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Une remise de grand-croix, un soir donné, sous les dorures de l’Élysée... rien de très original qu’un tel tableau. Depuis toujours les présidents comme avant eux les rois ou les empereurs, aiment à rassembler en leurs palais et à prendre dans leurs bras de bons citoyens pour leur dire la reconnaissance de la Nation. C’est l’occasion de discours, de compliments échangés, de bousculades empressées ou chacun cherche à serrer la main du chef de l’État et à complimenter l’heureux récipiendaire. De ces mots prononcés, l’Histoire n’en retient rien car il ne s’agit somme toute que de paroles privées cherchant à mettre en valeur la carrière ou la vie de tel ou tel, rappeler telle anecdote amusante ou héroïque, souligner les vertus et les qualités...
Mais voilà que soudain, par un concours de circonstances que l’on s’explique mal, la remise d’une décoration à une artiste vétéran, autrefois danseuse de revue et chanteuse populaire, puis amie des présidents, connue pour ses engagements et défenseuse infatigable de bien des nobles causes, cette remise de décoration donc, devient un moment de promulgation d’une nouvelle ordonnance. "Votre combat nous oblige" : de quel combat s’agit-il ? l’euthanasie.
Violence du procédé
On ne peut qu’être surpris devant la violence du procédé et sa légèreté en même temps. Si le combat avait porté sur l’aménagement des berges d’une rivière de l’arrière-pays berrichon, ou sur une cause plus noble comme l’amélioration de l’accueil par exemple des familles d’enfants malades dans les hôpitaux, ce serment présidentiel aurait été de bon augure. Mais sur un sujet aussi majeur, et qui nous concerne tous directement, mortels que nous sommes, il est un peu affligeant d’entendre ces mots-là, dit ainsi, entre deux coupes de champagne et des selfies.
On peut juger de la valeur d’un combat sans pour autant y adhérer au nom de tous. On ne peut mélanger ainsi les paroles d’une cérémonie privée avec une déclaration de politique générale. À trop vouloir séduire, on finit par dire même parfois le contraire de ce que l’on pense, si l’on en croit les protestations réitérées maintes fois, affirmant qu’une telle loi ne serait pas mise sur le tapis avant des concertations et des réflexions nombreuses et ouvertes.
La question posée par l’euthanasie ne peut être réglée ni d’un revers de manche ni d’un baiser amical : on ne peut en sortir ni par l’invective ni par la sensiblerie.
La question posée par l’euthanasie ne peut être réglée ni d’un revers de manche ni d’un baiser amical : on ne peut en sortir ni par l’invective ni par la sensiblerie. Elle a pour corolaire la question de ce que l’on veut proposer comme chemin à une société. Depuis plusieurs années, l’État se présente et œuvre volontiers pour préserver notre pouvoir d’achat, notre niveau de vie, notre capacité à rouler en voiture et à nous chauffer cet hiver. Qui s’en plaindrait ?
Même les chipoteurs trouvent plus agréable de faire le plein avec un litre à 1,50 euros qu’à 2,10 euros. Même les moins enthousiastes seront heureux de pouvoir mettre le chauffage cet hiver sans risquer la banqueroute. Mais alors, pourquoi ne pas continuer dans ce sens : pourquoi l’État ne pourrait-il pas être celui qui défend nos vies ? Non pas simplement contre un virus ou un ennemi extérieur mais en cherchant à développer un type de médecine et d’accompagnement vers la fin de vie qui s’oriente davantage vers les soins palliatifs que vers la mort donnée.
Afin que la douleur ne soit pas une fatalité
Certes il est infiniment plus coûteux de garantir à tous les citoyens qu’il pourra bénéficier de soins palliatifs le moment venu, plutôt que de l’autoriser à se tuer ou à se faire tuer. Mais comment se fait-il qu’il soit impossible de trouver de l’argent pour cela alors qu’on en trouve depuis deux ans pour tout ce qui semble important ? Je sais bien qu’un certain nombre de nos contemporains, et je ne prétends pas faire exception, tremblent lorsqu’ils envisagent la mort dans la souffrance. Qui peut affirmer ici qu’il n’en n’a pas peur ? Mais précisément, c’est bien pour cela qu’il faut soutenir la science et la recherche, et développer les services adéquats afin de rendre ces derniers instants aptes à devenir un temps ou les dernières paroles échangées, les derniers gestes puissent se vivre dans la paix et la tendresse.
Que certains choisissent de recourir à l’euthanasie (ou quel que soit le nom élégant qu’on veuille lui donner) reste leur affaire. Qui suis-je pour les juger ? Il y a des souffrances et des solitudes qui peuvent être insupportables, même pour les plus vaillants. Mais, de grâce, qu’ils ne prétendent pas imposer à tous ce qu’ils ne peuvent vivre eux-mêmes. Qu’ils se battent pour qu’un autre sort attendent ceux qui, après eux, connaîtront ces angoisses qu’ils traversent aujourd’hui. Afin que leur douleur ne soit pas une fatalité pour les générations à venir. Et que l’État ne devienne pas le réceptacle ému des souffrances les plus médiatiques en cherchant à chaque fois à y répondre dans une déclaration immature. Mais qu’il se préoccupe du Bien commun, qui justifie son existence, en cherchant d’abord à soulager ceux qui souffrent non en leur ôtant la vie mais en œuvrant, quoi qu’il en coûte, pour en alléger les douleurs.