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Olave, la stupéfiante âme sœur de Baden-Powell

Olave Baden-Powell

© National Portrait Gallery, London

Olave St Clair Baden-Powell (née Soames), Lady Baden-Powell, by Vandyk, 18 February 1916.

Mathilde de Robien - publié le 22/02/21 - mis à jour le 22/02/24

À l'occasion de la journée mondiale du scoutisme, ce 22 février, Aleteia vous propose de redécouvrir cette figure méconnue mais incontournable du mouvement. En épousant Robert Baden-Powell, de 32 ans son aîné, Olave Soames s’engage corps et âme dans le scoutisme. Aux côtés de son mari, puis veuve, elle a joué un rôle clé dans l’essor du guidisme à travers le monde.

Née en 1889 au sein d’une famille aisée d’Angleterre, Olave Soames, d’un naturel timide et anti-conformiste, amatrice de sport et de grand air, épouse à l’âge de 23 ans un général en retraite de 55 ans, héros de la guerre des Boers et fondateur d’un mouvement d’éducation en pleine expansion : Lord Robert Baden-Powell. Un mariage qui bouleverse son existence vouée aux voyages et à l’oisiveté, auxquels l’avaient habituée ses parents. Eux-mêmes parents de trois enfants, Robert et Olave ont œuvré main dans la main pour développer le scoutisme d’abord en Angleterre, puis dans le monde entier. Le premier camp scout organisé en août 1907 à Brownsea Island, en Angleterre, accueillait une vingtaine de jeunes. Aujourd’hui, ils sont 40 millions, dans plus de 200 pays, à vivre la grande aventure scoute. Une fécondité exceptionnelle due à l’engagement et à la détermination d’un couple hors du commun.

Sa rencontre avec Robert

Enjolivée ou non, Robert Baden-Powell raconte lui-même l’histoire de sa rencontre avec Olave à bord d’un bateau pour New-York, en janvier 1912, dans son livre de souvenirs A l’école de la vie. Une anecdote à travers laquelle il met en valeur une faculté chère à tout scout qui se respecte : l’observation. En effet, il assure pouvoir reconnaître le caractère d’une femme à sa démarche. Et celle d’Olave, révélant « un esprit sérieux et droit, beaucoup de bon sens et en même temps le goût de l’aventure », aurait attiré son attention deux ans auparavant, à Londres, non loin de la caserne de Knightsbridge où il était affecté. Deux ans après, sur le pont du RMS Arcadian, il surprend la jeune femme en lui demandant si elle ne se promenait pas, il y a deux ans, près de ladite caserne, accompagnée d’un épagneul brun et blanc. Une entrée en matière qui ne manque pas de toucher Olave, au point que cette dernière écrit à sa famille : « C’est la seule personne intéressante à bord ». Lui effectuait son premier tour du monde du scoutisme, tandis qu’elle partait en vacances avec son père. Il avait 55 ans, elle 23. Étant tous deux nés un 22 février, 32 ans, jour pour jour, les séparaient. Ils se fiancent en septembre de la même année, et se marient dans l’intimité le 30 octobre 1912, dix mois après leur rencontre. « Elle savait que le mouvement fondé par son mari ferait désormais partie de son univers quotidien. Mais elle n’évaluait certainement pas encore combien elle s’engagerait elle-même dans le scoutisme et, surtout, au sein de son équivalent féminin, le guidisme », commente Philippe Maxence, auteur de la seule biographie en français consacrée à Olave (Olave Baden-Powell, l’aventure scoute au féminin, Artège, 2020).

Olave Baden-Powell
© National Portrait Gallery, London
Olave St Clair Baden-Powell (née Soames), Lady Baden-Powell, by Vandyk, 18 February 1916.

Quelques mois après, la santé de Robert exigeant, selon les prescriptions de l’époque, de changer d’air et de s’exposer au soleil, le jeune couple embarque pour l’Algérie. Là, Robert réserve à Olave la surprise de l’emmener une semaine en randonnée dans les montagnes qui bordent le Sahara, près de Biskra, avec deux mules et une tente. Une manière de tester sa faculté d’adaptation à la vie scoute ? Epreuve pour le moins réussie, au regard de la lettre que Robert envoie à sa mère, datée du 31 janvier 1913 : « C’est un vrai trésor au camp et elle est aussi douée qu’un homme des bois. Nous dormions toujours à la belle étoile et n’avons utilisé notre tente qu’une nuit, et seulement parce qu’il pleuvait ». Olave est prête pour la grande aventure !

Son engagement total en faveur du guidisme

Lorsqu’Olave se marie avec Robert, le guidisme se développe déjà depuis quelques années, inspiré par Robert et encadré par une association créée en avril 1910, la « B.P.G.G » (Baden-Powell Girl Guide), présidée par Agnès Baden-Powell, la sœur de B.P. Une structure qui a vu le jour en raison de l’enthousiasme des jeunes filles à vivre elles aussi l’aventure scoute. En effet, sans attendre quelconque autorisation, une poignée de jeunes filles avaient décidé de porter un chapeau à quatre bosses, d’aller camper dans les bois et de rendre chaque jour un service à quelqu’un. “Lors du premier rassemblement scout de Chrystal Palace, en 1909, elles s’étaient imposées en revêtant d’elles-mêmes l’uniforme et en pratiquant le scoutisme”, explique Philippe Maxence. “Très vite, il avait donc fallu les organiser, les encadrer et créer une structure propre à les accueillir”.

Olave s’investit pleinement dans le mouvement en 1916, en prenant la tête du comité des guides chargé de récolter des fonds pour les Maisons de soldats en France. En mars de la même année, elle est nommée commissaire du comté du Sussex. Puis peu de temps après, grâce notamment à ses compétences en organisation, commissaire national. En février 2018, elle reçoit le titre de “chef guide”, le pendant féminin de son mari, le célèbre “chef scout”. “Désormais Olave occupait la toute première place au sein du guidisme britannique”, commente son biographe. En 1930, elle est reconnue responsable de la branche féminine sous le titre de Cheftaine Guide du monde, titre qui n’est d’ailleurs plus porté par la suite.

Olave Baden-Powell
Wikimedia Commons
Olave Baden-Powell

À la mort de Robert, “Lady B.P.” poursuit inlassablement l’œuvre de son mari, convaincue des qualités pédagogiques du scoutisme et de son intérêt en faveur de l’émancipation des jeunes filles. Pendant 30 ans, de 1941 jusqu’en 1970, elle ne visite pas moins d’une centaine de pays, anime des conférences, rencontre les guides et scouts du monde entier, assiste à de multiples cérémonies, camps et Jamborees, s’efforce d’apaiser les tensions entre différentes branches… La totalité de ses voyages effectués depuis 1931 équivaut à cinq fois le tour du monde et à 653 vols. Une mobilité exceptionnelle pour une femme de cette époque.

Une vocation exclusive

Un engagement sans faille, de tout son être et de toute son âme, qui ne lui laisse guère le temps de s’occuper de ses propres enfants. Robert et Olave donnent naissance à trois enfants, entre 1913 et 1917 : un fils, Peter, et deux filles, Heather et Betty. Le couple Baden-Powell a également accueilli sous son toit les trois filles de la sœur d’Olave, Auriol, après qu’elle se fut suicidée. Comment Olave a-t-elle pu concilier ses missions de mère et de responsable mondiale du guidisme ? Dans ses Mémoires, Olave reconnaît et salue la présence et l’efficacité des nurses à qui étaient confiés l’éducation de ses enfants et l’entretien de sa maison. “Laissez-moi avouer en toute franchise que je n’ai jamais été une mère très attentive. J’ai aimé mes enfants mais mon Robin chéri était la personne qui comptait le plus dans ma vie”, écrit-elle.

“Dans son esprit, le guidisme constituait d’ailleurs une suite logique de l’amour qu’elle portait à son mari, en sorte que véritablement, ses enfants n’arrivaient qu’en troisième position”, analyse Philippe Maxence. Au soir de sa vie, elle ne cache pas quelques regrets : “Je me rends compte maintenant que j’ai perdu beaucoup en étant souvent si loin de mes enfants, même si cela aurait pu être pire encore”.

Son dernier message, empreint d’espérance chrétienne

De tradition anglicane, “sa famille n’était absolument pas religieuse”, note Philippe Maxence. Toutefois, souligne-t-il, les Soames se rendaient régulièrement aux offices, fidèles aux conventions de l’époque. Mais Olave, dont la foi n’était soutenue ni par une vie de prière ni par aucune formation religieuse, s’y ennuyait. La foi de Robert l’aurait-elle aidée à cheminer ? Quatre ans avant sa mort, le 12 novembre 1973, elle enregistre un dernier message destiné aux scouts et guides du monde entier, empreint d’espérance chrétienne :

« J’aurai quitté ce monde lorsque vous recevrez ce message ; il vous remerciera de toutes les gentillesses et marques d’affection dont j’ai été l’objet et vous dira combien je suis réjouie de la façon dont vous vous êtes acquittés de votre tâche au sein du mouvement que, voilà bien des années, mon mari bien-aimé a créé pour favoriser l’épanouissement des garçons et des filles de tous les pays.

Je crois en Dieu Tout-Puissant et en l’existence d’un monde à venir où nous serons tous deux réunis ; nous serons toujours avec vous qui appartenez à cette grande famille universelle et continuerons de nous préoccuper de vos progrès et de votre bien-être.

Je suis sûre que vous continuerez d’utiliser pleinement les méthodes de travail et de jeux qu’offre notre mouvement, d’entretenir les liens d’amitié noués au cours de réunions et de camps, de rester fidèles à la Promesse et d’observer les lois selon lesquelles vous vous êtes engagés à vivre lorsque vous avez adhéré au mouvement. De cette manière, non seulement vous vous épanouirez physiquement et spirituellement mais vous toucherez également ceux qui vous entourent en faisant ce qui est bon et juste et en leur montrant de la bienveillance. Vous lutterez ainsi contre les maux de ce monde et contribuerez à faire de celui-ci un endroit où il fait bon vivre.

Je suis sûre que vos efforts seront récompensés.
Que Dieu soit avec vous. »

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FemmesScoutisme
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