Emmanuel Macron a annoncé en avril dernier sa volonté d'élaborer un "modèle français de la fin de vie". Initialement annoncé pour la fin de l'été, le projet de loi qui doit lui permettre d'être encadré a pris du retard. Mais le président de la République semble bien décidé à poursuivre sur sa lancée. Selon Le Parisien, le chef de l'État doit réunir les principaux ministres concernés par ce sujet mardi 14 novembre pour une réunion de travail sur le texte. Parmi eux, Élisabeth Borne, Premier ministre, mais aussi le ministre de la Santé Aurélien Rousseau, la ministre déléguée chargée de l’Organisation territoriale et des professions de santé Agnès Firmin Le Bodo ou encore la ministre des Solidarités et des familles Aurore Bergé.
Le gouvernement pourrait arbitrer les critères qui permettront de recourir à l'aide active à mourir. Une démarche qui s'inscrit dans la continuité de la convention citoyenne sur la fin de vie. Après quatre mois de débats entre décembre et avril, ses participants ont conclu à la nécessité d'un renforcement de l'offre de soins palliatifs, tout en se prononçant majoritairement en faveur de "l'aide active à mourir". Près de 40% d'entre eux ont voté pour un système autorisant à la fois euthanasie et suicide assisté.
Une fois le texte élaboré, il devra être soumis au Conseil d'État, chargé d'examiner la conformité au droit de tous les projets de loi, d'ordonnances ou encore de décrets émis par le gouvernement. Ce dernier rend un avis consultatif : le gouvernement n'est donc en aucun cas tenu de le suivre. Le texte sera ensuite présenté en Conseil des ministres, en principe début début décembre, avant d'être finalement examiné par l'Assemblée Nationale et le Sénat, étape prévue pour le premier trimestre 2024.
Des zones d'ombre
Axé sur "l'assistance au suicide", le texte ne devrait cependant pas prévoir l'euthanasie, c'est-à-dire l'intervention d'un tiers pour mettre fin à la vie des patients éligibles, à savoir majeurs et éprouvés par des souffrances physiques "insupportables". Pour mettre fin à leurs jours, les malades devront donc ingérer eux-mêmes un produit létal. Cependant, plusieurs médecins alertent sur une possible "exception d'euthanasie": les soignants et médecins, ou encore la famille, seraient autorisés à donner le produit aux malades incapables d'effectuer seuls ce geste en raison de leur état de santé trop dégradé.
Plusieurs médecins ont averti d'un possible "cheval de Troie", autrement dit d'une porte d'entrée à la légalisation pure et simple de l'euthanasie. "À partir de notre expérience, nous répondons que le recours à une euthanasie d’exception n’est pas nécessaire car la loi actuelle permet de répondre aux demandes de malades n’étant plus capables de déglutir ou de respirer seuls", précisent-ils au Figaro. "Ce concept “d’exception”, s’il est inclus dans le projet de loi, ne semble servir qu’à entrouvrir la porte de l’euthanasie pour aller plus loin ensuite", affirment encore les médecins.
Des mises en garde et des réserves
Si la gauche s'est prononcée en grande majorité en faveur du suicide assisté et de l'euthanasie, les opinions divergent au sein de la majorité. Agnès Firmin Le Bodo défend son projet de loi avec conviction, mais d'autres ministres sont plus réservés, à l'image d'Aurore Bergé. L'Église catholique est quant à elle montée au créneau à maintes reprises, réaffirmant sa farouche opposition à la légalisation de l'aide active à mourir quelle que soit sa forme. Les évêques de France ont encore rappelé leur désaccord lors de leur assemblée plénière d'automne à Lourdes, le 8 novembre, ainsi que dans les colonnes du Figaro aux cotés d'autres responsables religieux.
Lors de sa visite à Marseille, les 22 et 23 septembre, le pape François n'avait pas hésité à dénoncer publiquement "la perspective faussement digne d'une mort douce", interpellant presque directement Emmanuel Macron. "Qui écoute les gémissements des personnes âgées isolées qui, au lieu d’être valorisées, sont parquées dans la perspective faussement digne d’une mort douce, en réalité plus salée que les eaux de la mer ?", avait ainsi questionné le chef de l'Église catholique.