"Aider à mourir le moins mal possible, en acceptant à titre exceptionnel l’assistance au suicide, sous conditions impératives." Telle est la ligne de conduite proposée par l’Académie de médecine dans un avis rendu public le 17 juillet dernier, et ce à quelques semaines du dévoilement du projet de loi sur la fin de vie annoncé avant la fin de l’été. Cette société savante, chargée d’éclairer le gouvernement en matière de politique de santé, se prononce donc clairement en faveur du suicide assisté.
En tant que soignante, loin de me rassurer, loin de me conforter, loin de m'enthousiasmer, cette déclaration et cette direction qui nous sont données viennent profondément me heurter, et je ne me reconnais pas dans les termes employés.
"Aider à mourir le moins mal possible"
Comme un aveu de faiblesse. Comme un manque d’ambition pendant que dans d’autres secteurs la médecine fait tant de prouesses (Et Dieu sait que l’Académie de médecine le sait, elle qui délivre des récompenses dans le domaine de la recherche médicale chaque année). Comme un "à quoi bon" prononcé avec mollesse. Comme un abandon de soin, et de toutes ses promesses…
"A titre exceptionnel"
Cette séquence réveille en moi une impression de déjà entendu. C’est la même "exception" en laquelle Simone Veil avait cru, lorsqu’elle présentait son projet de loi sur l’IVG, pratique désormais largement répandue. C’est la même "exception" qui devait être retenue dans la transcription intégrale de la filiation d’enfants nés de GPA, avant que la cour de cassation ne rende deux arrêts admettant "en principe" cette pratique, et cela d’une manière totalement inattendue. C’est la même "exception" qui, dans bien des champs de réflexion bio-éthiques, nous a été vendue avec le serment, souvent trahi, que cela n'évoluera plus.
"L’assistance au suicide"
Un oxymore poussé à son paroxysme. La froideur de l’acte d’un être isolé encouragé par une prétendue fraternité. Comment peut-on s’imaginer aidant quelqu’un à se suicider ? Faut-il pousser le désespéré dans le fossé, en admettant que sa vie ne vaut plus ce qu’elle valait ? Faut-il sous-estimer l’appel à l’aide que cet acte vient bien souvent lancer ? Et quelle est cette aide qui devrait requérir toute notre écoute, et notre inventivité ?
"Sous conditions impératives"
Les professionnels de santé vous le diront : en fin de vie, il n’y a d’impératif que de soulager la douleur, apporter du confort, prodiguer de la douceur et préparer la mort (sans la précipiter). Car la dignité sacrée de l’autre l’exige, elle qui préexiste en tous, sans exception, sans "condition".