Le film réalisé par Richard Pottier et Ferdinando Baldi en 1960 retient pour titre le célèbre épisode du combat de David contre le géant philistin Goliath, alors même que cette confrontation n’aura lieu qu’au terme du film d’une durée de 113 min, et dont 18 auraient été coupées sans que l’on sache les raisons.
L’option retenue, avec justesse pour le scénario, a été de montrer dans quel contexte le jeune David allait être conduit à régner sur Israël. Le roi Saül a été, en effet, rejeté par Dieu pour sa mauvaise conduite, ainsi que le souligne le premier Livre de Samuel dans la Bible :
C’est le prophète Samuel qui portera le reproche divin à la connaissance du roi interprété avec brio par Orson Welles. Les premières minutes de ce péplum franco-italien tourné à Rome, Zagreb et Jérusalem nous montrent un roi Saül tourmenté par son inconduite qui a provoqué la colère de Dieu et par la perte de l’Arche d’Alliance au profit de son ennemi philistin, ce qu’a admis dans sa faiblesse le roi :
Orson Welles, qui a lui-même réalisé les propres scènes où il apparaît, parvient à rendre très justement cette ambiguïté du roi Saül, bien sensible dans la Bible, à l’égard du jeune David, joueur de harpe, dont il reconnaît le charisme, le charme et le rayonnement, tout en en redoutant les conséquences pour son propre pouvoir, surtout lorsque celui-ci combattra le géant Goliath. Un géant interprété pour ce film par Aldo Pedinotti, un acteur italien, qui pour l’anecdote, faisait plus de 2 mètres !
Le film « David et Goliath » opte, cependant, dès le début pour une opposition marquée du jeune David, reconnu et oint par le prophète Samuel, à l’encontre du roi Saül, ce qui est totalement absent de la Bible. Nous le voyons à l’écran parvenir dans la ville de Jérusalem tel un héros solitaire et haranguer les foules en dénonçant les turpitudes du roi, critique totalement exclue des Saintes Écritures qui au contraire insisteront sur la fidélité de David à l’égard de son roi, même lorsque ce dernier s’opposera ouvertement à lui et cherchera à le faire disparaître. La lecture plus qu’extensive du texte biblique pousse même les réalisateurs à imaginer que Saül enjoindra ouvertement David d’aller combatte Goliath, tout en sachant qu’il n’en réchapperait pas, alors que la Bible rapporte le contraire :
Une liberté d’adaptation qui permet cependant au scénario de rebondir, de multiplier actions et retournements, et d’entrer ainsi dans le genre péplum…
Ce film n’échappe pas, en effet, aux codes incontournables du genre péplum avec ses danses langoureuses, ses décors d’un kitsch particulièrement recherchés et un palais du roi Saül en carton-pâte rappelant les édifices babyloniens. Les nombreuses coupures sans transition, entre les scènes tournées dans les studios romains et celles prises directement en extérieur tournées à Zagreb et à Jérusalem, laissent l’impression de batailles rangées plus ou moins cohérentes — notamment avec cette formation des soldats en tortue anachronique, inspirée des légions romaines des siècles plus tard — que du véritable combat évoqué par l’Ancien Testament ! La Bible souligne, en effet, qu’après la mort de Goliath, les Philistins battirent en retraite, terrifiés par la mort de leur héros :
Or, au lieu de cette débâcle, le film a préféré un combat digne des grands péplums, tout en s’écartant du souffle biblique dû à la victoire singulière du jeune David contre l’invincible Goliath. Une scène offrant cependant de nombreux combats et cavalcades, probablement empruntée ou achetée à un autre film, pratique courante à l’époque et qui permettait à de nombreux long-métrages d’entrer dans le genre grand péplum. Une adaptation du récit biblique et du fameux épisode de David et Goliath qui se laisse regarder.