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Pourquoi dit-on que le bien ne fait pas de bruit ?

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Catherine Leblanc / Godong

Morgane Afif - publié le 22/02/24

Si "le bien ne fait pas de bruit, le bruit ne fait pas de bien". D'où vient cette expression bien connue de ceux qui fréquentent les bancs de nos églises ? Pourquoi, d'ailleurs, dit-on que le bien ne fait pas de bruit ?

C’est à tort que l’on attribue cette citation à saint François de Sales. L’adage qui veut que si “le bien ne fait pas de bruit, le bruit ne fait pas de bien” ne figure pas dans sa longue Introduction à la vie dévote destinée aux laïcs vivant dans le monde. Il faut se rapporter au texte de l’évêque de Genève pour trouver en revanche un constat qui s’en rapproche. “Les bourdons font bien plus de bruit et sont bien plus empressés que les abeilles, mais ils ne font sinon la cire et non point de miel, ainsi ceux qui s’empressent d’un souci cuisant et d’une sollicitude bruyante, ne font jamais ni beaucoup ni bien” souligne ainsi saint François de Sales dans le chapitre X de son œuvre, sagement intitulé “Qu’il faut traiter des affaires avec soin et sans empressement ni souci”. C’est à “l’âme qui aspire à la dévotion”, qu’il appelle aussi Philothée, que saint François de Sales adresses ces mots qui invitent au calme et au silence :

Il faut, ma Philotée, qu’au premier ressentiment que vous en aurez, vous ramassiez promptement vos forces, non point brusquement ni impétueusement, mais doucement et néanmoins sérieusement ; car, comme on voit ès audiences de plusieurs sénats et parlements, que les huissiers criant “Paix là !” font plus de bruit que ceux qu’ils veulent faire taire, aussi il arrive maintes fois que voulant avec impétuosité réprimer notre colère, nous excitons plus de trouble en notre cœur qu’elle n’avait pas fait, et le cœur étant ainsi troublé ne peut plus être maître de soi-même. (Chap. VIII, “De la douceur envers le prochain et remède contre la colère”)

Ceux qui s’empressent d’un souci cuisant et d’une sollicitude bruyante ne font jamais ni beaucoup ni bien.

Le bourdonnement des abeilles et le silence de Marie

Comment ici, ne pas penser à Marthe et Marie de Béthanie ? Ce sont ici les mots que le Christ lui-même adressa à Marthe : “Marthe, Marthe, tu te donnes du souci et tu t’agites pour bien des choses. Une seule est nécessaire” ( Lc 10, 41). C’est aussi l’attitude fondamentale de l’Ancilla domini que l’adage convoque, lorsque Marie médite dans son cœur “la joie pour la naissance de Jésus et la tristesse pour l’hospitalité refusée à Bethléem ; l’amour de Joseph et l’étonnement des bergers ; les promesses et les incertitudes pour l’avenir” comme le souligne le pape François dans une homélie pour la Solennité de Marie Mère de Dieu. C’est là toute l’humilité et la discrétion de la jeune Vierge de Nazareth.

Lorsque saint François de Sales compare le bruit du bourdon à celui des abeilles, il dénonce en fait ceux qui agissent ostensiblement mais dont les actions, vaines, ne portent pas de fruit. Les abeilles ne sont pas tout à fait silencieuses pour autant : n’entend-on pas le bourdonnement de leur butinage lorsqu’elles volent de fleur en fleur ? Saint François de Sales puise dans le grand imagier de la Création une seconde image pour appuyer sa pensée : “Les perles qui sont conçues ou nourries au vent et au bruit des tonnerres n’ont que l’écorce de perles, et sont vides de substance : et ainsi les vertus et belles qualités des hommes qui sont reçues et nourries en l’orgueil, en la ventance et en la vanité, n’ont qu’une simple apparence de bien, sans suc, sans moelle et sans solidité” (Introduction à la vie dévote, chap. IV “De l’humilité pour l’extérieur”).

Le bien se manifeste plus discrètement que le mal

Réduire la pensée de saint François de Sales à cette formule n’est pas tout à fait juste : plus que dire que “le bien ne fait pas de bruit”, l’évêque de Genève souligne surtout le fait que le bien se manifeste plus discrètement que le mal et que ce qui fait beaucoup de bruit ne fait jamais beaucoup de bien. Prise à l’envers, elle en devient même fausse lorsqu’elle justifie le bien par l’usage du silence, dont le mal se nourrit parfois lorsqu’il étouffe la vérité au prix du mensonge et du secret. Il est vrai, cependant, que c’est dans le silence que Dieu se manifeste, comme au prophète Élie sur le mont Horeb : “À l’approche du Seigneur, il y eut un ouragan, si fort et si violent qu’il fendait les montagnes et brisait les rochers, mais le Seigneur n’était pas dans l’ouragan ; et après l’ouragan, il y eut un tremblement de terre, mais le Seigneur n’était pas dans le tremblement de terre ; et après ce tremblement de terre, un feu, mais le Seigneur n’était pas dans ce feu ; et après ce feu, le murmure d’une brise légère” (1 R 19, 11-12).

Écoute, ô mon fils, les préceptes du maître et incline l’oreille de ton cœur.

C’est d’ailleurs ainsi que s’ouvre le prologue de la Règle de Saint Benoît : “Écoute, ô mon fils, les préceptes du maître et incline l’oreille de ton cœur ; reçois volontiers les conseils d’un tendre père, et mets-les en pratique, afin que le labeur de l’obéissance te ramène à celui dont t’avait éloigné la lâcheté de la désobéissance”. Si “le bien ne fait pas de bruit”, c’est peut-être aussi parce qu’il ne faut pas tendre l’oreille pour écouter le bruit et le vacarme, mais qu’il faut enfin se taire pour contempler et écouter ce Dieu discret et tout-puissant qui parle dans le silence.

Madeleine pénitente
Lire aussi :La fureur du bruit

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