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Dépistage in utero : pour le meilleur ou pour le pire ?

échographie
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Marie-Anne Chéron - Gènéthique - publié le 25/10/21
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La tendance qui vise à élargir le spectre des maladies ou des handicaps dépistés in utero, pour ne garder que les embryons exempts, est en marche. Si les parents sont porteurs du gène, comme la maladie de Huntington, ils sont systématiquement orientés vers l’avortement.

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La maladie de Huntington est une maladie génétique « associée à la dégénérescence de neurones d’une partie du cerveau impliqués dans des fonctions motrices, cognitives et comportementales » (Inserm). À ce jour, la maladie est incurable. Quand elle se déclare entre 30 et 50 ans, il est déjà trop tard, le dernier stade de développement est atteint : problèmes de contrôle moteur, de déglutition et de parole, des difficultés de concentration et des trous de mémoire, une dépression et des changements de personnalité.

Si le gène de la maladie est connu, « les mécanismes qui mènent à cette neurodégénérescence ne sont pas encore élucidés », explique l’Inserm et la probabilité pour les parents atteints de cette maladie de la transmettre à leurs enfants est de 50 %. 

Deux semaines après la fécondation

Une équipe de chercheurs du laboratoire d’embryologie synthétique de l’université Rockefeller de New-York vient de montrer que la variante du gène affecte l'embryon humain environ deux semaines après la fécondation (Bionews), au cours de la phase de développement appelée gastrulation. L’étude a été menée à l'aide de structures synthétiques ressemblant à des embryons, appelées « gastruloïdes », fabriquées à partir de cellules souches embryonnaires humaines. C’est déjà là tout un problème : ces modèles embryonnaires sont-ils seulement ressemblant ou les considère-t-on comme des embryons humains ? En d’autres termes, peut-on se fier à ces résultats ? 

Sans doute pour le professeur Ali Brivanlou, chef du laboratoire, qui considère que la compréhension de ces mécanismes pourrait « être la clé du développement de nouveaux traitements permettant de retarder les symptômes, voire de guérir la maladie ». Mais est-ce bien le cas ?

Du diagnostic à l’eugénisme ?

En 1958, le professeur Jérôme Lejeune, étudiant le caryotype d’enfants mongoliens, parvient à montrer l’existence d’un chromosome surnuméraire. Cette découverte, voulue pour servir la cause des personnes porteuses de trisomie 21, va conduire à l’avortement en masse de bébés porteurs de trisomie 21. En 2019 en France, 96% des embryons porteurs de trisomie 21 sont avortés. Bien que la cause de la trisomie soit connue depuis 60 ans, on cherche toujours un traitement.

Aujourd’hui, l’analyse génétique permet de détecter un nombre croissant d’affections et de maladies. Quel sort sera réservé aux embryons tant que les moyens n’auront pas été trouvés de retarder la survenue des symptômes sinon de les guérir ? La trisomie 21 restera-t-elle encore longtemps la seule maladie systématiquement dépistée ? Lors des journées de la bioéthique d’octobre dernier, Alexandra Benachi, professeur de gynécologie-obstétrique à la faculté de médecine Paris Sud, a rappelé qu’en France « on peut dépister ou diagnostiquer aujourd’hui beaucoup d’anomalies génétiques, il faut que les patientes soient porteuses du gène ainsi que leur conjoint pour les maladies récessives ». C’est déjà le cas pour la maladie de Huntington. Et « en cas de résultat positif, le couple peut choisir d’interrompre la grossesse à n’importe quel moment », explique une note de l’Inserm qui ajoute : « Ce diagnostic est généralement réalisé entre 11 et 13 semaines d’aménorrhée (SA) par biopsie du trophoblaste. Le risque de fausse couche associé est d’environ 1%. Il peut également être réalisé par prélèvement de liquide amniotique à partir de 15-16 SA, avec un risque de fausse couche inférieur (0,5%), mais une interruption de grossesse plus tardive en cas de diagnostic défavorable ». Que va-t-il se passer quand la maladie sera susceptible d’être dépistée à 2 semaines de grossesse ? 

La tendance qui vise à élargir le spectre des maladies dépistées, pour, dans une démarche de sélection eugénique toujours plus poussée, ne garder que les embryons exempts est déjà en marche. Aujourd’hui, si les parents sont porteurs du gène, et demain ?

Soigner in utero

L’argument du soin lui-même a fait long feu. Si les interventions chirurgicales in utero permettent des prouesses, elles s’adressent en fait à un tout petit nombre de patients (Agence de biomédecine). Et parmi ceux qui sont malades, pour qui un traitement est possible, ne sont soignés que ceux qui sont susceptibles d’être guéris. Ou quasiment. Les parents de fœtus porteurs d’affections plus graves, qui ne sont pas susceptibles d’une façon ou d’une autre d’être traitées, ou pour qui une intervention ne permettrait pas d’apporter suffisamment d’améliorations, sont systématiquement dirigés vers l’avortement. Et ce, dans des conditions désormais facilitées puisque la loi de bioéthique a supprimé le délai de réflexion pour une IMG et qu’en France, l’avortement pour raison « médicale » est possible jusqu’à la naissance. 

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