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Une soudaine prise de conscience ? Depuis plusieurs années pourtant, les classements PISA (Program for International Student Assessment), PIRLS (Progress in International Reading Literacy Study) et TIMSS (Trends International in Mathematics and Science Study) témoignent de la dégringolade du niveau d’instruction des jeunes Français, notamment en mathématiques et en français.
Les résultats des évaluations nationales, dévoilés ce lundi 13 novembre par le Ministère de l’Éducation nationale, confirment la baisse de niveau des élèves de l’Hexagone. Si le niveau en 6e semble avoir progressé, les évaluations des élèves de 4e sont préoccupantes. Dans un entretien au Parisien, Gabriel Attal reconnaît que les résultats des élèves de 4e "ne sont pas satisfaisants et sont même plutôt inquiétants". Et de préciser : "Un peu plus de la moitié des élèves [de 4e] ne lisent pas convenablement et en mathématiques, plus de la moitié ne maîtrisent pas la résolution de problèmes et la géométrie". Le ministre de l’Éducation nationale évoque la surexposition des enfants aux écrans pour expliquer les difficultés d'apprentissage. Mais ce n'est pas le seul facteur.
Pour François-Xavier Clément, ancien directeur de l'Enseignement catholique de la Loire, ancien chef d'établissement de Saint-Jean-de-Passy à Paris, aujourd’hui directeur du Centre de Formation de l'Éducation intégrale et fondateur de Saint Joseph Éducation, ces résultats sont inquiétants car ils démontrent que certains élèves ont de graves difficultés. "Mais ils sont aussi scandaleux dans la mesure où cela fait maintenant longtemps que certains tirent la sonnette d’alarme", souligne-t-il. "Il y a 20 ans déjà, Jean-Paul Brighelli décrivait la déroute du système scolaire français dans La fabrique du crétin. Chaque année, il y a des enquêtes, et chaque année le constat est un peu plus grave", déplore François-Xavier Clément. Pour ce spécialiste de l’éducation, auteur de La voie de l'éducation intégrale (Artège), l’une des principales causes de la baisse du niveau en France réside dans la déconstruction du schéma de la transmission des savoirs à l’école.
Aleteia : Comment expliquez-vous qu’aujourd’hui, la moitié des élèves de 4e éprouve des difficultés à lire et à compter ?
François-Xavier Clément : Une première cause réside dans l'augmentation du nombre d'élèves issus de l’immigration. Aujourd’hui, certains enfants ne parlent pas français à la maison. Or, en l’absence de véritable politique d’assimilation, ils ont du mal à se hisser au niveau minimum. Ils auraient besoin d’être aidés, accompagnés par des méthodes FLE (Français Langue Étrangère). La seconde raison tient à la manière d’enseigner. Depuis les années 1990, on a cassé le modèle de la transmission dans l’enseignement. On imagine que les élèves vont découvrir par eux-mêmes les connaissances au détour d’un texte, d’une conversation avec le professeur ou d’une recherche sur Internet. On a déconstruit le schéma de la transmission qui passe par la lecture, l’écriture, l’apprentissage par cœur… Aujourd’hui, dans les établissements publics et bon nombre d’établissements privés, le professeur est simplement là pour accompagner la découverte des savoirs. C’est un héritage de la pensée de Pierre Bourdieu et de la pédagogie de Philippe Meirieu, fondées sur une pensée marxiste qui cherche à sortir de la relation "dominant/ dominé", au profit d'un "apprenant" qui doit découvrir par lui-même et d'un professeur qui met à disposition des connaissances.
Que faudrait-il faire pour rehausser le niveau des élèves ?
Revenir aux fondamentaux, pour que les élèves sachent lire, parler, écrire, compter. Des enjeux qui se jouent dès les classes élémentaires. Il est important par exemple que les élèves aient des notes, et non des smileys. Aujourd’hui, au primaire, on est tombé dans la culture du Trivial Pursuit, on enseigne plein de choses, dans tous les domaines, et lorsque l’enfant arrive au collège, bon nombre de connaissances ne sont pas acquises. En 1975, avec la loi Haby, on a voulu démocratiser l'enseignement avec le collège unique. Mais en réalité, cela ne fait que creuser les inégalités, car ceux qui ont des difficultés ne sont pas accompagnés. Et aujourd'hui les professeurs au collège ne sont pas préparés à accueillir des élèves qui ne savent pas lire, écrire, compter… Il faut aussi retrouver une étape d’examen lors des passages dans les classes supérieures. Chaque fin de classe devrait donner lieu à une évaluation qui permette d’apprécier, de manière objective, le niveau de chaque élève.
Faut-il s’inquiéter ? Y a-t-il quelque part une lueur d’espérance ?
Il existe des méthodes pour faire progresser les élèves ! J’ai fait le tour de nombreux établissements, et j’ai vu des écoles privées, en pleine campagne, avec une vraie mixité sociale, dans lesquelles de gros efforts ont été faits pour permettre à tous les élèves de progresser. Encore faut-il le vouloir. Le mérite de Monsieur Attal est de nommer les choses et d’avoir le courage de dire ce qu’il voit. On peut donc espérer que son désir de provoquer le "choc des savoirs" et de reprendre les fondamentaux soit entendu.
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