En tant que vierge consacrée et magistrate municipale, Geneviève (423-512) a le souci non seulement des plus pauvres mais de tout le peuple de Paris. C’est au cours d’une situation particulièrement difficile que cette sainte montre toutes sa dévotion et son sens du service au peuple qui lui a été confié.Paris, 475. L’automne touche à sa fin. Les nuits se font plus froides et plus longues. Le soleil a disparu depuis longtemps. Cette nuit encore, de nombreux habitants sont allés se coucher le ventre vide. Les talents de négociatrice de la magistrate, Geneviève, ont permis à la ville d’éviter le bain de sang, mais un autre problème se pose. Le siège et le blocus imposés par les francs ont permis à un nouvel ennemi de pénétrer les murs de la ville : la famine.
Les pauvres meurent dans les rues et les greniers des riches se vident à une vitesse alarmante. C’est donc dans cette atmosphère d’angoisse et de faim que la ville s’est endormie. Mais dans une chapelle, une petite lumière persiste. Enveloppée dans un grand manteau à capuche, une femme est à genoux devant l’autel.
– Seigneur, dit-elle, veille sur Paris en mon absence. Éclaire mon chemin et donne du courage aux braves qui m’accompagnent dans cette mission.
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Geneviève remonte sa capuche et quitte alors la petite chapelle pour rejoindre la Seine, sa petite lanterne à la main. Le père Bessus est là, ainsi que la quarantaine d’hommes qui ont accepté de braver le blocus avec elle.
– Tout est prêt, magistrate, dit le prêtre Bessus. Nous n’attendons que tes ordres.
Geneviève sourit. Elle remercie chacun d’eux et les bénit une dernière fois avant d’embarquer dans le bateau à la tête de la flotte de onze vaisseaux. Il s’agit d’abord de quitter Paris aussi discrètement que possible.
Les hommes ont revêtu des vêtements de francs afin de passer inaperçus, mais si par malheur on les arrêtait, la supercherie ne durerait pas. Geneviève prie de nouveau tandis que la petite flotte remonte le fleuve. C’est alors qu’une brume se lève et s’épaissit rapidement, jusqu’à recouvrir la Seine et ses berges. Elle ne disparaît qu’au petit matin, lorsque Paris est bien loin derrière la flottille. Et de nouveau, Geneviève rend grâce.
Mais quelques jours plus tard, un autre obstacle survient. De violents vents agitent le fleuve et manquent à plusieurs reprises de faire chavirer les bateaux. Cela dure plusieurs heures. Les bras des rameurs sont fatigués, et leurs mains, couvertes de cloques. S’ils viennent à perdre leur cadence, la tempête aura raison d’eux. Geneviève se lève alors au devant du bateau.
– Ne craignez rien, crie-t-elle aux hommes pour couvrir le bruit du vent. Et chantez avec moi.
Sur l’air des psaumes implorant la force et la miséricorde de Dieu, les rameurs reprennent leur cadence et chantent avec la magistrate. Enfin, la tempête se calme et encore une fois, Geneviève rend grâce. Une fois en Champagne, elle fait charger les bateaux de grain avant de reprendre le chemin de Paris. Cette fois, le voyage se fait sans encombre sous la bienveillance de son époux des cieux.
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De retour, Geneviève fait vendre le grain à ceux qui ont les moyens de l’acheter, et fait préparer des pains dans les fours publics pour les plus pauvres. Mais le devoir est loin d’être fini. Un soir, elle se rend à la petite basilique de saint Denis pour s’y recueillir. Une fois de plus, le Seigneur lui a souri.
– Roi des cieux, implore-t-elle, accorde encore à ta servante la force et la sagesse. Donne-moi les mots justes afin de faire des francs tes alliés et tes enfants.
Au fond d’elle, Geneviève sait intuitivement que les francs ont le potentiel de devenir peuple de Dieu. Car s’ils sont païens, ils n’ont pas choisi la voie de l’hérésie arienne. Mais il lui faudra toute sa diplomatie et l’aide de Dieu pour épargner Paris et poser la première pierre du royaume qui deviendra fille aînée de l’Église.
Geneviève rejoint le ciel le 3 janvier 512, après avoir réussi non seulement à sauver Paris maintes fois, mais à conclure une alliance avec Clovis I et introduire la foi chrétienne parmi les francs. Elle est sainte patronne de Paris, du diocèse de Nanterre et de la Gendarmerie nationale.