La sainteté du couple formé par Joseph et Marie répare aussi le mal né du couple d’Adam et Ève. C’est ensemble, dans leur communion d’amour, que Marie et Joseph reflètent cette parfaite image de Dieu qui attire le Verbe éternel et le conduit à « se faire chair et à planter sa tente parmi nous » (Jn 1, 14). Le pape Paul VI se plaisait à associer étroitement Marie et Joseph dans leur ministère respectif au service du Mystère de l’Incarnation : « Voici qu’au seuil du Nouveau Testament comme à l’entrée de l’Ancien se dresse un couple. Mais, tandis que celui d’Adam et Ève fut la source du mal qui a déferlé sur le monde, celui de Joseph et de Marie est le sommet d’où la sainteté se répand sur toute la terre. Le Sauveur a commencé l’œuvre du Salut par cette union virginale et sainte où se manifeste sa toute-puissante volonté de purifier et sanctifier la famille, ce sanctuaire de l’amour et ce berceau de vie. »
Le prototype de la famille chrétienne
Le pape Jean Paul II prolonge cette doctrine lorsqu’il donne la Sainte Famille en modèle à toutes les familles chrétiennes : « Puisque, en définitive, l’essence de la famille et ses devoirs sont définis par l’amour, c’est dans la Sainte Famille, cette "Église domestique” (cf. Lumen Gentium, 11), que toutes les familles chrétiennes doivent trouver leur reflet. En elle, en effet, “par un mystérieux dessein de Dieu, le Fils de Dieu a vécu caché durant de longues années. Elle est donc le prototype et l’exemple de toutes les familles chrétiennes” » (cf. Familiaris consortio, 8 et Redemptoris Custos, 7). C’est au sein d’une famille que le Fils de Dieu a voulu s’incarner, pour jouir de la tendresse et de l’assistance d’une vraie mère et d’un vrai père, tous deux indispensables pour que l’Enfant puisse « grandir en sagesse, en taille et en grâce sous le regard de Dieu et des hommes » (Lc 2, 52).
Le pouvoir de nommer Jésus
Restant plus proche du récit évangélique, saint Jean Chrysostome (344-398) paraphrase le dialogue du Messager divin et de Joseph : » Retiens, lui dit l’Ange, cette épouse que tu voulais renvoyer, car Dieu même te la donne, et non ses parents. Il te la donne non pour l’union charnelle, mais seulement pour demeurer avec toi ; il l’unit avec toi par moi qui te parle. Non seulement elle est pure de tout commerce illicite, mais sa fécondité est au-dessus des lois de la nature. N’éprouve donc aucune tristesse de la conception si heureuse de ton épouse, mais livre-toi à une grande allégresse, car “ce qui a été engendré en elle est de l’Esprit saint. Elle enfantera un fils à qui tu donneras le nom de Jésus”. Car bien que cet enfant soit conçu du Saint Esprit, ne crois pas néanmoins que tu sois dispensé d’en prendre soin, et de le servir en toutes choses. Bien que tu sois étranger à sa naissance, et que Marie soit toujours demeurée parfaitement vierge, je te donne néanmoins à l’égard de cet enfant la qualité de père en tout ce qui ne blessera point celle de la Vierge, et je te laisse le pouvoir de le nommer. C’est toi qui lui donneras son nom ; bien qu’il ne soit pas ton fils, tu ne laisseras pas d’avoir pour lui l’affection et le soin d’un père. C’est pour cette raison que je te permets de le nommer toi-même, afin de t’unir très étroitement avec cet enfant. »
2 PG LVII, Hom. IV, 41 sq, cité par Mgr Villepelet, Les plus beaux textes sur Saint Joseph, éd. du Vieux Colombier, Paris, 1959, p. 27.