Prix Nobel de la paix, John Hume fut l’architecte catholique de l’Accord du Vendredi saint qui mit fin au conflit armé en Irlande du Nord, en 1998. Il s’est éteint ce lundi 3 août, à 83 ans.
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Le décès de John Hume durant la crise du Covid-19 n’aura pas permis d’organiser les funérailles nationales et internationales d’un homme politique nord-irlandais dont il est encore difficile de mesurer toute l’importance pour un pays qui fut profondément divisé entre catholiques et protestants jusqu’à “l’accord du Vendredi saint”, signé le 10 avril 1998. John Hume, né le 18 janvier 1937, dans la ville de Derry (si on est catholique), Londonderry (si on est protestant, attaché à l’union entre l’Irlande du Nord et la Grande-Bretagne), est considéré par un grand nombre d’observateurs comme le “Martin Luther King” irlandais, selon la puissante formule de l’ancien président Bill Clinton.
Bien qu’il fût un nationaliste convaincu, c’est-à-dire qu’il souhaitât durant toute sa vie le rattachement de l’Irlande du Nord à la République d’Irlande, l’Eire, il privilégia systématiquement des moyens pacifiques pour arriver à cette fin. Il ne répugna jamais au dialogue avec les unionistes nord-irlandais, restés fidèles, contre vents et marées, à la couronne d’Angleterre.
Une grande humilité
Rarement le destin d’un homme a été si intimement lié à celui d’un territoire problématique, présenté soit comme un pays, l’Irlande du Nord, soit comme une région ou province (la province d’Ulster). Sa personnalité, en particulier son humilité, ses profondes convictions religieuses (il étudia à St Patrick’s College, le séminaire national d’Irlande pour l’Église catholique, dans le but de devenir prêtre avant de se décider à embrasser la carrière d’enseignant), son attachement à sa ville de Derry pour laquelle il ne ménagea aucun effort pour assurer sa prospérité, mais aussi son implication de premier plan durant le mouvement des droits civiques en Irlande du Nord durant les années 1960, suffiraient à faire de lui une figure majeure de la vie culturelle et sociale d’Irlande du Nord.
Il ne faudrait pas oublier non plus le rôle qu’il joua dans les coopératives de crédit en Irlande (il fut le plus jeune président de la ligue des coopératives de crédit d’Irlande), dont on oublie souvent l’importance qu’elles eurent au XXe siècle auprès des Irlandais rencontrant de graves difficultés pour accéder à des sources de financement.
Architecte de la paix
Mais c’est en politique que John Hume montrera toute la palette de ses qualités propres, sa “force tranquille”, sa capacité à penser et à réaliser des projets politiques dont les effets sur la société nord-irlandaise furent décisifs et contribuèrent puissamment à ouvrir la voie à l’accord historique du Vendredi saint mettant fin à des décennies de conflits interreligieux. John Hume fut un membre fondateur du SDLP, le parti social-démocrate et travailliste créé en 1970 qui exerça une position dominante au sein de la communauté catholique jusqu’aux élections de 2001. Il en devint le deuxième chef de file en 1979, succédant à Gerry Fitt.
Véritable architecte de la paix en Ulster, il reçoit en 1998 le prix Nobel de la paix qu’il partage justement avec le chef de file unioniste David Trimble, lequel joua un rôle déterminant au sein de la communauté protestante pour que l’accord du Vendredi saint puisse aboutir. À la surprise générale, John Hume refusera cependant de devenir le premier vice-Premier ministre de l’histoire de l’Irlande du Nord alors que David Trimble en deviendra le Premier ministre en 1999, sans doute pour des raisons de santé (Hume commence à ressentir des troubles neurocognitifs majeurs dès les années 1990).
Un géant de la politique
En 2004, John Hume se retire de la vie politique, Mark Duncan lui succède comme chef de file du SDLP, mais il continue à participer aux campagnes qu’il juge importantes comme l’intégration européenne ou la lutte contre la pauvreté dans le monde. En 2012, Hume est fait chevalier commandeur de l’ordre de Saint-Grégoire-le-Grand par le pape Benoît XVI. Il s’est éteint le 3 août 2020, après avoir vécu de nombreuses années dans une maison de retraite de Derry à cause de sa maladie. Il restera comme un “géant de la politique” irlandaise pour reprendre l’expression de l’ancien Premier ministre britannique Tony Blair, et une référence majeure des mouvements pour les résolutions non-violentes des conflits dans le monde.
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