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Fiducia Supplicans : le cardinal Müller redoute un risque de “blasphème”

Le cardinal Müller a dénoncé le "saut doctrinal" du document autorisant la bénédiction des couples irréguliers.

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La rédaction d'Aleteia - avec I.Media - publié le 21/12/23
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Ancien préfet du dicastère pour la Doctrine de la foi (DDF), le cardinal Gerhard Müller a dénoncé jeudi 20 décembre le document du Vatican qui autorise la bénédiction des couples irréguliers.

Les réactions se multiplient dans l'Eglise depuis la publication par le Vatican de Fiducia Supplicans qui autorise la bénédiction de "couples en situation irrégulière et les couples de même sexe". Le cardinal Gerhard Müller, qui a été à la tête du dicastère pour la Doctrine de la foi (DDF) entre 2012 et 2017, a dénoncé le document dans une longue déclaration divulguée le jeudi 20 décembre. Il avertit les prêtres d’un risque de "blasphème" s’ils octroient les bénédictions à des couples en situation irrégulière.

Dans une déclaration doctrinale, approuvée par le pape François, le DDF ouvre la voie à la bénédiction de ces couples, à condition que cette bénédiction ne soit pas ritualisée et qu’elle n’imite pas le mariage chrétien qui reste entre un homme et une femme. Le texte n’entend pas légitimer les unions irrégulières aux yeux de l’Église mais proposer une "charité pastorale".

Un "saut doctrinal"

Mais pour le cardinal Müller, l’enseignement de Fiducia supplicans est "contradictoire" et il n’exprime pas simplement "une évolution" de la doctrine mais "un saut doctrinal", qui s’oppose à la dernière déclaration magistrale à ce sujet. En mars 2021, l’alors congrégation pour la Doctrine de la foi avait publié une note qui rejetait catégoriquement la possibilité de bénir les unions de même sexe.

Le théologien allemand, connu pour ses vives critiques à l’encontre du pape, estime que ce qu’il appelle la "bénédiction pastorale innovante" est "créée ad hoc pour bénir des situations contraires à la loi ou à l’esprit de l’Évangile". En effet, note-t-il, ce ne sont plus "les personnes pécheresses" qui sont bénies, mais "en bénissant le couple, c’est la relation pécheresse elle-même qui est bénie".

Et le cardinal Müller de souligner que "selon le critère de ce type de bénédictions, on pourrait même bénir une clinique d’avortement ou un groupe mafieux". Il est "hasardeux d’inventer de nouveaux termes", prévient le prélat, qui conclut, selon lui, que le prêtre qui donnerait ce type de bénédiction commettrait "un acte sacrilège et blasphématoire".

Si la déclaration de Rome a été saluée notamment par les conférences épiscopales d’Allemagne et de Suisse, il n’en est pas de même dans de nombreux pays, où fidèles et évêques ont manifesté leurs réserves, voire leur opposition frontale à la décision du Pape.

"Confusion" à Rome

À Rome, la déclaration doctrinale et les nombreuses réactions suscitées par sa réception dans le monde ont semé le trouble. Certains au Vatican n’hésitent pas à parler de "confusion". Mais pour un expert romain, ces remontées de terrain sont "saines" et ne sont pas incompatibles avec la culture juridique de l’Église. "Les épiscopats peuvent recevoir une orientation et décider si elle est applicable ou non dans leur territoire", explique ce canoniste, qui souligne que "l’Église catholique ne peut pas faire l’économie" d’une telle possibilité, en raison de la diversité des situations locales.

La non-application d’une loi universelle dans un diocèse particulier n’est pas une nouveauté selon lui. Dans l’histoire ancienne, les évêques pouvaient envoyer à l’évêque de Rome une “reprobatio”, l’avertissant que sa loi ne promouvait pas le bien commun dans leur diocèse. Il est arrivé dans l’histoire récente que des épiscopats prennent de la distance par rapport à un texte venant de Rome, à l’instar des évêques belges lors de la publication de l’encyclique Humanae Vitae de Paul VI (1968) sur le mariage et la régulation des naissances. Ces derniers avaient alors ouvert pour certains catholiques la possibilité de suivre leur conviction.

De même, ajoute ce canoniste, la possibilité pour les évêques de décider pour leur diocèse est en ligne avec la "décentralisation" prêchée par François depuis 10 ans. "La Curie romaine ne peut pas se mettre à la place des Églises particulières qui connaissent le mieux la situation pastorale, comme l’affirme Evangeli gaudium".

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