainte polonaise relate cet épisode savoureux dans son Petit Journal. Elle raconte comme Thérèse la console, lui promet que ses embarras disparaîtront rapidement, et l’enjoint à faire encore davantage confiance à Dieu. Voulant la réconforter et l’encourager à traverser vaillamment l’épreuve de la nuit de la foi, Thérèse ajoute : "Moi aussi, j’ai beaucoup souffert." Faustine en doute et n’hésite pas à le dire à sa vision ; Thérèse est alors obligée d’insister pour convaincre la jeune novice sceptique… Elle lui rappelle en filigrane que les souffrances terrestres, vécues avec amour et esprit d’abandon, permettent d’accéder à la sainteté.
Faire davantage confiance au Christ
Pleine de hardiesse, Faustine pose alors la question qui lui brûle les lèvres et qui correspond au but ultime de sa vie : sera-t-elle sainte un jour ? Faustine aimerait tellement être sainte comme Thérèse ! La carmélite de Lisieux la rassure tout de suite. Oui, Faustine sera sainte, et "vénérée sur les autels", à condition cependant de faire davantage confiance au Christ. Quel soulagement et quelle joie pour Faustine de savoir qu’elle retrouvera son Jésus après la mort ! C’est un véritable encouragement pour elle. Peu importe désormais les souffrances qu’elle aura à vivre si elle est assurée de pouvoir les offrir à son Sauveur pour les âmes et pour l’Église.
La question de Faustine à Thérèse est admirable de simplicité, tellement éloignée de tout respect humain. Cette anecdote est particulièrement émouvante car elle met en scène deux des plus grandes saintes du monde contemporain en train de parler à cœur ouvert de leur préoccupation et de leur vie. Les deux religieuses apparaissent ici comme deux sœurs aimantes, l’aînée conseillant et encourageant sa jeune sœur pour grandir toujours plus dans la foi.