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Camille de Lellis, le saint qui tendait l’oreille à la voix des anges

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Andrea Jemolo / Aurimages

Camille de Lellis sauvant des patients, Pierre Subleyras, XVIIe, Palais Braschi, Rome.

Anne Bernet - publié le 13/07/21 - mis à jour le 11/07/22

Bagarreur professionnel et joueur impénitent, Camille de Lellis, fêté par l'Église catholique le 14 juillet, fait l’expérience de la souffrance avant d’exceller dans le métier d’infirmier. Devenu prêtre, l’assistance des anges lui vaut de belles aventures.

À n’en pas douter, c’est un drôle de miracle que le Bon Dieu a fait en faveur des Lellis quand Il se décide à leur donner le fils qu’ils lui réclament depuis longtemps ! Lorsque Mme de Lellis se trouve enfin enceinte, ce à quoi aucun médecin n’a d’abord voulu croire, elle a la soixantaine, ce qui, en cette année 1550, fait d’elle une vieille femme. Quant à son mari, « le vieux Lellis », dit-on dans leur village de Bacchianicco dans les Abruzzes, il est septuagénaire. Et pourtant, le garçon qui leur est né n’a rien d’un « enfant de vieux ».

À 16 ans, Camillo frôle les deux mètres de haut, et, taillé en hercule, effraie tout le pays pour son goût immodéré des bagarres. Au lieu de canaliser cette violence qui explose à tout propos, son père laisse faire, trop heureux des “exploits” de son fils. Enfin, jouant de ses relations, il se décide à lui ouvrir la carrière des armes et le fait entrer dans l’armée vénitienne. Camille ne se révèle pas bon soldat : indiscipliné, gros buveur, querelleur, il n’occasionne que des problèmes, d’autant qu’il a la passion du jeu, joue sa solde, et l’argent que son père lui envoie pour éponger ses dettes, perd sans cesse et se met dans des rages terribles…

Et puis un jour, le vieux Lellis meurt et il n’y a plus personne ni pour payer les dettes de son fils ni pour apaiser le mécontentement des supérieurs. Au début des années 1570, la Sérénissime donne congé au jeune homme qui, ayant mangé la fortune paternelle, se retrouve réduit aux expédients. Il ne sait que jouer et se battre. Alors il se fait joueur professionnel, tricheur aussi, pour survivre, et sans doute spadassin.

Camille de Lellis survit ainsi une dizaine d’années. Jusqu’au jour où, dans une affaire douteuse, il est sérieusement blessé au pied. Infectée, la plaie refuse de guérir et le laisse infirme. Désormais incapable de gagner sa vie, réduit à la mendicité, il reprend le chemin du Sud, dans l’illusion qu’au pays natal, il se trouverait des proches pour lui venir en aide. La route est longue, Camille tombe d’épuisement en chemin, mais, la Providence veillant, c’est près d’un couvent de capucins, celui de San Giovanni Rotondo, où les Pères recueillent le blessé et le soignent. Comme il va mieux, ils lui offrent un emploi de jardinier. C’est tout ce que cet infirme semble capable de faire, ayant peu fréquenté l’école.

Son expérience de la douleur et de l’humiliation l’a rendu doux et compatissant ; son amour grandissant du Christ l’amène à tout faire afin de lui plaire.

Le temps passa et, dans la paix de la maison franciscaine, Camille opère un retour sur lui-même. Son passé se met à lui faire horreur et, bouleversé d’avoir tant offensé Dieu, il demande à entrer au noviciat. L’usage est d’aller pour cela dans une autre maison, on l’envoie à Trivento. C’est un long voyage et Camille, que son pied fait toujours souffrir, peine.

Depuis des lieues, il suit une rivière paisible mais qui ne présente aucun gué et que ne franchit aucun pont. Il lui faut pourtant la passer pour arriver à destination. Craignant d’être surpris par la nuit loin du couvent, Camille décide de traverser à la nage. Il s’apprête à se mettre à l’eau lorsque, venue de nulle part, une voix se fait entendre : “Ne traverse pas, Camille !” Constatant qu’il n’y a personne, Camille attribue cette voix mystérieuse à son ange gardien et, obéissant, cherche un endroit où dormir. Bien lui en prend !

Étonnant infirmier

À l’aube, s’étant remis en route, il croise des paysans auprès desquels il s’enquiert des moyens de passer la rivière. Ils lui disent que sous ses airs tranquilles, le cours d’eau est profond, plein de courants cachés, et que tous les imprudents qui ont voulu passer à la nage se sont noyés. Cette intervention providentielle prouve que la main de Dieu s’étend sur Camille, mais sa vie n’en est pas facilitée.

À Trivento, sa blessure se rouvre, et le Père Gardien, après des mois de soins inutiles, déclare à Lellis que les Capucins ne peuvent le recevoir. Il quitte le couvent désolé, se dirige vers Rome sans savoir ce qu’il va devenir, y arrive si mal en point qu’on le fait admettre à l’hôpital Saint-Jacques, qui reçoit les pèlerins malades. Camille n’a pas d’argent pour payer ses soins et, dès qu’il se sent mieux, il propose d’aider à entretenir les salles, faire les lits et changer les patients pour s’acquitter de sa pension. On accepte. C’est une besogne ingrate et méprisée mais Camille y excelle.

Son expérience de la douleur et de l’humiliation l’a rendu doux et compatissant ; son amour grandissant du Christ l’amène à tout faire afin de lui plaire. Cet étonnant infirmier attire bientôt l’attention d’un habitué de la maison, un prêtre célèbre dans tout Rome, Philippe Néri. Il devint le directeur de conscience de Camille et, quand celui-ci, guéri, lui annonce son intention de retourner à Trivento accomplir son noviciat capucin, le saint lui déclare que ce n’est pas là l’endroit où Dieu l’appelle. Camille s’entête. En le voyant partir, Philippe Néri lui déclare : “Tu verras, ta plaie va se rouvrir et ils te chasseront de nouveau…” Ce fut exactement ce qui arriva. Plus infirme que jamais, Camille revient à Rome et reprend ses fonctions à Saint-Jacques, mais, cette fois, il comprend les raisons de son échec chez les fils de saint François.

“Poursuis cette affaire”

Depuis quelques temps, le grand crucifix de sa chambre s’anime quand il prie et le Christ l’entretient des projets qu’Il nourrit pour lui : Camille, qui a vu la détresse des patients des hôpitaux romains, doit se consacrer à la fondation d’un ordre religieux qui se dévouerait au soulagement de ces malheureux, fussent-ils galériens ou pestiférés, leur prodiguant des soins avec toute la charité chrétienne nécessaire, les aidant à offrir leurs souffrances pour le salut des âmes, et d’abord de la leur, les assistant à l’approche de la mort.

Camille réunit autour de lui quelques soignants de bonne volonté et s’applique à satisfaire le Christ ; mais on l’accuse de chercher à s’emparer de la direction de l’établissement, on lui fait mille avanies, tant et si bien qu’il veut renoncer. Alors, le Crucifié lui déclare : “Poursuis cette affaire et ne t’afflige pas, je viendrai à ton aide car cette œuvre est la mienne, non la tienne.”

Peu à peu, la communauté prend forme sous sa houlette. On lui fait comprendre que, pour le bien de tous, il doit, s’il veut assumer ses responsabilités de fondateur, se préparer au sacerdoce. Il a 32 ans, sait tout juste lire et écrire, a toujours entendu ses maîtres dire qu’il a une cervelle de moineau. Néanmoins, il entre au collège comme un écolier, étudie en dépit de tous les obstacles, arrive aux ordres sacrés. En réponse à ceux qui se moquent de ce séminariste trop âgé, un supérieur déclare : “Il est venu tard, certes, mais il fera de grandes choses dans l’Église.”

Le 9 juin 1584, Camille de Lellis devient prêtre et se voit confier l’aumônerie de l’hôpital du Saint Esprit. Sa congrégation, qui ne compte avec lui que trois membres, s’appelle « les pieux serviteurs des malades » et se donne pour but de soigner les corps et les âmes en étant tour à tour domestiques, infirmiers et prêtres. Très vite, ils n’ont plus un sou et les huissiers aux portes. À ses frères consternés, Camille assure que, “sous un mois, toutes leurs dettes seraient payées” et la fondation tirée d’affaire. Il l’affirme aussi à ses créanciers qui lui répondent que “le temps des miracles est terminé”. Il se contente de sourire.

Une singulière aventure

Un mois après, un cardinal dont il a sollicité le patronage meurt en lui laissant toute sa fortune, laquelle est considérable. C’en est fini des ennuis d’argent. « Il ne faut jamais douter de la Providence », dit-il seulement. C’est si vrai que, même pendant le terrible hiver 1590, l’un des plus froids que l’Italie ait connus, tandis que l’on meurt de faim à Rome, le pain ne manque jamais dans les maisons camilliennes, alors même que le Père de Lellis dépense sans compter pour soulager toutes les misères qui s’étalent devant lui, affirmant à ceux qui l’incitent à la prudence : “Ne savez-vous pas que Notre Seigneur est peut-être caché sous les haillons de ce miséreux ? Comment oserais-je refuser la charité à mon Seigneur ?” Ce fut en ces circonstances qu’il lui arriva une singulière aventure.

Assister les agonisants, leur porter les derniers sacrements est pour Camille mission essentielle.

Les Pauvres Serviteurs des Malades gèrent alors l’église Sainte-Madeleine, non loin du Panthéon, quartier parmi les plus pauvres de la Ville. Un soir, tard, on frappe à la porte de Camille. Quand il ouvre, il trouve sur le seuil un adolescent qui lui demande de venir tout de suite au chevet de sa grand-mère sur le point de mourir. Assister les agonisants, leur porter les derniers sacrements est pour Camille mission essentielle.

Il suit le garçon, monte à sa suite l’escalier d’un immeuble vétuste, et, derrière lui, pénètre dans un galetas sordide au dernier étage. Là se trouve en effet une vieille femme à l’article de la mort, qui, en voyant le prêtre, s’écrie : “Padre, c’est le Ciel qui vous envoie ! J’ai eu si peur de mourir toute seule et sans les sacrements !” Comme la malheureuse crie au miracle, Camille affirme qu’il n’y a là aucun miracle et qu’elle doit remercier son petit-fils d’être venu le chercher. Alors, la moribonde regarde le prêtre et dit : “Padre, je n’ai pas de petit-fils. Toute ma famille est morte.” Et elle explique que, seule, abandonnée de tous, se sentant partir, elle s’est tournée vers celui dont elle savait qu’il demeure toujours près d’elle : son ange gardien et lui a demandé d’aller chercher un prêtre.

Interloqué, Camille se retourne. Il n’y a aucun jeune homme dans la mansarde. Il comprend que l’ange a fait son travail et que, dans un souci de discrétion, peu désireux, comme le sont souvent les esprits bienheureux, d’être reconnu pour ce qu’il était, il a pris apparence humaine et s’est fait passer pour un petit-fils en peine pour sa grand-mère chérie.

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